Les mélèzes se balancent à grands gestes calmes. Le vent est tiède, encore chargé d'été bien qu'octobre soit déjà là. Je ralentis le pas. L'air sent la résine et la térébenthine . Une odeur qui monte en moi, me submerge, m'oblige à m'arrêter, comme si j'étais pris d'une crise d'asthme. Et soudain, tout revient d'un coup dans ma mémoire, comme des lièvres fous qui filent vers le chasseur.
Quel âge avais-je ? Quinze ans ? Non, sûrement pas. Je commençais seulement ma deuxième année d'Humanités. Alors, treize ? Peu importe.
Il y avait des semaines qu'on ne riait plus guère à la maison. De ma faute, je le savais. Un pénible échec en math, en juin. Deux mois de vacances où mon humeur était à la hauteur de mes exercices d'algèbre. Le programme minimum. Et des discussions éreintantes sur la jeunesse, les efforts, le travail, avec des « c'est pour toi, mon vieux » répétés à longueur de journée. Et puis, juste avant la rentrée, un examen réussi de justesse, même presque pas réussi mais, avait dit mon père « les profs sont trop bons ».