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Chômette, au boulot !

Alexandra Tressos-Le Dauphin

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À ma famille, qui a toujours cru en moi.

À mon mari qui m’a laissé l’opportunité de vivre mon rêve.

À mes enfants qui me donnent chaque jour la motivation pour avancer.

« Dans un environnement qui ne cesse de s’assombrir, heureux les esprits fêlés car ils laissent passer la lumière… »

ISBN : 978-2-39009-039-7

Toute reproduction ou adaptation d’un extrait quelconque de ce livre par quelque procédé que ce soit, et notamment par photocopie ou microfilm, est interdite sans autorisation écrite de l’éditeur.

CHOMETTE AU BOULOT

AVERTISSEMENT

« Je forme une entreprise qui n’eût jamais d’exemple et dont l’exécution n’aura point d’imitateur. Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature ; et cet homme, ce sera moi. » (Rousseau J.-J., Les Confessions)

En fait, Jean-Jacques, sans vouloir t’offenser… Je ne sais pas comment tourner cela… Le lecteur veut du concret, pas des récits romancés et ponctués de mots que l’on ne trouve que dans les quizz de littérature. C’est là que j’interviens. Je suis ton anti-toi et vais confesser ma vie de demandeuse d’emploi dans sa plus stricte vérité.

Je préviens immédiatement les littéraires avertis qu’ils risquent d’être décontenancés (pour ne pas dire choqués) par ce livre. Heureusement, avec la prose de Jean-Jacques Rousseau confortablement rangée dans leur bibliothèque, ils iront vite laver l’affront d’avoir parcouru les premières lignes des Confessions façon Chômette.

Il n’est pas question de vous promener, chers lecteurs, dans les pages du Petit Larousse, mais plutôt de vous faire sourire de votre situation, surtout si vous êtes confrontés à la phrase psalmodiée par tous les recruteurs : « Mais vous êtes surdiplômé, Monsieur ! »

Ma motivation ? J’espère bien qu’au moins un recruteur tombera sur ce livre et se dira : « Mais pourquoi je ne l’ai pas embauchée, celle-ci ? Mince ! C’est vrai, elle est surdiplômée, elle va causer la faillite de mon entreprise en décampant dès qu’elle aura trouvé un meilleur boulot. » (Et la marmotte, hein ?) Je souhaite secrètement aussi qu’un éditeur ne soit pas horrifié par le fait que j’ose les parenthèses, le texte à rallonge ou le vocabulaire familier et qu’il se dise : « Et si je publiais ce livre ? ». J’en rigole. Pari impossible ?

Mon histoire terminera sûrement sa course dans l’autoédition. Peu importe, tant qu’elle atteint le lecteur final, c’est-à-dire vous, qui avez besoin de vous détendre tout en cherchant du travail. On y va ?

JE ME PRÉSENTE, JE M’APPELLE CHÔMETTE…

FAISONS CONNAISSANCE !

MARDI 14 SEPTEMBRE

Voilà… Je suis devant la feuille blanche, les touches du clavier frémissent… de peur. Il y a de quoi : une demandeuse d’emploi a décidé de rédiger ses histoires de « non-boulot » sans prise de tête. Je ne suis pas experte en littérature, mais je pense qu’en toute logique, je devrais me présenter, histoire de montrer que j’assume tout ce que je vais écrire de A à Z. Je suis maman de deux petits loups et, si je devais me décrire, je dirais que je suis déjantée et que j’aime que cela pétille.

Je suis fan de Simon Baker, alias Patrick Jane de la série de TF1 The Mentalist. C’est important que vous le sachiez, car vous verrez que ce bon vieux Patrick va revenir régulièrement dans mon récit. Son côté nonchalant, associé à ses bouclettes blondes sexy me font chavirer. On nage en plein cliché, je vous l’accorde. Il est un peu le Patrick Bruel de l’intelligence émotionnelle : il enchaîne les coups de poker d’une main de maître et bluffe sans arrêt pour finalement remporter la mise avec des cartes pourries. Sacré Mentalist !

Je suis également fan des séries Ally McBeal et How I met your mother, que vous retrouverez plus tard. Mais revenons-en à ma présentation. Je passe mes journées à chercher du boulot et à attendre désespérément qu’une bonne âme mette en ligne THE annonce, celle qui fera frémir mon cœur, un peu comme un beau garçon, riche, entier et sincère… Vous voyez où je veux en venir…

Je viens de me rendre compte que je ne me suis pas encore présentée, et vous devinez donc déjà mon problème : je m’éparpille. Est-ce pour cela que je ne travaille pas ? À moins que cela ne soit mon côté déjanté que les recruteurs perçoivent, mais là, ils feraient plus fort que Patrick Jane dont je parlais plus haut… Vous le connaissez ? C’est ce blondinet sexy qui comprend immédiatement que vous avez un amant, parce que vous tripotez votre bague à l’envers et que vous touchez votre mèche de cheveux en présence dudit amant. Parce que deviner que sous mes tenues sages et mon air cohérent se cache une Chômette un peu farfelue, cela relève d’une déduction signée The Mentalist, surtout qu’en général, je m’appuie sur mes cours de PNL (1) pour anticiper toute réaction du recruteur, brouillant les pistes.

Pour ceux qui ont noté que je ne me suis toujours pas présentée, bravo, je vois que vous suivez. Rassurez-vous, j’y viens.

Tout cela ne change en rien le problème qui reste le même : pas de boulot pour Delphine. Qu’elle s’appelle Simone ou Pamela, le monde professionnel reste désespérément vide (quoiqu’avec Pamela comme prénom et une perruque blonde, j’aurais peut-être plus de chance ; il faudrait que je pense à partir de l’autre côté de l’Océan).

MERCREDI 15 SEPTEMBRE

Tout d’abord (avant que je n’oublie), je suis Delphine, mais appelez-moi Chômette. J’ai vingt-neuf ans (bientôt trente d’ailleurs), j’exerçais le métier d’assistante commerciale il y a encore quelques mois et je suis tout sauf une desperate housewife2 (pour l’instant, en tout cas).

Vous allez comprendre que je n’ai pas chômé pour rentrer dans le bain de l’emploi et que ce dernier m’a expulsée à coup de vagues dévastatrices, mais je n’ai pas dit mon dernier mot. Expliqué comme cela, je dois vous faire l’effet d’une junkie aux yeux exorbités accro au travail, non ? Sachez alors que certaines personnes adorent faire la cuisine, le ménage, les courses. En ce qui me concerne, je préfère travailler, gérer des dossiers, discuter avec les gens. La businesswoman qui sommeille en moi est pourtant temporairement immobilisée sur le ring par mon alter ego femme au foyer. J’espère que cette victoire par KO ne durera pas trop longtemps et que le titre sera remis en jeu rapidement.

De toute façon, je ne sais pas cuisiner, malgré les livres de recettes que je reçois régulièrement à Noël ou pour mon anniversaire. Ce n’est pas ma tasse de thé car, vous l’aurez compris, je suis une working girl pas encore prête à rentrer dans les rangs des desperate housewives.

Pour parfaire ma présentation, je suis franche, spontanée et organisée (vous ne rêvez pas, je vous vends cela comme je le ferais lors d’un entretien). Mon but principal, à part trouver du boulot, est de vous faire prendre conscience que l’on peut dédramatiser le fait d’être au chômage. Vous verrez, à la toute fin de ce livre (enfin, de cette farce littéraire), vous vous direz : « Mais elle avait raison ! Ce n’est pas grave, je vais continuer à me démener, à écrire des lettres de motivation, tout cela pour que l’on ne me réponde même pas, j’en salive déjà… »

Je ne sais plus pourquoi je vous raconte cela, mais peu importe ; vous avez compris, on ne se décourage pas, on prend mon livre dès 8h30 le matin, en même temps que son café (et on fait attention à ne rien renverser). Requinqués, vous scruterez les offres d’emploi à la recherche de THE annonce, celle dont j’ai dit plus haut qu’elle était impossible à trouver. Mais continuez votre quête du Graal professionnel, la persévérance est la meilleure des qualités dans la recherche d’emploi.

J’essaie de me démener, je ne suis pas Capricorne pour rien : ténacité et obstination, merci mon signe ! (Oui, parce que si j’étais née sous le signe du Cancer, j’aurais été acerbe et protectrice, bonjour le deal pour trouver du boulot…)

JEUDI 16 SEPTEMBRE

Pour compléter ma présentation, je dois vous parler de ma fille. Elle vient de fêter ses quatre ans, et beaucoup de choses me sont revenues en mémoire. Un anniversaire, c’est un moment joyeux pour un enfant. Pourquoi alors ai-je ressenti une telle peine ?

Il y a quatre ans, elle naissait, fragile, un petit corps coincé entre l’ombre et la lumière sans qu’on sache si elle allait survivre. Nous autres mamans de grands prématurés avons une blessure profonde et indélébile, qui se rouvre de temps en temps sans que l’on arrive à comprendre pourquoi. Je ne pense pas que cela s’en ira, cela fait partie d’une histoire, celle d’une grossesse amputée où la joie de tenir mon enfant pour sa première seconde de vie a laissé place à la peur de ne pas sentir ce premier souffle, insufflé bien vite par des machines aux bruits terrifiants. Personne ne peut comprendre cette douleur sourde et puissante qui écrase mon cœur, personne… Il faut l’avoir vécue.

Dans les moments d’angoisse, tout remonte ; un signal strident résonne dans ma tête, chassé dans un premier temps par le rationnel « elle va bien ». Malgré tout, le subconscient sait que cela n’a pas toujours été le cas et a vite fait de faire sonner les alarmes de l’hôpital, celles qui annoncent les catastrophes, les désaturations, les apnées.

Ma fille a quatre ans. Elle reste un peu petite pour son âge, mais a bien rattrapé la courbe de croissance standard et n’a pas de séquelle motrice à ce jour. C’est un vrai miracle quand on pense qu’elle est née si tôt avec un poids dérisoire ; une plume tellement légère que, lorsque les médecins m’avaient annoncé son poids, les larmes étaient montées immédiatement. Je ne pensais même pas que l’on pouvait sauver un bébé hypotrophe à ce point.

Je suis toujours en contact avec le centre hospitalier Pellegrin qui l’a sauvée, les médecins ont fait un travail formidable. Quant aux puéricultrices, je leur suis tellement reconnaissante d’avoir pris soin de ma fille, de l’avoir dorlotée quand les heures de visite étaient dépassées et qu’il fallait partir, rejoindre un appartement vide de cris, de sourires, où le petit couffin attendait sans savoir s’il allait servir.

Je fais un gros bisou à tous les lecteurs qui ont connu cela et espère ne pas faire resurgir des émotions enfouies. Il y a des jours, comme celui-ci, où tout remonte d’un coup sans que l’on sache pourquoi. Ce qu’il faut retenir, c’est que cette douleur m’a bouleversée et a changé mon caractère à jamais… Je voulais partager ce moment d’amertume avec vous, Chômette a aussi parfois le droit de s’effondrer dans son jardin secret.

Cette présentation est maintenant terminée. Vous venez ? On va parler « non-boulot » et Pôle Emploi : tout un programme !


1. La PNL ? Je vous en parle plus tard. Retenez qu’elle vous sera bien utile pour décoder le langage corporel de votre interlocuteur et devancer certaines réactions.

2. Desperate Housewives est une série américaine mettant en scène quatre mères au foyer aux caractères différents : Bree, qui aurait pu gagner l’émission de cuisine Top Chef, Lynette, la femme déterminée gérant sa tribu, Susan, la sensible-romantique, et Gabrielle la princesse sexy.

LÂCHÉE DANS LA CAGE AUX FAUVES

LE CONSTAT : DIFFICILE DE TROUVER UN TRAVAIL…

VENDREDI 17 SEPTEMBRE

Voulez-vous savoir ce que je me suis entendu dire après quatre ans passés à la faculté et une année de plus à niveau bac+3 en alternance ?

– On ne vous prend pas, vous étiez pourtant la meilleure dans les entretiens.

– Si j’étais la meilleure, pourquoi ne pas m’embaucher ?

– Vous êtes surdiplômée, donc instable ; vous ne resterez pas à ce poste sans envergure. Je vais prendre un bac+2 qui, lui, sans doute, va mieux s’investir…

Alors, attendez que je récapitule : parce que j’ai des diplômes de niveau supérieur, je vais me la couler douce dans cette entreprise jusqu’à épuisement. Est-ce que ce manque d’investissement supposé de la part du recruteur se traduit dans sa tête par l’image d’une Chômette traînant à longueur de journée sur Facebook ? Parce que, figurez-vous, chers responsables des ressources humaines, qu’à bac+2, la procrastination sur ce réseau social est la même qu’à niveau bac+4. Eh oui.

SAMEDI 18 SEPTEMBRE : PAS DE RÉPIT POUR LES BRAVES

Je fais ma maligne un samedi, mais je n’ai pas d’inspiration. Cappuccino. De suite. Je reviens.

LUNDI 20 SEPTEMBRE

Le cappuccino ne m’a pas aidée, on m’aurait menti ? Je ne me suis pas endormie certes, mais je pensais que les idées allaient fuser alors qu’elles sont restées dans les starting-blocks, prêtes à partir au coup de feu, qui n’a pas retenti.

Je n’ai toujours pas d’emploi et j’ai de quoi vous raconter plein de choses. Vous allez voir, il y a de quoi rire. Enfin, rire jaune.

Je commence par l’épisode « vendeuse en poissonnerie », l’anecdote du jour signée Pôle Emploi. Attention, je n’ai rien contre ce travail, à part l’odeur qu’il faut sans doute supporter au fil des jours. Quoiqu’à la longue, on doit être anesthésié, non ? Il faudrait que quelqu’un de ce corps de métier me renseigne à ce sujet. Je cherche toujours le rapport entre ce qu’on m’a proposé comme boulot et ce pour quoi je suis formée. Assistante commerciale dans le tertiaire devient vendeuse en poissonnerie avec l’ami Pôle Emploi. Apparemment, tout est clair pour mon conseiller. Visiblement, nous n’avons pas la même conception de la logique professionnelle :

– Alors, est-ce que vous avez vu une annonce potentiellement intéressante me concernant ?

– Oui, tout à fait ! Cette grande surface cherche un vendeur en poissonnerie, je vous imprime la feuille.

J’hésite entre exploser de rire ou garder un air sérieux de rigueur. J’opte pour le sérieux sur le coup et pique une crise de rire à peine les portes de mon centre d’emploi dépassées :

– Imprimez toujours, je vais regarder cela.

– Ils recherchent quelqu’un ayant le contact commercial, habitant Gradignan et ayant déjà travaillé dans un supermarché.

Cela m’a laissée sans voix, il vaut mieux que je me taise, le fou rire me guette. J’ai pensé (mais pas dit) : « Cela tombe bien ! J’ai un bac+3 en commerce (mention poissons et crustacés, cela va de soi), j’habite Talence et renseigne les professionnels de l’immobilier sur les capacités phénoménales d’un logiciel de défiscalisation immobilière, un bijou capable de calculer en temps réel où il faut investir pour payer le moins d’impôt possible. On est donc en plein dans le sujet, non ? » Mon conseiller ne m’a plus jamais parlé de cette offre.

Remarquez, je ne suis pas la seule. En discutant avec d’autres chômeurs dans la salle d’attente de mon centre Pôle Emploi, j’ai connu un bon fou rire avec Sandrine, qui a déniché un 10/10 sur l’échelle du poste inadéquat. Elle est styliste, a la trentaine et adore ce qu’elle fait. Elle me raconte sa dernière entrevue avec M. Pôle Emploi :

– Vous savez, nous avons des offres d’emploi immédiates pour le métier de chauffeur routier.

– Euh… Je n’ai pas le permis poids lourd, je suis styliste.

– Vous êtes jeune, vous aimez sortir… Pourquoi ne pas exercer un métier de la nuit au sens large ?

Sandrine commence à se demander si son conseiller n’est pas en train de lui suggérer de se placer aux arrêts de bus à une heure du matin dans une tenue affriolante (qu’elle aurait confectionnée ?)

– Je suis styliste. Je préfère chercher dans ma branche. Pour les métiers de la nuit, sans façon, et encore moins au sens large.

– Vous savez, si vous voulez trouver vite du travail, il faudra faire des concessions. (Une mini-jupe pour aller bosser ?)

À côté de l’histoire de Sandrine, mon épisode « vendeuse en poissonnerie » paraît bien fade (malgré l’odeur).

MARDI 21 SEPTEMBRE : LES RAISONS DE MON « NON-BOULOT »

Flashback : octobre 2008. La société qui m’emploie subit la crise de l’immobilier ; elle doit, le cœur brisé bien sûr, se séparer de certains de ses éléments. Manque de chance, j’en fais partie. Si mon ex-patron me lit, qu’il ne tremble pas, je ne lui en ai jamais voulu. J’ai même bossé, enceinte, pendant les trois mois qu’a duré mon préavis, c’est dire si je suis consciencieuse (des témoins pourront confirmer).

Affectée à l’organisation de formations sur le logiciel cité plus haut (ce qui inclut des heures passées au téléphone à aider des professionnels qui savent gérer une équipe, mais pas une demande de prise en charge auprès d’un organisme), mes missions quotidiennes consistaient à faire en sorte que le formateur assure sa journée de stage dans des conditions propices. En gros, cela sous-entend de se perdre en paperasse administrative, devis et autres joyeusetés, de réserver les lieux des formations et de monter des dossiers de financement. Cela implique un aspect commercial pur et dur, puisqu’il faut trouver des gens intéressés par ce type de prestations et passer du temps à prospecter.

Si les ventes du logiciel chutent, que se passe-t-il pour celles de la formation rattachées au logiciel ? Oui, elles dégringolent aussi. Le logiciel étant le noyau principal de l’entreprise, son fonds de commerce, et les stages une activité annexe (lucrative jusqu’alors), qui des deux doit sauter ? Vous connaissez la réponse, évidemment, elle est sous votre nez, en train de vous raconter tout ceci. C’est Chômette. J’en rigole, mais croyez-moi, cela ne m’a pas amusée sur le coup.

MERCREDI 22 SEPTEMBRE : LÀ OÙ JE PASSE DE VENDEUSE EN POISSONNERIE À SURDIPLÔMÉE

Levée tôt et déjà sur les jobboards, tous ces sites qui répertorient et classifient les offres d’emploi, comme Monster et Sud-Ouest Job ; une vraie mine d’or. Allez les visiter et profitez-en pour y déposer votre CV, en espérant toujours THE annonce. Vous savez celle qui, comme un beau garçon pas trop fauché, à moitié intègre et pas trop radin (au fur et à mesure, mes critères en matière d’annonce sont revus à la baisse), fera chavirer votre cœur jusqu’à ce que vous pensiez pouvoir travailler dans cette entreprise.

Tout à coup, le silence est brisé par un appel. Je tiens mon rendez-vous, une convocation chez une société spécialisée dans la vente de vêtements partout dans le monde. Une opportunité géniale qui me permettrait de renouer avec les langues et de mettre en avant mon côté commercial, mes compétences relationnelles et mon sourire. En gros, un boulot fait pour moi et mon anglais courant.

Ne rigolez pas, c’est capital d’avoir un joli sourire, c’est très vendeur ; cela me fait penser à un épisode d’Ally McBeal3 dans lequel un vieux juge – dérangé ? – demandait à voir les dents des avocats du procès avant chaque séance.

Passée la première épreuve de sélection avec rédaction de lettre et tests de personnalité (mince, je postule à la NASA ?), je suis convoquée le lendemain pour rencontrer le grand patron, redire les mêmes choses et raconter en anglais ce qui m’a plu dans mes expériences professionnelles passées. Rien de compliqué. C’est donc tout sourire (et avec de belles dents qui auraient plu à notre juge cité plus haut) que je rentre chez moi, consciente d’avoir réussi mon entretien et attendant le verdict.

Un coup de fil plus tard, mon humeur passe de bonne à pas terrible, et pour cause : on m’assure que j’ai fait un très bon entretien, que j’ai toutes les compétences mais justement, j’en ai trop. Le couperet tombe : surdiplômée. C’est le drame : un gros plan sur ma tête à ce moment-là, et vous m’auriez vue passer par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Mais croyez-moi, c’est surtout le rouge qui a dominé : quel est l’intérêt de m’avoir reçue en entretien suite à mon envoi de CV si l’entreprise savait déjà que cela n’irait pas ? Il faudrait m’expliquer…

Attention, je ne critique pas cette société dont la responsable est formidable. Non. Je râle contre le système, qui va m’obliger à n’inscrire sur mon CV qu’un niveau bac+2 et un semblant d’expérience en commerce, sous peine de me faire guillotiner à chaque fois que je postulerai à un niveau supérieur à bac+2. Mettez-vous à ma place travaillo-temporelle