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À Doudou, mon Cher et Tendre, seigneur et maître de mes nichons.
À Chichou, déesse intergalactique issue de mes entrailles, qui en a eu l’usufruit deux ans, deux mois et deux semaines.
À toutes celles « qui en ont », des nichons, des biberons, ou les deux.
Il est une guerre ignorée, largement tue par les médias.
Une guerre qui pourtant fait rage. Depuis des décennies.
Une guerre d’autant plus triste qu’elle choisit ses victimes dans une minorité déjà fragilisée.
Une guerre d’autant plus sordide qu’elle est orchestrée par d’anciennes victimes.
La « Milky War » terrorise chaque jour de jeunes primipares et le monde s’en fout !
Si tu es une future maman pas encore maman, tu ne sais rien de tout cela.
Pourtant tu vas savoir.
Tu vas te prendre le truc en plein dans la g… dans le pif, ou, plutôt, en plein dans les nichons.
Surtout si tu as des copines, une famille. Surtout si tu as une belle-mère. Ta belle-mère, d’ailleurs, même si là c’est ta pote, bientôt, tu vas l’abréger « BM » sur les forums.
Parce que, oui, tu vas passer ta vie sur les forums.
Pour parler de tes seins.
Tout le monde va se mettre à en parler de tes roploplos.
On va les analyser sans pudeur, les détailler.
Si tu te prononces pour les allaitantes, tu liras dans les yeux de ton vis-à-vis tantôt l’admiration tantôt le franc dégoût.
Tout qui te croisera aura une opinion sur le sujet.
Et si tu te prononces pour les biberonnantes, c’est aux allaitantes que tu auras affaire.
Avant ta grossesse, tu vivais dans un monde différent, protégé de tout cela.
Durant ta grossesse, tu as remarqué que les choses évoluaient.
Les gens, subitement, se sont mis à tripoter ton bidon. Les règles de bienséance et celles de pudeur évoluent subtilement à mesure que gonfle le ventre – et les seins – des femmes.
Avec la même impudeur, lorsque tu auras mis ton bébé au monde, les gens vont se mettre à parler librement -très librement- de tes seins. Alors même que la plupart des gens les ignorait royalement jusque-là.
« And in that moment, I swear we were infinite. »1
« À ce moment-là, je jure que nous étions l’infini. »
Les monologues du vagin s’ouvrent sur l’observation des différents synonymes de la foufoune. Mon sujet est également éminemment féminin, mais situé un peu plus au nord sur le corps.
Néné. Loche. Sein. Poitrine. Nibard. Calebasse. Melon. Obus. Parechoc. Lolo. Robert. Boobs. Gorge. Tétine. Mamelle. Téton. Doudoune. Flotteur. Roploplo. Nichon.
Tu l’a bien compris, cher lecteur… – euh peut-être devrais-je dire « chère lectrice » ? – tu l’auras compris chère lectrice, chère future maman, chère future guerrière, on va parler roploplos. On va parler de leur fonction première : l’allaitement.
Future maman, tu as entre les mains un livre qui va te parler de l’allaitement sans tabou en toute déculpabilisation. Avec pour prétexte, ces deux camps -les allaitantes et les biberonnantes- souvent ridicules dans leurs extrémismes.
Et, si tu ne le sais pas encore, tu le sauras bientôt, il s’agit d’un terrain miné, dangereux, très. Un terrain où il y a lieu d’être prudent, de tourner sa plume sept fois dans son encrier avant d’écrire. Je vais être la plus prudente possible mais je sais qu’inévitablement je vais distribuer maints bâtons pour me faire battre. Allez hop, on n’attend pas, on y va tout de suite.
Il y a un prérequis à poser, d’emblée. Il ne va pas plaire à tout le monde. Bien qu’il s’agisse d’une donnée scientifique sur laquelle chacun devrait s’accorder. L’allaitement au sein est la méthode naturelle, traditionnelle, première de faire les choses. C’est, historiquement, la règle générale. Anciennement, il n’y avait pas d’alternative au lait de femme. La montée de lait est la suite logique de la grossesse et de l’accouchement. Le lait est prévu pour faire grandir bébé.
Le sein est le plan A, celui qui a été imaginé par la nature. Le biberon est l’alternative.
J’espère que l’on peut s’entendre là-dessus.
Je pense même qu’il est probable qu’instinctivement, beaucoup de nanas sont plutôt favorables à l’allaitement au sein. Mais cet instinct est refoulé à cause d’un certain environnement sociologique : notre société occidentale. Ailleurs, à un autre moment, le problème se pose (très) différemment.
Je ne suis pas médecin. Je ne suis pas conseillère en allaitement. Je n’ai aucun crédit médical. Je suis une maman qui a allaité - oh joies !, oh doutes !, oh douleurs !, oh inquiétudes ! oh fierté ! Je vais juste parler avec mon expérience. Je vais parler de ce que j’ai vécu, de ce que j’ai lu, vu, entendu.
On va donc parler roploplos. Les miens, les tiens, les leurs.
Ne t’inquiète pas, c’est moi qui commence.
Mes seins ont toujours été un truc important, un truc à mettre en valeur. Quelque chose qui compte dans les relations sociales. Avec une grossesse extra-utérine, plusieurs années de PMA (Procréation Médicalement Assistée) et une grossesse, ils ne sont plus vraiment ceux de mon adolescence. Comme une intervenante l’a dit un jour dans l’émission « Les Maternelles » (France 5), ils sont plus « moelleux ». Mais je me les suis réappropriés, j’ai réappris à les aimer, réappris à les mettre en valeur. Réappris à m’en servir pour autre chose que pour nourrir ma Chichou.
J’ai nichonné Chichou, mon unique, pendant vingt-six mois. Enceinte, j’étais déterminée à essayer, à essayer vraiment et beaucoup. Le plan A, c’était l’allaitement mais j’avais un plan B. J’avais des biberons dans le placard. Mon bébé est né (Aïe !) et a grimpé tout seul jusqu’à mon téton. Pour moi, c’était un saut dans l’inconnu, mais Chichou, elle, savait ce qu’elle voulait.
Un saut dans l’inconnu plus vertigineux que grisant. À la maternité, j’ai appris que vouloir n’est pas pouvoir et que personne n’est d’accord sur rien. La gynécologie et la maternité sont des domaines flous et aléatoires. Les scientifiques ont encore du boulot, je pense, ils ne sont pas encore prêts à s’entendre sur un consensus clair.
J’en ai vite pris mon parti : personne ne sait précisément me dire quoi faire ? Pas grave, je fais ce qui me chante. Après tout, j’ai toujours fait comme ça en matière de nichons.
À la maison, ça s’est d’abord plutôt mieux passé. J’ai essayé d’être une autodidacte studieuse et imaginative. Tout a été top pendant deux mois. Et puis Kate s’est mariée.
Ben, Kate ! De Kate et William. Ce jour-là, tout s’est mis à aller de travers. Chichou ne voulait plus de mes seins. J’ai paniqué. J’ai potassé, j’ai appelé et vu la terre entière. J’ai découvert La Leche League (une association internationale de promotion de l’allaitement maternel), l’ostéopathie. J’ai relativisé. On a retrouvé un équilibre.
Après cet épisode, j’ai eu une soif de connaissance inassouvissable. J’ai été me balader pas mal sur internet. Je suis tombée amoureuse de l’allaitement, des vertus du lait maternel (que je vais dès maintenant abréger en « LM »). Je me suis prise pour un super héros, capable de fabriquer un nectar extraordinaire.
Quand on est « Super Nichonnante », pourquoi rendre sa cape au bout de six mois ? Pourquoi s’encombrer d’un sevrage compliqué ? J’ai continué parce que ça me plaisait, que j’étais fière comme un paon et que c’était plus facile. Un an, deux ans. Pourquoi pas ?
J’ai eu droit aux : « Et tu arrêtes quand ? » à partir de 6 mois. Au début, ça met mal à l’aise. Puis, on apprend à s’en foutre. Finalement, toutes les questions que l’on m’a posées ont été plus comiques et naïves qu’agressives.
« Oui, mais pourquoi tu as allaité ? », me demanderas-tu. Oh, en y réfléchissant, même pas parce que c’est le meilleur pour le bébé. Peut-être, un peu, parce que c’était le meilleur pour moi (protection éventuelle contre le cancer du sein et contre le diabète, on en reparlera). Juste parce que je voulais essayer. Parce que je suis curieuse. Parce que c’est un peu devenu un défi. J’aime l’idée du retour au naturel. Je crois aussi que j’aurais été plus adaptée à la génération de ma grand-mère que je ne le suis à la mienne. Et puis, après, parce que c’était plus simple que d’arrêter. Bon, O.K., aussi un peu parce que ça faisait chier.
« Ça, c’est ton expérience », me diras-tu, « mais, globalement, l’allaitement t’en penses quoi ? » Je suis une défenderesse de l’allaitement au sein. Court, long, mixte, comme on veut, comme on peut. Mais pas, certainement pas, de l’extrémisme. Je ne cautionne pas TOUT ce que pensent et disent celles du clan des nichonnantes. Je suis, du fait de mon expérience, plutôt pro-allaitement, mais je suis, et ça c’est certain, anti-extrémisme, anti-débiles. Anti-culpabilisation.
Et, parce que je suis plutôt du côté des allaitantes, j’ai encore plus de mal à croiser ou lire une allaitante qui dit des conneries qu’une biberonnante qui dit des conneries.
J’aime soutenir un allaitement si on me le demande. Conseiller. Aider. Mais je tente de toujours faire de mon mieux pour que ce que je dis ne soit pas interprété comme une attaque.
Oui, on peut être allaitante, allaitante au long court même -bon O.K., au moyen court selon certaines- et ne pas vouloir en faire une doctrine. Et ce, même si je suis passionnée par le sujet, même si ça a changé ma vie comme peu de choses l’ont fait.
En tant que maman, surtout en tant que primipare, tu vas vivre cernée par les avis des autres. On va regarder tes nichons à la loupe. Tes roploplos seront le sujet de conversation de prédilection de ta famille, au boulot, de tes copines… des inconnus dans la rue. Et ce, pendant tout le temps de ton allaitement, si tu allaites. Moins longtemps si tu optes pour le biberon.
Ta mère ex-allaitante critiquera tes biberons. Ta belle-mère, ex-biberonnante, t’en voudra d’avoir seulement pensé laisser tes seins à ton bébé : tu aurais été trop fatiguée, t’aurais pas pu. Pas capable. Il n’y aurait eu que toi pour t’y coller. Tes copines te diront « Allaite ! Mais six mois, tout pile, hein et que toutes les quatre heures, et débarrasse-toi vite de la corvée de nuit. Oui oui, le lait maternel c’est le mieux pour le bébé mais il ne faut pas t’y perdre, tu ne peux pas te réduire à ça. » Tout le monde va y aller de son avis, de son conseil.
Je te donne d’emblée ma permission ; vas-y, réponds : « Nonméhohéhein ! De quoi je me mêle ? » N’ouvre tes oreilles qu’aux véritables amis, tu sais, ceux qui ne comprennent pas forcément mais qui respectent.
Mon but avec ce petit livre c’est de t’aider dans ton cheminement. De t’aider à tenter l’aventure si tu veux allaiter. De te déculpabiliser, te rassurer, si tu ne veux pas ou si tu ne peux pas. De te soutenir. Toutes les jeunes mamans ont besoin d’un petit coup de pouce parfois, de réconfort, de « Aie confiance en toi, tu te débrouilles bien. »
Fais ce que tu veux, toi. Ton corps t’appartient.
Je vais juste risquer un conseil : si ton accouchement s’est bien passé et que tu vas bien, essaye la tétée d’accueil. C’est un bon thermomètre, un bon test.
Et si quelqu’un trouve à redire sur cette tétée d’accueil, chère future maman, dis-lui d’aller se… documenter. Sinon qu’il aille voir un psy pour parler des nichons de sa mère. Ça n’engage à rien et ça apporte beaucoup. C’est un acte tellement évident, simple, sans engagement, pourquoi vouloir s’en libérer absolument ?
Je sais que l’allaitement c’est un choix qui fait peur. Notre société ne nous montre plus comment faire, ça fout un vertige nauséeux. Se dire qu’une vie dépend de nos boobs et de notre savoir-faire avec eux -alors que jusque-là ils servaient plutôt d’ornement- ça met la pétoche. D’un autre côté, avoir envie de se tourner vers le bib, ça fait peur aussi.
Je suis là, je vais essayer de t’aider de mon mieux. Au final quel que soit ton choix, que tu préfères le sein ou le biberon, que tu t’en tiennes à ton idée première ou non, que ce soit évident ou difficile : n’en parle pas trop, surtout sur Internet. Contente-toi de le faire.
Et si tu cherches soutien et aide ? Pose tes questions à celles qui ne disent pas trop de mal des autres. Tu auras de meilleurs conseils auprès des sereines.
Trêve de bons sentiments et de mots châtiés. Chère future maman, chère lectrice, je te souhaite la bienvenue, bienvenue dans l’univers impitoyable et sans pitié des mamans. Car sache-le, dans la « Milky War », quel que soit le camp que tu choisis, tu vas prendre.
Pour te résumer la chose, il existe un conflit. D’un côté, les nichonnantes, de l’autre, les biberonnantes. Et ce conflit, un peu ou beaucoup, mais quasi inévitablement, tu vas le subir.
C’est con parce que, in fine, tout le monde veut la même chose : nourrir son tout-petit pour qu’il devienne grand et fort. Or, dans l’état actuel des choses, tout le monde est méchant et tout le monde est blessé. C’est plein de mauvaise foi et de culpabilité. Le débat, comme toujours quand il est mis en mode « dialogue de sourds », est stérile. Il n’évolue plus.
Le choix du mode d’allaitement du petit homme est un sujet sérieux s’il en est. Mais la guerre qu’il engendre est risible, le débat est bidon. Je fais partie des gens qui pensent : « Sein ou biberon, ça se discute ! » Je fais partie de ceux qui sont assez d’accord avec la phrase, même si elle est simpliste et un peu bancale, « mieux vaut donner un biberon sereinement qu’un sein en tirant la gueule ».
Mais au final, existe-t-il une dichotomie évidente qui oppose la bonne mère allaitante et la mauvaise mère biberonnante ? Mon avis : non… Non, les nichonnantes ne sont pas hippies, écolos, rétrogrades et incestueuses. Non, les biberonnantes ne sont pas fainéantes, dominées par la société de consommation et jemenfoutiste. Moi, je vois juste des mamans qui, toutes, veulent nourrir leur enfant et l’aimer. Chacune à sa façon. Je vois surtout des mamans qui ne devraient pas être résumées à la façon dont elles nourrissent leur bébé. Chaque femme est complexe et unique. O.K., c’est gnangnan, mais c’est vrai.
Dis-toi bien, future maman, que de toute façon, ton choix ne sera pas le bon. Biberonnante, nichonnantes ? Ton interlocuteur trouvera de toute façon à y redire. C’est une guerre de démolition massive qui ne fait pas dans la dentelle. Je reprends l’expression de la blogueuse Kisbuel : Des deux côtés, il y a « de la tarée psychopathe ». Donc, chère lectrice, il va falloir apprendre à te protéger parce que cette guerre se déroule au détriment de la maternité. Au détriment de ta maternité qui devrait être sereine et qui est déjà assez compliquée, chamboulante pour qu’on en rajoute encore.