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Introduction

Lorsque mon éditrice me demande de travailler sur un recueil de soupes à la mode de Jules Gouffé, je m’interroge ? ; comment adapter à notre époque la cuisine de ce célèbre chef de la fin du XIXème siècle ?

Je me plonge donc dans son « Livre des Soupes ? », daté de 1875… D’entrée de jeu, le ton est donné : le potage est « l’ouverture indispensable de tout dîner, (…) réjouissant les convives et les sollicitant à faire honneur au repas ». Voyons voir… Quelques pages plus loin, ma perplexité prend toute son ampleur ? !

Imaginez la composition des recettes de celui qu’on surnommait « l’apôtre de la cuisine décorative » et qui, fréquemment sollicité par Napoléon III pour les dîners d’apparat, s’inscrivait dans la lignée des fastes culinaires du Second Empire…

Sans doute ses Sagou, Hochepot, Monglas, Barch, Nivernais, Rocambole, Ouka, Tschy, Vertpré ou autres empotages faisaient-ils le bonheur des papilles sans surcharger le système digestif de ses contemporains mais, à la lecture des ingrédients pour le moins roboratifs, je réalise déjà à quel point nos besoins énergétiques ne justifient plus de telles agapes !

L’idée de dédier un ouvrage aux potages me plaît néanmoins et je me lance dans l’aventure. Gouffé ne m’inspirera sans doute pas pour la composition des recettes, mais pourquoi ne pas remettre à la mode certaines appellations « non-contrôlées » ? « Le meilleur outil et le plus bel ustensile de la cuisine demeurant son langage, l’appétit vient en lisant. » (Renard, 2004)

Comme je n’ai pas 52 idées de soupes, et que l’idéal serait d’en proposer une par semaine, je fais appel à l’équipe ; amis, famille, relations professionnelles, tous participent au challenge avec enthousiasme en me livrant leurs bons plans ! Merci infiniment…

Ensuite, à moi de jouer pour ajouter du sens nutritionnel aux saveurs et faire de ces boissons goûtues des boosters d’énergie et de vitalité !

Préambules culinaires

La soupe n’a pas toujours bonne presse… Nombreux sont ceux qui se souviennent des potages de leur enfance, dépourvus de goût, sorte de breuvage thérapeutique destiné à combler les carences hivernales de nutriments.

Chaud devant !

Ironie du sort, loin de pourvoir notre corps en substances vivantes indispensables à son bon fonctionnement, la soupe chaude, voire bouillante, l’en prive !

Catalyseurs des réactions chimiques de notre organisme, et acteurs principaux de l’assimilation des vitamines et minéraux, les enzymes, même endogènes, ne tiennent plus la route, et c’est un euphémisme, sous l’effet de la chaleur ! Sans d’ailleurs qu’il fasse torride dans leur environnement puisqu’ils ne résisteraient pas à une température de plus de 42°…

Ce n’est pas pour autant que je vais vous priver de soupes cuites, ô combien réconfortantes à certaines périodes de l’année. Certains aliments, comme la tomate, gagnent d’ailleurs à être chauffés pour libérer leurs nutriments. Mais un petit conseil : dégustez ces élixirs tièdes !

Quant au plaisir gustatif, je vous livre sans réserve nos idées collégiales qui, je l’espère voire n’en doute pas, vous séduiront et remiseront vos souvenirs désagréables au placard !

Une crème de soupe

Un autre bémol au potage traditionnel ; l’ajout de crème à toutes les…sauces ?

Pourquoi se priver d’onctuosité, me répondrez-vous ? Et j’acquiesce !

Malheureusement, qu’il s’agisse de crème fraîche, de crème d’avoine ou encore de soja, gare aux conséquences ! La première, par manque d’enzyme spécifique pour la digérer, à moins qu’elle ne soit crue, est source d’intolérances aux multiples répercussions sur notre santé. Les secondes, parce que l’acide phytique contenu dans les graines non germées a un effet déminéralisant !

En revanche, l’apport « crémeux » peut être obtenu en rajoutant des oléagineux, qui, à l’exception de l’avocat, auront été trempés 12 h préalablement, et bien rincés. Prenons l’exemple de la noix de cajou ; après son trempage, laissez-la fermenter quelques heures à l’air libre après l’avoir mixée avec du réjuvélac, source naturelle de lactobacilles (bactéries amies de notre intestin), et vous profiterez d’autant plus de ses vertus nutritionnelles !

Ingrédients et nutriments

Comme je pars du principe que les ingrédients de mes recettes sont « bio », je ne suggère que rarement de les éplucher. En revanche, rincez-les, brossez-les, le goût de terre n’apportera rien à la sapidité de votre potage ! Certains légumes, comme le céleri rave, peuvent être pelés, tout en douceur s’ils sortent à peine de la cueillette, ou plus en profondeur s’ils viennent de notre garde-manger, au sens premier du terme !

L’idée générale est de conserver les vitamines et minéraux principalement cachés sur ou sous la peau. S’il s’agit d’aliments non bio, en revanche, usez de votre économe car les pesticides sont logés à la même adresse !

Pensez également à mâcher pour enclencher le travail des enzymes salivaires. Je reprends souvent ce proverbe chinois « il faut boire les solides et manger les liquides » ! Dans le cadre de la soupe, bien souvent cuisinée à base de légumes « sucrés » (carottes, courges, panais, poireaux, …), cet adage est d’autant plus de mise que les glucides sont prédigérés dans la bouche, contrairement aux protéines. Pour vous aider à « insaliver », rajoutez une garniture croquante ! Graines de potiron ou tournesol (préalablement trempées dans de l’eau, une fois de plus), légumes crus en dips, galettes esséniennes au petit épeautre germé, les idées ne manquent pas ; laissez libre cours à votre créativité !

Sans compter que l’accompagnement cru joue un rôle important dans le cadre d’un potage cuit, servi en « plat unique ». En effet, il semblerait que l’apport de cru freine, voire abolisse, l’apparition d’un phénomène inflammatoire, appelé leucocytose digestive, lié à l’ingestion d’aliments cuits ! Que du bonus, donc !

Côté pratique

En dehors de rares cas spécifiés, je cuis tous mes légumes à la vapeur. Ce mode de cuisson douce préserve les nutriments, lesquels se retrouvent en partie dans le bac qui contient l’eau de cuisson. Récupérez donc celle-ci — sauf si des pommes de terre en chemise sont de la partie — et mixez-la avec les autres ingrédients ! Comme l’équipement participe à la réussite des recettes, en dehors du cuiseur-vapeur, je vous recommande de faire l’acquisition d’un blender puissant, capable de donner de l’onctuosité à vos soupes, qu’elles soient crues ou cuites. En ce qui me concerne, je suis fidèle au Vitamix depuis une dizaine d’années, qui répond parfaitement à mes exigences gourmandes tout en étant d’une solidité à toute épreuve ! N’hésitez pas à gonfler également votre stock d’épices et condiments car ceux-ci n’ont pas d’égal pour jouer de multiples variations sur un même thème et éveiller vos papilles tout en gardant la ligne !

Last but not least, vous l’aurez vite compris en parcourant ce livre, suivez le rythme des saisons ! Tout d’abord parce que c’est écologique. Ensuite car les aliments sont dénaturés lorsqu’ils sont cultivés en dépit du bon sens !

Or sens, science et conscience forment à mes yeux le bouillon de réflexion qui ne fera que rajouter de la saveur à vos préparations culinaires…

LA RECETTE DE BASE QUI CHANGE TOUT…

« Tout le monde croit que le fruit est l’essentiel de l’arbre quand, en réalité, c’est la graine »

Nietzsche

Plus prosaïquement, « on ne récolte que ce que l’on sème ». Je vous propose dès lors de semer des « bonnes » bactéries au sein de votre intestin en remplaçant régulièrement le berlingot de crème, certes souvent bio et à base de céréales et d’oléagineux, mais hélas également industrielle, par une « crème aigre » faite maison !

Protéinée et riche en nutriments, la crème aigre se compose d’oléagineux et d’un élixir du nom de réjuvélac car il a le pouvoir de régénérer les lactobacilles !

Cette potion, magique de mon point de vue, vous demandera l’effort très relatif de jouer brièvement les enchanteurs. Si votre organisation ne s’y prête pas, remplacez-la par de l’eau pure, en tenant compte que le temps de fermentation devra être plus long et que l’opération pourrait ne pas porter ses fruits. On peut aussi ajouter 2 à 3 capsules d’Acidophilus-Bifidus pour accélérer la fermentation et obtenir un goût plus proche du yaourt.

RÉJUVÉLAC

Tremper 3 ou 4 cuillers à soupe de graines de petit épeautre complet ou d’une autre céréale dans de l’eau de source pendant 12 h dans un germoir ou autre bocal en verre couvert d’une étamine.

Rincer plusieurs fois les graines, idéalement toujours à l’eau de source, et laisser le résidu d’eau s’égoutter en retournant le bocal (l’étamine laisse passer l’eau mais pas les graines) et laisser poser à température ambiante durant 12 h.

Répéter l’étape précédente toutes les 12 h, jusqu’à ce qu’un germe apparaisse (environ 48 h au total).

Une fois que les graines ont germé, remplir le bocal d’eau (en quantité équivalente à celle des céréales) et laisser macérer à température ambiante durant 48 h. Vider ensuite l’eau ‘fermentée’, appelée réjuvélac, dans un récipient et la conserver au frigo tant qu’elle n’est pas consommée ou utilisée pour une préparation comme la crème aigre.

Les graines pourront être réutilisées pour faire 2 autres portions de réjuvélac, dont le temps de macération sera réduit de moitié.

Ne pas consommer les graines, en revanche les oiseaux en raffolent !

CRÈME AIGRE

Mixer jusqu’à obtenir une crème lisse et onctueuse, débarrasser dans un bocal de taille suffisante car le volume de la préparation va augmenter de +/- un tiers et couvrir d’un linge laissant passer l’air.

Laisser reposer à température ambiante pendant 4 à 8 heures, jusqu’à ce que la crème fermente et que de petites bulles apparaissent dans la masse.

Se conserve plusieurs jours au frigo.

En dehors des soupes, cette crème peut servir de base aux sauces salées ou sucrées, ainsi qu’aux milk-shakes. Elle peut être réalisée à partir d’oléagineux seuls ou en mélange. Ceux qui donnent les meilleurs résultats sont les noix de cajou, macadamia, de Grenoble et de pécan, les pignons de pin et noix de Brésil.

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SOUPE DE PANAIS AU PARFUM DE COCO

Ingrédients pour 4 personnes :