Cette collection a pour vocation de publier des traités pédagogiques et synthétiques dans des matières fondamentales du droit. Rédigés par des professeurs de la Faculté de droit de Liège, ces ouvrages s’adressent aussi bien aux étudiants qu’aux praticiens qui pourront s’appuyer sur ces études ancrées dans l’actualité et de haute qualité scientifique.
Dans la même collection :
Jacques CLESSE, Fabienne KÉFER, Manuel de droit du travail, 2014
Cécile NISSEN, Anne-Lise SIBONY, Eric GEERKENS, Audrey ZIANS, Méthodologie juridique, 5e édition, 2014
Christian BEHRENDT et Frédéric BOUHON, Introduction à la Théorie générale de l’État – Manuel, 3e édition, 2 014
Christian BEHRENDT et Frédéric BOUHON, Introduction à la Théorie générale de l’État – Recueil de textes, 2e édition, 2 014
Melchior WATHELET, Jonathan WILDEMEERSCH, Contentieux européen, Tomes 1 et 2,
2e édition, 2 014
Paul DELNOY, Pierre MOREAU, Les libéralités et les successions, 4e édition, 2013
Nicolas THIRION, Thierry DELVAUX, et alii, Droit de l’entreprise, 2012
Pascale LECOCQ, Manuel de droit des biens. Tome 1 Biens et propriétés, 2012
Ann Lawrence DURVIAUX, Ingrid GABRIEL, Droit administratif.
Tome 2. Les entreprises publiques locales en Région wallonne, 2e édition, 2012
Ann Lawrence DURVIAUX, Damien FISSE, Droit de la fonction publique, 2012
Michel FRANCHIMONT, Ann JACOBS, Adrien MASSET, Manuel de procédure pénale, 4e édition, 2012
Ann Lawrence DURVIAUX, avec la collaboration de Damien Fisse, Droit administratif. Tome 1. L’action publique, 2011
Nicolas THIRION, Théories du droit. Droit, pouvoir, savoir, 2011
Yves-Henri LELEU, Droit des personnes et des familles, 2e édition, 2010
Gilles GENICOT, Droit médical et biomédical, 2010
Paul LEWALLE, Contentieux administratif, 3e édition, 2008
Paul DELNOY, Éléments de méthodologie juridique, 3e édition, 2008
(revue et corrigée en 2009)
Jean-François GERKENS, Droit privé comparé, 2007
Michel PÂQUES, Droit public élémentaire en quinze leçons, 2005
Georges de LEVAL, Éléments de procédure civile, 2e édition, 2005
Sean VAN RAEPENBUSCH, Droit institutionnel de l’Union européenne, 4e édition, 2005
Louis MICHEL, Les nouveaux enjeux de la politique étrangère belge, 2003
Paul MARTENS, Théories du droit et pensée juridique contemporaine, 2003
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© Groupe Larcier s.a., 2 014 Éditions Larcier Rue des Minimes, 39 • B-1000 Bruxelles
EAN 978-2-8044-7808-7
Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Nord Compo pour le Groupe Larcier. Nous vous remercions de respecter la propriété littéraire et artistique. Le « photoco-pillage » menace l’avenir du livre.
Le présent livre constitue le premier volume d’une étude du droit judiciaire dans son ensemble. Les ouvrages subséquents traiteront de la procédure civile, des voies d’exécutions et des modes alternatifs de règlement des litiges1.
Ces contributions s’inscrivent dans le prolongement des ouvrages et notes de cours de notre éminent prédécesseur, le Professeur Albert Fettweis2. Avant de nous quitter, celui-ci avait remis au premier soussigné la totalité de ses écrits de droit judiciaire en vue de leur mise à jour ultérieure. Nonobstant le fait que des segments de ses travaux relèvent désormais de l’histoire du droit, par sa vision très juste de l’avenir du processus judiciaire, nombre de ses commentaires et réflexions consacrés aux règles de base et aux principes directeurs du procès ont conservé toute leur actualité. Ils continuent à s’intégrer merveilleusement dans la structure d’un Code judiciaire adapté et complété au fil du temps sans perdre son architecture, son opérabilité et sa modernité.
Cet ouvrage s’adresse, avant tout, aux étudiants du baccalauréat en droit de l’Université de Liège, mais il nous paraît également utile aux praticiens qui, à défaut de trouver dans ce commentaire général une réponse précise à toutes leurs interrogations, pourront à tout le moins être guidés dans leurs recherches par les approfondissements référencés figurant en bas de page.
La publication, au mois d’octobre 2010, de cette description des institutions judiciaires et des principes fondamentaux afférents à la compétence des juridictions nous avait parue opportune, eu égard aux tourments qui, ces dernières années, avaient ébranlé l’édifice de la justice lors d’affaires au grand retentissement. Nous formions alors l’espoir que cet ouvrage contribuerait à résorber l’incompréhension que suscite parfois le fonctionnement de cet indispensable service public, assez souvent décrié, tantôt à tort, tantôt à raison. Nous étions néanmoins conscients de la rapide obsolescence à laquelle était exposée notre entreprise.
Quatre ans ont passé et nos prémonitions se sont avérées. Les importantes réformes qui se sont succédé, en particulier en 2013 et 2014 – l’agrandissement des ressorts des juridictions, la création du tribunal de la famille et de la jeunesse, les nouvelles modifications apportées à la discipline des magistrats et la réforme du statut des huissiers de justice, pour ce ne citer que les plus importantes d’entre elles –, ont imposé une remise de l’ouvrage sur le métier afin de répondre aux attentes légitimes des étudiants et des praticiens.
Cette nouvelle édition, voulue à jour au 1er septembre 2014, soit quelques mois avant la publication du deuxième volume consacré à la procédure civile, intègre les modifications législatives et réglementaires, ainsi que les principaux développements jurisprudentiels et doctrinaux qui ont poursuivi leur travail d’irrigation des trois premières parties du Code judiciaire. Nous avons tiré profit de cette mise à jour pour améliorer ci et là quelques passages ou la présentation des développements. Si nous avons été attentifs à éviter toute lacune préjudiciable à l’information du lecteur, nous ne prétendons aucunement à l’exhaustivité en matière de jurisprudence, seule celle des juridictions supérieures étant, à notre connaissance, systématiquement intégrée.
15 septembre 2014
Georges de LEVAL
Frédéric GEORGES
1. Les volumes suivants devraient sortir de presse durant l’année 2015.
2. On citera les ouvrages suivants : Manuel de procédure civile, 2e éd., coll. de la Faculté de Droit de Liège, 1987 ; Précis de droit judiciaire, t. II, La compétence, Larcier, 1971 ; La compétence (notes de cours), Presses universitaires de Liège, 1983 ; Introduction au droit judiciaire – Les institutions (notes de cours), 9e éd., Presses universitaires de Liège, 1987.
La justice a la réputation d’être un monde mystérieux, assez inaccessible, compliqué et onéreux. Il importe de faire la part du vrai et du faux dans ce constat, en examinant les principes généraux du procès, le cadre dans lequel les droits sont mis en œuvre et le statut des personnes qui assurent le fonctionnement de la justice. Cet ensemble constitue ce que l’on dénomme les « institutions judiciaires ».
L’utilité d’une fresque qui leur soit consacrée a été décrite de remarquable façon : « La science du droit ne se nourrit pas d’académisme : elle se développe au sein d’un tissu serré d’institutions qui lui donnent vie et en parachèvent la réalisation. Les cours et tribunaux sont les compagnons obligés du juriste. Sans eux, la science du droit ne serait qu’un jeu d’esthète. Il est indispensable que, dès leurs premiers pas, les juristes prennent conscience des réalités du monde judiciaire moderne qui formeront la trame sur laquelle viendront s’inscrire d’autres enseignements »1.
Le sujet, qui touche directement la personne humaine dans ses relations avec autrui, revêt une grande importance. En effet, le procès, dont dépendent des solutions aux effets moraux, sociaux ou économiques souvent considérables, doit être globalement maîtrisé, à l’aune de l’espace européen, dans son approche tant organique que fonctionnelle, en ne perdant pas de vue qu’il n’est qu’un mode de régulation sociale parmi d’autres ; il faut en user en sachant en mesurer les avantages et les inconvénients.
Ce tome Ier comporte trois livres.
Le premier d’entre eux, intitulé « Approche générale du fonctionnement du service public de la justice », aborde les thèmes fondamentaux constituant le socle de l’institution.
Dans le livre dédié à « l’organisation judiciaire », il est procédé à l’examen des règles générales relatives aux modes et conditions de recrutement des magistrats, à la description de chaque juridiction de l’ordre judiciaire et au statut des différents acteurs de la justice. Sont successivement examinés le juge assis, le ministère public, le référendaire et le juriste de parquet, le greffier, l’huissier de justice et l’avocat.
Enfin, le troisième livre présente des « Éléments de compétence », aux mécanismes de règlement des contestations simples et efficaces donnant lieu à un contentieux limité et rapidement tranché. Ceci explique qu’il s’agit en général d’une synthèse se limitant à des développements essentiels.
1. R. PERROT, Les institutions judiciaires, 13e éd., Montchrestien, 2008, p. 1.
1La justice peut d’abord être envisagée comme une vertu, une exigence morale, un sentiment d’équité que l’on porte au fond de soi-même1. Elle peut également être envisagée en tant que pouvoir, par lequel la fonction de juger est exercée.
D’un côté, il s’agit de « ce qui est idéalement juste, conforme aux exigences de l’équité et de la raison »2, de l’autre, il s’agit de la justice exercée par les cours et tribunaux en vue de permettre la réalisation du droit invoqué ou contesté (rendre la justice) et dès lors de « restaurer l’harmonie sociale troublée »3. Cette seconde acception désigne les institutions judiciaires, organisées de manière hiérarchisée et géographique, la loi conférant des compétences différentes aux juridictions en fonction d’une grille de répartition tenant compte de la nature du litige et de sa localisation.
Idéalement, la justice-exigence morale et la justice-service public devraient se confondre et reposer sur les mêmes valeurs. Dans la réalité des choses, le recoupement n’est que partiel. Même si le présent ouvrage étudie le service public de la justice, il convient de ne pas perdre de vue que les juridictions, en appliquant les règles de droit aux contestations qui leur sont soumises, expriment les valeurs d’une société et que la justice idéale « demeure une aspiration brûlante au cœur des hommes, souvent déçue, jamais éteinte »4. On ne taira pas à cet égard la nuisance considérable que représente, pour la justice en tant qu’institution, son fonctionnement perfectible, qu’il se manifeste dans des problèmes quotidiens, des affaires au plus grand retentissement ou dans de véritables tragédies humaines5.
2Rendre la justice, c’est trancher le litige selon le droit applicable au terme d’une procédure organisée.
Le litige est une contestation d’ordre juridique. Au sens strict, une contestation surgit lorsqu’une prétention se heurte à la résistance de celui à l’encontre de qui elle est formulée ; le litige, également dénommé différend, se transforme en procès lorsque le désaccord juridique est porté devant un juge appelé à le trancher de manière impartiale ; il est à distinguer du conflit qui ne se meut pas sur le seul terrain du droit, comme un conflit collectif du travail ou un conflit conjugal6.
Quant au droit applicable, il s’agit de toutes les normes permettant au juge de régler la contestation : conventions internationales, Constitution, lois, arrêtés, règlements… La procédure, enfin, est l’ensemble des règles à suivre pour introduire un litige, obtenir une décision et l’exécuter ; elle doit satisfaire à une double exigence d’efficacité et de respect des droits de la défense7. Se dessine ainsi, entre ces deux groupes de normes, au sein du droit objectif8, la distinction entre droit substantiel et droit processuel.
3De façon schématique et traditionnelle, le travail du juge qui applique la loi à la contestation se réduit à un syllogisme dans lequel la majeure énonce la règle de droit applicable (p. ex. : les époux se doivent mutuellement secours), la mineure les circonstances de fait (p. ex. : X, dans le besoin, est le conjoint de Y) et la conclusion, c’est-à-dire le jugement, qui applique le droit au cas d’espèce (p. ex. : Y doit secourir X).
Ainsi, dans la conception théorique classique, le juge est davantage un homme de savoir qu’un homme de pouvoir. Cette conception doit être sinon abandonnée, à tout le moins fortement nuancée, dans la mesure où la fonction de juger implique un investissement personnel du juge ainsi qu’une appréciation de sa part9. Au-delà de l’appréhension mécanique d’une situation, il s’efforce de maîtriser la situation de fait (ce qui ne va pas toujours de soi), de dégager une solution juridiquement correcte (alors que le contenu de la norme n’est pas toujours aisé à déterminer) et, dans la mesure du possible, ajustée aux circonstances humaines, sociales ou économiques, grâce notamment à certains mécanismes modérateurs ou correcteurs. Au nombre de ceux-ci, on citera la prescription, l’erreur invincible, l’abus de droit, le principe de proportionnalité et l’équité10.
Il y a dès lors souvent prise en considération, par le magistrat, qui assume une fonction de régulation sociale, de l’état des mœurs et de l’environnement économique et social dans lequel la décision s’insère11.
Au demeurant, le législateur lui-même, par des normes tantôt insuffisantes, tantôt purement programmatiques12, abandonne de plus en plus la conception du « juge aux mains liées » ou du juge « bouche de la loi »13.
Il en résulte que le juge est bien un homme de pouvoir14 mais qui agit toujours sous la dépendance du droit applicable et dont les décisions sont au demeurant susceptibles de recours15. S’il s’émancipe, voire se détache, de cette dépendance, en refusant d’appliquer la norme ou en créant « sa » norme, il peut y avoir empiétement sur les attributions d’un autre pouvoir et partant modification de l’équilibre des pouvoirs ; en ce cas, on évoque parfois le spectre du « gouvernement des juges »16. Il convient par ailleurs d’éviter les écueils de l’insécurité juridique croissante et de la dérive de l’État de droit vers une société du procès.
La norme de conduite du magistrat qui s’apprête à juger a pu être ainsi décrite : « ce qu’on appelle juger paraît, dans ces conditions, consister dans l’exercice, par une autorité saisie d’un conflit, d’un ensemble de capacités dont aucune ne peut faire défaut : savoir écouter et chercher à comprendre, savoir s’astreindre à s’incliner devant une règle qu’on n’eût pas voulu faire et imaginer toutes les possibilités laissées par les règles à observer, savoir hésiter avant de choisir, savoir résister aux pressions venant de l’opinion publique ou d’ailleurs et savoir enfin se garder de ses propres préventions »17.
4L’acte juridictionnel s’oppose aux actes législatifs et réglementaires et, au sein des actes émanant d’un juge, aux actes d’administration judiciaire, également dénommés mesures d’ordre intérieur18. Il s’agit de l’activité du juge en tant que tel, qui se caractérise essentiellement par une prise de position de celui-ci19.
L’acte juridictionnel se détermine, en principe, par la réunion de trois critères20 :
un critère organique : il s’agit de l’œuvre d’un organe statutairement indépendant investi de la fonction juridictionnelle ;
un critère matériel : il s’agit de statuer sur une question litigieuse entre des adversaires en faisant application de la règle de droit21 ;
un critère formel : il s’agit du respect des formes traduisant les garanties procédurales22.
5Compte tenu des conditions de son élaboration, deux qualités essentielles sont attachées à l’acte juridictionnel : l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire.
6En application de l’article 24 du Code judiciaire, un jugement a autorité de chose jugée dès son prononcé, dans les limites posées par l’article 23 du même Code. « L’essence même de l’autorité de chose jugée est la sécurité devant la justice ; il s’agit de ne pas remettre en question ce qui a été jugé »23. Le jugement est une vérité, soit la conformité de ce que l’on dit avec ce qui est, qui s’impose aux parties24. Elle produit un effet positif pour le gagnant, en ce sens que celui-ci pourra se prévaloir de la décision rendue, et un effet négatif pour le perdant qui doit s’incliner et ne peut plus revenir sur la solution consacrée par l’acte juridictionnel (art. 25, C.J.)25.
7Le jugement devient exécutoire, c’est-à-dire qu’il peut au besoin être exécuté par la force, quand il n’est plus susceptible de recours ordinaire. À ce moment, le jugement passe en force de chose jugée (art. 28, C.J.).
Comme l’y invite l’article 21 du Code judiciaire, il convient d’opérer une distinction entre les voies de recours ordinaires que constituent l’appel et l’opposition26, et les voies de recours extraordinaires que sont le pourvoi en cassation27, la tierce opposition28, la requête civile29 et la prise à partie.
Les voies de recours ordinaires suspendent l’exécution du jugement. Au contraire, les voies de recours extraordinaires n’ont généralement pas d’effet suspensif.
Il existe une exception au principe selon lequel une décision n’est exécutoire que lorsqu’elle est passée en force de chose jugée : il s’agit de l’exécution provisoire qui autorise le recours à la force dès le prononcé de la décision, même si celle-ci est frappée d’un recours ordinaire. L’exécution provisoire est soit prévue par la loi (p. ex. : ordonnance du juge des référés), soit ordonnée par le juge.
8L’opinion publique noue avec le service public de la justice des relations tourmentées30. Sans vouloir épuiser un sujet revenu à de nombreuses reprises à l’avant-plan à l’occasion de procès médiatisés révélant parfois de graves erreurs dans le processus judiciaire, le plus souvent pénal, nous nous bornerons à exprimer les considérations suivantes.
En premier lieu, tout procès fait nécessairement des mécontents. Le jugement qui tranche suivant la loi ne satisfait au mieux qu’une partie et laisse trop souvent subsister la rancœur.
Il n’est d’autre part pas aisé de satisfaire à toutes les exigences d’une justice efficace, suffisamment simple et pas trop onéreuse31.
Il peut de plus y avoir un décalage entre la législation et les mentalités. Ce décalage peut provoquer des actes de désobéissance civile consistant à transgresser de façon non violente et en prenant le risque de la sanction, une loi tenue pour injuste32.
Il convient également de ne pas négliger le fait qu’alors que le justiciable attend des « arrêts de cœur », le juge ne peut apporter que des « arrêts de droit » car, en principe, il est enfermé dans des cadres légaux qui prévalent sur le sentiment de justice33. La considération accrue pour les victimes n’a pas contribué à réduire pareil hiatus34.
On s’accorde par ailleurs à constater que le langage judiciaire reste trop peu clair, parfois incompréhensible35, pour le citoyen, même de louables efforts ont été consentis à cet égard. Or, il est naturel de se méfier de ce que l’on ne comprend pas.
L’opinion publique peut être très versatile ou pétrie de contradictions tout en détenant une puissance considérable36.
Il faut enfin souligner l’antagonisme entre la logique médiatique de l’émotion et de l’instant et la logique judiciaire, reposant sur le respect des règles de fond et de procédure. Beaucoup a été écrit sur le sujet37. « Tantôt l’alliée de la justice, tantôt son adversaire ou sa concurrente dans l’établissement de la vérité, la presse semble être le contre-pouvoir par excellence, tant elle sait que la mission particulière du pouvoir judiciaire a besoin de la confiance du citoyen pour prospérer et d’indépendance par rapport au pouvoir politique »38. Nonobstant ce rôle fondamental, l’omniprésence d’internet, la crise de la presse traditionnelle, en particulier celle ne se complaisant pas dans le sensationnalisme, la multiplication des sources d’information et la disparition des intermédiaires a exacerbé les tensions entre les visions judiciaires et médiatiques, cette dernière privilégiant souvent une « information en temps réel au détriment de l’analyse et parfois de la véracité des faits »39.
Alors que les ondes de choc suscitées par l’affaire Dutroux perdaient en intensité40, et que l’on pouvait percevoir une tendance vers la sortie de la tourmente41, l’affaire FORTIS, accompagnée de la médiatisation exacerbée et des répercussions politiques qu’elle a suscitées, semble avoir provoqué un nouvel effet de ressac de la confiance du citoyen vis-à-vis de la justice.
Ces facteurs expliquent pourquoi la justice peut être la « mal-aimée » (les sondages en attestent régulièrement) à une époque où des efforts considérables sont déployés pour restaurer la crédibilité de l’institution dans l’opinion publique. On citera ainsi la création et le rôle du Conseil supérieur de la Justice, qui seront étudiés dans le présent ouvrage, ainsi que les dialogues Justice42.
Plus fondamentalement, le droit ne peut pas tout. Une évolution des mentalités est perceptible. À la réponse judiciaire résultant d’un combat sans merci43, on préfère une solution peut-être moins satisfaisante mais obtenue dans de meilleures conditions. C’est ce qui explique le succès des modes alternatifs de règlement des conflits44.
Bien souvent, c’est moins le juge qui tranche que le sage qui apaise dont les parties ont besoin car il faut continuer à vivre au-delà du litige et dès lors éviter les ruptures irréversibles (p. ex. : conflit de voisinage ; conflit entre parents relativement aux relations personnelles avec un enfant ; conflit entre copropriétaires d’un immeuble à appartements multiples).
9Le droit judiciaire est l’ensemble des règles relatives à la solution du litige par le juge (droit réalisateur ou sanctionnateur versus droit déterminateur ou substantiel).
Aux termes de l’article 1er du Code judiciaire, « Le présent code régit l’organisation des cours et tribunaux, la compétence et la procédure ». On distingue ainsi :
l’organisation judiciaire, qui répond à la question qui est juge (juridictions et statut des acteurs de la justice) ;
la compétence, qui répond à la question comment le travail est-il réparti entre les juges ;
la procédure, qui répond à la question comment obtenir la décision de justice. Pothier en donna une définition descriptive : « la procédure est la forme dans laquelle on doit intenter les demandes en justice, y défendre, y intervenir, instruire, juger, se pourvoir contre les jugements et les exécuter ».
Il importe d’ajouter à ces « socles » les saisies conservatoires, les voies d’exécution et le règlement collectif de dettes, l’arbitrage et la médiation45. Telles sont les six principales parties du Code judiciaire, précédées d’un exposé de principes généraux.
Les deux premiers livres du présent ouvrage étudient ces principes généraux et l’organisation judiciaire, régis par les deux premières parties du Code judiciaire. La deuxième d’entre elles est malheureusement devenue la moins lisible du Code, sous l’effet des multiples réformes intervenues46.
1. R. PERROT, Institutions judiciaires, 12e éd., Montchrestien, 2006, p. 21, no 22.
2. G. CORNU, Vocabulaire juridique, 8e éd., P.U.F., 2007, v° Justice.
3. H. MOTULSKY, Droit processuel, Montchrestien, 1973, p. 7.
4. R. BADINTER, Guide pratique de la justice, Gallimard, 1989, Préface, p. 9 ; voy. aussi H. MOTULSKY, Droit processuel, op. cit., p. 43 : « la valeur de Justice comme telle doit être assurée par la Justice-organisation » ; sur l’opposition entre jusnaturalisme et positivisme, comp. P. MARTENS, Théories du droit et pensée juridique contemporaine, Coll. de la Faculté de droit de l’Université de Liège, Larcier, 2003, et L. FRANÇOIS, Le cap des tempêtes – Essai de microscopie du droit, Bruylant/L.G.D.J., 2001.
5. « Les affaires récentes, de Fortis à Calice, les erreurs dramatiques de l’affaire d’Outreau en France, ou les lenteurs des instructions, les méprises de la justice, les instructions à charge sans être à décharge, les querelles des juges et les guerres de police, l’irruption du pouvoir politique dans les matières qui vont être jugées, avant même que le judiciaire ne tranche ou que l’évaluation d’un dysfonctionnement soit terminée, privent l’autorité de la justice de la légitimité profonde dont elle a besoin » (C. DOUTRELEPONT, « Les relations entre la justice et la presse », in La justice en vérités, Anthemis, 2011, pp. 31 et s., sp. pp. 41 et 42, no 10).
6. Voy. L. CADIET, J. NORMAND et S. AMRANI-MEKKI, Théorie générale du procès, coll. Thémis, P.U.F., 2010, ainsi que Civ. Bruxelles (réf.), 5 décembre 2003, Rev. trim. dr. fam., 2005, p. 501 : « une décision judiciaire ne permet pas de donner une aide aux époux en instance de divorce dans la gestion du constat d’échec inhérent à toute procédure de séparation. La possibilité de surmonter ce sentiment reste toujours de la responsabilité personnelle des époux et aucune décision, en ces matières, ne pourra jamais donner raison ou tort à l’un ou l’autre. Tout au plus le rôle du magistrat qui tranchera certains points du litige aura une mission de pacification immédiate qui risque d’être éphémère à défaut d’une réflexion profonde des parties notamment sur leur rôle vis-à-vis des enfants persistant malgré la séparation » ; voy. ég. A. JEAMMAUD, « Conflit, différend, litige », Droits, 2002/34, p. 15 ; B. GORCHS, « La conciliation comme “enjeu” dans la transformation du système judiciaire », Droit et Société, 62/2006, pp. 223 et s., sp. pp. 240 à 256.
7. Voy. la quatrième caractéristique du service public de la justice, infra, nos 39 et s. ; « la règle de droit n’a de sens que respectée, le droit subjectif n’a d’existence qu’à travers l’effectivité dont bénéficie son titulaire. Comme nous ne sommes pas dans l’ordre du respect spontané des lois et d’autrui, la perspective d’un procès est au cœur du système. Même si l’on peut considérer le procès lui-même comme un phénomène pathologique, sa virtualité ne l’est pas. Le recours au juge est la condition, le critère même, du juridique… » (A.-M. FRISON-ROCHE, « L’impartialité du juge », Dall., 1999, chron., p. 53) ; voy. aussi P. RICŒUR, « L’acte de juger », in Le juste, t. I, Éd. Esprit, 2001, pp. 185 à 192.
8. Le droit objectif est l’ensemble des règles de conduite socialement édictées et sanctionnées qui s’imposent aux membres de la société (G. CORNU, Vocabulaire juridique, v° Droit). Le droit positif est « le droit objectif appliqué en fait à une époque déterminée dans une société déterminée » (J. HANSENNE, Introduction au droit privé, Story-Scientia, 1990, p. 3, no 1) ; le droit subjectif, quant à lui, est « la prérogative individuelle reconnue et sanctionnée par le droit objectif qui permet à son titulaire (le sujet de droit) de faire, d’exiger ou d’interdire quelque chose dans son propre intérêt ou, parfois, dans l’intérêt d’autrui » (G. CORNU, loc. cit.) ; au sujet de l’équité, voy. infra, no 19.
9. Ainsi, selon Fr. OST, « le raisonnement se fait désormais inductif et pragmatique tandis que le souci de la performance pratique l’emporte sur celui de la cohérence logique » (Fr. OST, Le rôle du juge dans la cité, Bruylant, 2002, p. 17) ; adde I. et C. DELICOSTOPOULOS, « La fonction juridictionnelle revisitée », Droit et procédures (Revue des huissiers de justice), 2003, no 1, pp. 10 à 19.
10. L’abus de droit consiste en l’exercice d’un droit soit avec la seule intention de nuire, soit de façon déraisonnable, c’est-à-dire d’une manière qui dépasse les limites de l’exercice de celui-ci par une personne prudente et diligente (p. ex. : choisir sans intérêt pour soi-même la façon d’exercer un droit de manière dommageable ou la plus dommageable pour autrui ; disproportion entre l’intérêt servi et l’intérêt lésé ; Cass., 9 mars 2009, R.G.D.C., 2010, pp. 130 et s., avec note J.-Fr. GERMAIN ; voy., p. ex., Liège, 26 février 1999, Rev. rég. dr., 2000, p. 176 ; Bruxelles, 29 octobre 2001, Rev. rég. dr., 2002, p. 1315 ; Mons, 13 février 2003, J.T., 2004, p. 764 ; Mons, 10 septembre 2003, R.G.D.C., 2004, p. 464 ; J.P. Tournai, 25 mai 2005, J.T., 2005, p. 524 ; pour un examen d’ensemble en matière contractuelle, voy. S. STIJNS, « Het verbod op misbruik van contractuele rechten : lees de bijsluiter voor gebruik », in Le juge et le contrat – De rol van de rechter in het contract, S. STIJNS et P. WERY (éds), La Charte, 2014, pp. 75 et s. ; sur le principe de proportionnalité, voy. J. van COMPERNOLLE, « Le rôle du juge dans la cité : vers un gouvernement de juges ? », in Le rôle du juge dans la cité, Bruylant, 2002, pp. 168 à 173 : « l’irruption du principe de proportionnalité dans la fonction de juger rompt radicalement avec la représentation syllogistique de l’acte de juger » ; alors que, dans ce schéma, le juge est à la recherche de la volonté du législateur et du sens de la norme qui guidera sa décision, dans le premier schéma, il pèse des intérêts opposés en faisant prévaloir, au nom de la raisonnabilité, celui des intérêts qui lui paraît mériter la préférence ; à nos yeux, les schémas sont plus
11. I. VEROUGSTRAETE, « Juge de cassation », in Imperat Lex – Liber amicorum Pierre Marchal, Larcier, 2003, pp. 4 et 5 ; M. CHARLIER, « La Cour de cassation et le quotidien », in Liber amicorum Commission droit et vie des affaires, Bruylant, 1998, pp. 3 et s. ; à titre d’illustration, voy. le Rapport de la Cour de cassation 1999, p. 178, à propos d’un arrêt relatif à la portée de l’art. 1855 du Code civil prenant en considération l’évolution des besoins et des pratiques du monde des affaires ; sur le rôle de la Cour de cassation, voy. infra, nos 245 et s., ainsi que le Rapport de la Cour de cassation 2003, p. 337, et 2009, p. 17 ; adde M.-A. FRISON-ROCHE, G. CANIVET et C. NOYER, « Faire coïncider économique et judiciaire », Rev. Banque, 2005, no 675, pp. 46 à 49, et P. SARGOS, « Les défis des nouveaux juges », J.C.P., 2009, nos 10-11, pp. 3 à 5.
12. Une décision du Conseil constitutionnel français du 21 avril 2005 (no 2005-512 DC, Recueil, p. 72, J.O.R.F., 24 avril 2005, p. 7113) motive son exigence de lois normatives (c’est-à-dire tendant à énoncer des règles) précises, intelligibles et accessibles par la nécessité de ne pas laisser aux autorités administratives et juridictionnelles la possibilité de se substituer au législateur ; adde l’avis de l’avocat général LEGOUX préc. Cass. fr., 28 janvier 2009 se concluant en ces termes : « Une jurisprudence, parfois, peut être considérée comme une modernisation, une avancée facilitant les relations entre les sujets de droit. Mais je crois qu’il faut savoir revenir à la loi, juger que la faculté de substitution anonyme ajoute à la loi et dire avec Montesquieu que « le juge n’est que la bouche qui prononce les paroles de la loi ».
13. Voy. Ch. LEFEBVRE et J.-Cl. MARTIN, « Le juge est-il toujours la bouche de la loi ? », J.C.P., 2011, no 1431, pp. 2533 à 2539 ; sur l’origine de cette formule, qui constitue un détournement d’une citation de Montesquieu, voy. G. CANIVET, « Activisme judiciaire et prudence interprétative », in La création du droit par le juge, coll. Archives de philosophie du droit, t. 50, Dalloz, 2007, p. 9, no 4 ; voy. ég. M.-F. RENOUX-ZAGAME, « Ordre judiciaire et vérité du droit. Le plaidoyer de l’avocat général dans l’affaire La Privardière », Droits, 2001, no 33, p. 70 : « En elle-même, les magistrats ne cessent de le répéter, la loi est morte, elle est muette. En la faisant parler, le juge par conséquent lui donne en même temps être et vie, il l’incarne. C’est pourquoi – Domat le dit, Bossuet le répète, avant que Montesquieu ne vienne renverser cette affirmation classique – le juge est un “instrument animé”, non un simple reflet, mais une “image vivante”, qui donne à voir ce qui sans lui resterait invisible. Si donc la loi doit animer le juge, c’est pour qu’il puisse en retour “animer” la loi, ce que d’Aguesseau exprime en une formule qui a un long passé, et trouvera pour l’avenir d’autres sujets que le Prince et ses juges : lorsqu’il est “esclave de la loi”, le magistrat “peut toujours tout ce qu’il veut, parce qu’il ne veut jamais que ce qu’il doit” (Merc., 133) » ; sur les différentes figures du juge, voy. A.-Fr. DEBRUCHE, « Le juge à travers le temps et l’espace », Rev. dr. intern. comp., 2008, pp. 365 et s.
14. D. SALAS écrit : « l’acte de juger devient un acte de volonté où le juge donne sens à la loi dans le litige. Il doit la réactualiser, la revisiter, en quelque sorte la “transfuser” dans sa conscience jugeante » (D. SALAS, « La loi dévaluée », in Le Monde des débats, 2001, no 27, p. 28) ; voy., du même auteur, « Le juge aujourd’hui », Droits, 2002, no 34, p. 61 ; voy. ég. La création du droit par le juge, coll. Archives de philosophie du droit, t. 50, Dalloz, 2007.
15. Voy. les développements relatifs à la jurisprudence, infra, nos 111 et s. et au rôle créateur de droit de la Cour de cassation, infra, nos 245 et s.
16. P. TRUCHE, Juger, être jugé, Fayard, 2001, pp. 69 et 74 ; voy. cep. D. de BECHILLON, « Le gouvernement des juges : une question à dissoudre », Dall., 2002, pp. 973 et s. ; adde G. BOLARD et S. GUINCHARD, « Office du juge – Le juge dans la cité », J.C.P., 2002, pp. 977 et s., sp. pp. 980 et 981 ; voy. aussi L. CORNELIS, « Een toekomst voor de dictatuur van redelijkheid en billijkheid », T.P.R., 2001, pp. 13 et s. ; L. CADIET, « L’hypothèse de l’américanisation de la justice française. Mythe et réalité », in L’américanisation du droit, coll. Archives de philosophie du droit, t. 45, Dalloz, 2001, pp. 89 à 115 et, du même auteur, qui livre là une présentation somptueuse de la montée en puissance du juge, « Le juge dans la société contemporaine », in Les entretiens de Provence, à l’initiative de Robert BADINTER et Stephen BREYER, Fayard-Publications de la Sorbonne, 2003.
17. L. FRANÇOIS, « Le rôle du juge », Juger, 1991, no 1, p. 8 ; adde J.-Fr. FUNCK, « Juger et être compris : un enjeu démocratique », J.T., 2013, p. 748 : « si la fonction de juger exige la rigueur du raisonnement, elle ne se réduit pas à une opération de la raison. Elle est d’abord et avant tout ancrée dans la vie d’hommes et de femmes : ce qui est demandé au juge, c’est de trancher des conflits entre des personnes ou de sanctionner des comportements. Le raisonnement juridique n’est pas, en lui-même, la finalité du juge. Il n’est qu’un outil qui lui permet de trancher. S’il n’utilise que le raisonnement juridique et le langage codé, le juge reste extérieur au justiciable. Il aura fait un bon travail de juriste. Mais il sera passé à côté de son rôle de juge » ; le même auteur ajoute plus loin et de façon particulièrement opportune à nos yeux, qu’un « jugement n’est (ni) un cours de droit (ni) un roman-fleuve » ; pour une intéressante approche, à partir de textes philosophiques, des qualités attendues d’un juge, voy. A. GARAPON, J. ALLARD, Fr. GROS, Les vertus du juge, Dalloz, 2008 ; voy. enfin le Guide pour les magistrats – Principes, valeurs et qualités, publié à l’instigation du Conseil supérieur de la justice et le Conseil consultatif de la magistrature, accessible sur le site www.csj.be.
18. Il s’agit des actes consistant à organiser le service d’une juridiction ou à régler certaines questions relatives à l’instance (Chr. JAROSSON, « Réflexions sur l’imperium », in Études offertes à Pierre Bellet, Litec, 1991, p. 274).
19. « Figure juridique type et d’ailleurs symbole du droit, le jugement n’a pas fini de nous fasciner. Figure ternaire, il permet de départager deux adversaires grâce à l’intervention d’un tiers impartial et désintéressé, le tout en suivant des formes solennelles. De là son extraordinaire pouvoir symbolique, à quoi s’ajoute son efficacité pratique, due à l’appui des organes publics de contrainte » (Ph. JESTAZ, « Pouvoir juridique et pouvoir moral », R.T.D.Civ., 1990, p. 636).
20. Fr. RIGAUX et J. van COMPERNOLLE, « Faillite d’office, fonction juridictionnelle et responsabilité de l’État du fait des actes du service public de la justice », R.C.J.B., 1991, pp. 424 et s. et réf. cit.
21. R. PERROT, Institutions judiciaires, 12e éd., op. cit., p. 487, no 589 ; comp. L. CADIET et E. JEULAND, Droit judiciaire privé, 4e éd., Litec, 2004, p. 66, noo 93.
22. Voy. A. HENKES, concl. préc. Cass., 11 janvier 2001, Pas., 2001, p. 53 ; Cass., 30 juin 2006, Pas., 2006, p. 1577 avec concl. Ph. de KOSTER ; Ph. de KOSTER, concl. préc. Cass., 22 février 2008, R.D.C., 2008, sp. pp. 357 à 363, nos 18 à 69 et réf. cit., au sujet du pouvoir juridictionnel exercé par le Conseil de la concurrence ; voy. aussi N. BANNEUX, « La Cour d’arbitrage : juge de l’attribution des litiges ? », Rev. Dr. ULg, 2006, pp. 373 à 375, nos 7 à 9, et C.J.C.E. (gde ch.), 19 septembre 2006, aff. C-506/04, Rec., p. I-8613, nos 48 et s.
23. H. MOTULSKY, Droit processuel, op. cit., p. 261.
24. Voy. M.-A. FRISON-ROCHE, « L’erreur du juge », R.T.D.Civ., 2001, pp. 819 à 832 ; Fl. BUSSY, L’erreur judiciaire, Dalloz, 2005, pp. 2552 à 2564 ; J. VERA, « La vérité judiciaire », Rev. Dr. ULg, 2006, pp. 395 et s. ; P. KIRSCH, « Probabilité et certitude dans la preuve en justice », J.T.L., 2009, pp. 37 et s. ; adde P. MARTENS, « Réflexions sur le maniérisme judiciaire », Rev. trim. dr. h., 2002, pp. 342 à 344, qui écrit notamment : « Juger est devenu un montage de processus communicationnels qui suppose le respect des règles de l’équité procédurale et qui s’efforce de maintenir une cohérence normative mais sans jamais prétendre avoir atteint une vérité autre que provisoire ».
25. Pour un exposé synthétique, voy. G. DE LEVAL et Fr. GEORGES, « Traits fondamentaux des effets de la décision de justice civile », in Chronique de droit à l’usage des juges de paix et de police 2010, vol. 13, La Charte, pp. 257 et s., et réf. cit.
26. L’opposition est le recours ordinaire ouvert à la partie qui a été condamnée par défaut ; elle consiste à soumettre la même affaire au même juge ; l’appel est la voie de recours ordinaire consistant à déférer la décision rendue en premier ressort à une juridiction supérieure.
27. Ph. GERARD, H. BOULARBAH et J.-Fr. VAN DROOGHENBROECK, Pourvoi en cassation en matière civile, R.P.D.B., Bruylant, 2012.
28. H. BOULARBAH et Ch. MARQUET, Tierce opposition, R.P.D.B., Bruylant, 2012.
29. J.-Fr. VAN DROOGHENBROECK, Requête civile, R.P.D.B., Bruylant, 2012.
30. « Les juges connaissent depuis longtemps l’importance de cette “voix du peuple”, dans la marche de la justice, et elle est pour eux marquée du sceau de l’ambivalence. Certes “le bruit est un consentement de la cité”, mais “c’est un langage semé sans auteur certain, auquel la malignité a donné les commencements et la crédulité l’accroissement”. De même pour d’Aguesseau, la voix du public est souvent “la langue et l’écho de la vérité”, mais ses jugements sont fréquemment “aveugles et précipités”. Des “bruits sinistres” se répandent et s’amplifient : est-ce la “médisance toujours prête à inventer des nouveaux crimes”, ou bien “la providence toujours attentive à les punir” » (M.-F. RENOUX-ZAGAME, « Ordre judiciaire et vérité du droit : le plaidoyer de l’avocat général d’Aguesseau dans l’affaire La Privardière », Droits, 2001, noo 33, p. 59) ; adde F. TERRÉ, « Sur l’image de la justice », in Mélanges P. Drai, Dalloz, 2000, pp. 121-131 ; G. BOLARD et S. GUINCHARD, « Office du juge – Le juge dans la cité », J.C.P., 2002, pp. 977 et s. ; B. MERCADAL, « La légitimité du juge », R.I.D.C., 2002, pp. 277 et s., et l’éditorial du journal Le Monde du 29 mars 2005, « Défaite de la calomnie », consacré aux excès médiatiques révélés par le traitement de « l’affaire » Baudis ; B. DEJEMEPPE, « Justice et opinion : les enjeux d’une nécessaire cohabitation », Rev. trim. dr. h., 2004, pp. 611 et s.
31. Voy. les développements sur le droit égal à la justice, infra, nos 23 et s.
32. Sur cette notion, voy. R. ENCINAS DE MUNAGORRI, « Sources du droit en droit interne », R.T.D.Civ., 2005, pp. 73 à 78 ; voy. ég. D. SCHNAPPER, « Du bon usage de la transgression », J.C.P., Hors série, 21 juin 2010, p. 1 ; il s’agit là d’un débat aussi vieux que la pensée politique depuis qu’Antigone s’est opposée à son oncle Créon ; voy., p. ex., le procès de Bobigny en 1972 contre la loi réprimant l’avortement qui fut à la base de la loi Veil de dépénalisation ; les actions anti-OGM ; le téléchargement illégal…
33. Voy. infra, nos 19 et 20.
34. Voy. M. PREUMONT, « La victimisation », in La justice en vérités, Anthemis, 2011, pp. 97 et s., qui, constatant un passage d’une « indifférence sans doute regrettable à une compassion inconsidérée », conclut : « comme toujours et partout, il faut trouver le juste équilibre et, dans le domaine qui
35. Voy., p. ex., la proposition de résolution relative à l’utilisation d’un langage juridique plus clair et plus compréhensible, Doc. parl., Ch. repr., 2003-2004, noo 51-1343, l’ouvrage publié par l’Association syndicale des magistrats Dire le droit et être compris, Bruylant, 2003, ainsi que le numéro entièrement consacré par le Journal des tribunaux (J.T., 2013, pp. 733 et s.) aux relations entre la langue et le droit, regroupant les contributions de B. DEJEMEPPE (« Éditorial »), RHADAMANTHE (« Langue du droit et langue courante »), P. VAN OMMESLAGHE (« La langue de la doctrine juridique »), P. MARTENS (« La langue de la loi »), J.-P. BOURS, « Langue et langage de l’avocat »), J.-Fr. FUNCK, « Juger et être compris : un enjeu démocratique »), P. NICAISE et S. ROELAND (« La langue du notaire et l’usage qu’il en fait »), P. BOVE et T. LEFEVRE, (« La langue de la traduction dans le droit des traités internationaux »), E. LEROY, (« “Signifier” par huissier de justice : la voie la plus (in)intelligible ? ») et M. LENOBLE-PINSON (« La langue du droit vue par une linguiste »).
36. Sur la méconnaissance de la présomption d’innocence par une opinion publique sous l’influence de la presse, voy. Cass., 15 décembre 2004, J.T., 2005, p. 5 ; adde C.E.D.H, 29 août 1997, Worm c. Autriche, § 50 ; C.E.D.H., 24 novembre 2005, Tourancheau et July c. France, § 66 ; C.E.D.H., 24 avril 2008, Campos Damasco c. Portugal, §§ 31, 35 et 36, cités par C. DOUTRELEPONT, « Les relations entre la justice et la presse », in La justice en vérités, Anthemis, 2011, pp. 31 et s., sp. 43, noo 11.
37. Voy. ainsi, entre autres, Ch. PANIER (et J.J. JESPERS), Justice, médias, pouvoir : un triangle infernal, Labor, 2003 ; Chr. MATRAY, « Justice et transparence », in La République des Juges, Éd. du Jeune barreau de Liège, 1997, pp. 33 et s. ; B. DEJEMEPPE, « Justice et opinion : les enjeux d’une nécessaire cohabitation », Rev. trim. dr. h., 2004, pp. 611 et s. ; J.-CL. MATGEN, « Cent septante-cinq ans de chronique judiciaire », J.T., 2005, p. 683 ; C. DOUTRELEPONT, « Les relations entre la justice et la presse », in La justice en vérités, Anthemis, 2011, pp. 31 et s.
38. C. DOUTRELEPONT, « Les relations entre la justice et la presse », op. cit., sp. pp. 31 à 32, noo 1.
39. Ibid., p. 35, noo 5.
40. Voy. dans Une radiographie de la justice – Les résultats du premier « baromètre de la justice » en Belgique, Academia Press, 2004, les résultats de l’étude approfondie KUL-ULG sur les « Attitudes du citoyen envers la justice ». 57 % des personnes interrogées ne font pas confiance à la justice, 97 % plébiscitent la médiation, 74 % estiment le langage juridique peu clair, 97 % déplorent les lenteurs, 70 % doutent d’une amélioration et 79 % sont favorables à des peines alternatives (adde L. WYSEUR, J. SCHOFFELEN, G. VERVAEKE, S. PARMENTIER et J. GOETHALS, « Justitie onder de loep. De publieke opinie ten aanzien van justitie », R.W., 2004-2005, pp. 841 à 851) ; voy. encore, plus récemment, Les Belges et la justice en 2007 – Résultats du deuxième baromètre de la Justice, C.S.J., Bruylant, 2007.
41. G. DE LEVAL, « La justice sortie de la tourmente ? », in Liber amicorum Jean Beaufays, Presses ULg, 2005, pp. 34 et s.
42. Fr. ERDMAN et G. DE LEVAL, Les dialogues Justice, Rapport de synthèse réalisé à la demande de Mme la vice-Première ministre et ministre de la Justice, 2004.
43. « Même apaisée, une grave querelle laisse un ressentiment » (LAO-TSEU, cité par P. TRUCHE, Juger, être jugé, op. cit., p. 31).
44. Voy. les développements consacrés aux modes de pacification extrajudiciaires (infra, nos 11 et s.).
45. Adde infra, nos 62 à 65.
46. G. DE LEVAL, « L’organisation judiciaire » in Quinze années d’évolutions marquantes du procès civil dans la législation, la jurisprudence et la doctrine, La Jurisprudence commentée du Code judiciaire, La Charte, 2012, p. 2 ; dans le même ouvrage, M. van Compernolle voit quatre objectifs fondamentaux poursuivis par le législateur dans ces nombreuses réformes : assurer la confiance de la justice, rechercher la qualité et l’accélération de cette dernière, l’humaniser et promouvoir les modes alternatifs de règlements des litiges (J. VAN COMPERNOLLE, « Quinze années d’évolution du procès civil », op. cit., pp. 37 et s., sp. pp. 37 et 38).