Derniers titres parus dans la collection
85 Droit des personnes et des familles
Chronique de jurisprudence 2005-2010
G. Hiernaux, N. Gallus, N. Massager, D. Carré, S. Degrave, S. Pfeiff, 2012
86 Le Code pénal social
Analyse des lois des 2 et 6 juin 2010
M. De Rue, 2012
87La vente immobilière en région flamande
A. Mahieu, 2012
88La loi relative à la continuité des entreprises
M. Grégoire, B. Inghels, 2012
89Le contrat d’entreprise
Chronique de jurisprudence 2001-2011
A. Delvaux, B. de Cocqueau, R. Simon, B. Devos, J. Bockout, 2012
90La vente immobilière
Chronique de jurisprudence 1990-2010
B. Kohl, 2012
91Droit des étrangers
Chronique de jurisprudence 2007-2010
E. Derriks, K. Sbai, M. Van Regemorter, 2013
92La réglementation des sicafi
T. Tilquin, V. Simonart, 2013
93L’intervention publique dans la sphère économique. Fondements, principes et limites
P. de Bandt, M. Vanderhelst, 2013
94La loi sur la continuité des entreprises revisitée par la loi du 27 mai 2013
C. Alter, A. Zenner, 2014
95L’information précontractuelle et la Commission d’arbitrage
P. Demolin, 2014
96Les sociétés immobilières réglementées
V. Simonart, Th. Tilquin, 2014
97Paiement, insolvabilité et réorganisation
S’organiser pour être payé, payer ou se réorganiser
Sous la direction d’A. Zenner, 2015
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© Groupe Larcier s.a., 2015
Éditions Larcier
Espace Jacqmotte
Rue Haute, 139 – LOFT 6 – 1000 Bruxelles
EAN : 978-2-8044-8436-1
Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Nord Compo pour le Groupe Larcier. Nous vous remercions de respecter la propriété littéraire et artistique. Le « photoco-pillage » menace l’avenir du livre.
Depuis 1881, le Journal des tribunaux suit, à un rythme depuis longtemps hebdomadaire, l’actualité du droit, de la jurisprudence et de la vie judiciaire au sens large. Sa vocation généraliste l’amène à aborder les matières les plus diverses, de façon approfondie. Mais un nombre forcément limité de pages est consacré aux articles de fond et aux « Vie du droit ».
Or, ce droit évolue et ne cesse de croître en technicité et complexité, et donc aussi en volume, hélas. C’est ainsi qu’ont été créés en 1992 les Dossiers du J.T., qui sont consacrés à des monographies et à des chroniques de jurisprudence impossibles à publier dans les colonnes du Journal en raison de leur longueur. Elles ont été choisies par le comité de rédaction du J.T. comme un complément naturel et nécessaire des articles de doctrine que nous publions chaque semaine.
Georges-Albert DAL,
rédacteur en chef du
« Journal des tribunaux »
LISTE DES ABRÉVIATIONS
INTRODUCTION
CHAPITRE 1. – MALAISE AU SOMMET DE LA HIÉRARCHIE DES NORMES
CHAPITRE 2. – LA COUR CONSTITUTIONNELLE ET LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES : DES RÉFORMES INACHEVÉES
CHAPITRE 3. – LE « RENOUVEAU POLITIQUE » : DES PETITS PAS POUR RENFORCER LA DÉONTOLOGIE POLITIQUE, LES DÉMOCRATIES REPRÉSENTATIVE ET PARTICIPATIVE
CHAPITRE 4. – LA RÉFORME DU SÉNAT : ENTRE RATIONALITÉS ET INCOHÉRENCES
CHAPITRE 5. – LES DÉFÉDÉRALISATIONS À L’ÉPREUVE DE L’HOMOGÉNÉITÉ ET DE L’EXCLUSIVITÉ DES COMPÉTENCES
CHAPITRE 6. – TROIS COMMUNAUTÉS-TROIS RÉGIONS : LE NŒUD GORDIEN OU LA RÉSISTANCE D’UNE DISTINCTION LARGEMENT DÉPASSÉE
CHAPITRE 7. – LES PARIS BRUXELLOIS EN DEMI-TEINTE
CHAPITRE 8. – LES PROVINCES : BEAUCOUP D’INCOHÉRENCE POUR PEU D’AUTONOMIE
CHAPITRE 9. – LES RELATIONS INTERNATIONALES DE L’ÉTAT BELGE : ENTRE STATU QUO ET FAUSSE SIMPLIFICATION
CHAPITRE 10. – LE FINANCEMENT DES COLLECTIVITÉS FÉDÉRÉES : L’ART DE NE LÉSER PERSONNE ?
CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE
INDEX ALPHABÉTIQUE
Adm. publ. | Administration publique |
al. | alinéa |
art. | article |
ass. gén. | assemblée générale |
C. const. | Cour constitutionnelle |
C.D.P.K. | Chroniques de Droit Public/Publiekrechtelijke Kronieken |
C.E. | Conseil d’État |
Cass. | Cour de cassation de Belgique |
CEDH | Convention européenne des droits de l’homme |
cf. | confer |
Civ. | Tribunal de première instance |
C.J.U.E. | Cour de justice de l’Union européenne |
COCOF | Commission communautaire française |
COCOM | Commission communautaire commune |
Cour eur. D.H | Cour européenne des droits de l’homme |
Doc. parl. | Documents parlementaires |
e.a. | et autres |
et s. | et suivants |
ibid. | ibidem |
J.L.M.B. | Jurisprudence de Liège, Mons et Bruxelles |
J.O.U.E. | Journal officiel de l’Union européenne |
J.T. | Journal des tribunaux |
LCEE | Loi sur le Conseil d’État, coordonées le 12 janvier 1973 |
LRICG | Loi du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles pour la Communauté germanophone |
LSCC | Loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle |
LSF | Loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement de communautés et des régions |
LSIB | Loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises |
LSRI | Loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles |
M.B. | Moniteur belge |
not. | notamment |
op. cit. | opere citato |
Pas. | Pasicrisie |
R.A.E. | Revue des affaires européennes |
R.B.D.C. | Revue belge de droit constitutionnel |
R.C.J.B. | Revue critique de jurisprudence belge |
R.W. | Rechtskundig Weekblad |
réf. | références |
sess. | session |
T.B.P. | Tijdschrift voor Bestuurswetenschappen en Publiekrecht |
T.M.R. | Tijdschrift voor Milieurecht |
T.V.W. | Tijdschrift voor Wetgeving |
VGC | Vlaamse Gemeenschapscommissie |
1. La sixième réforme de l’État ne se laisse pas aisément décrire. Elle concerne l’organisation ou les compétences d’institutions aussi diverses que le Sénat1, la Cour constitutionnelle2, le Conseil d’État3, la Cour des comptes4, les arrondissements électoraux5, les arrondissements judiciaires6, le comité de concertation7, les commissions communautaires bruxelloises8, les provinces9 ou, encore, les communes de Bruxelles10 et de sa périphérie11. Les transferts de compétences de l’État fédéral vers les communautés et les régions qui forment une des pièces de résistance du grand œuvre touchent aussi les domaines les plus variés. En 1970, on avait surtout créé les communautés en les investissant de l’autonomie culturelle. En 1980, les régions wallonne et flamande reçoivent principalement les compétences requises par la gestion de leur cadre de vie. En 1988, c’est pratiquement de tout l’enseignement que les communautés héritent, tandis que la Région de Bruxelles-Capitale sort des limbes. En 1993, le fédéralisme fait son entrée officielle dans le langage constitutionnel et les entités fédérées, dotées de parlements élus directement, montent en puissance, notamment dans le domaine des relations internationales. Et, en 2001, les régions reçoivent la maîtrise de la législation organique des provinces et des communes. Impossible de brosser à d’aussi grands traits – évidemment plus que schématiques – la sixième réforme de 2012-2014. De toute évidence, à part les secteurs déjà très divers – des implantations commerciales à la sécurité routière12 – qui avaient été identifiés dans ce que l’on a appelé « le premier paquet de réformes institutionnelles », largement acquis sous le gouvernement Verhofstadt III13, on a surtout voulu « faire du chiffre » pour démontrer l’effectivité du « basculement budgétaire » de l’État fédéral vers les collectivités fédérées. On a pioché ainsi dans les domaines les plus variés depuis les prestations familiales14 qui représentent un tiers des masses budgétaires transférées15 jusqu’aux maisons de justice16, en passant par la santé17, l’aide aux personnes âgées18, l’emploi19 et les pôles d’attraction interuniversitaires20. Dans le sens inverse, les responsabilités de l’État en cas de manquement aux obligations internationales des entités fédérées ont été renforcées21.
La sixième réforme redessine aussi l’espace francophone formé par la Communauté française, la Région wallonne et la Commission communautaire française (Cocof)22. Elle aborde par ailleurs le statut des mandataires et des partis politiques23, les dotations royales24, le droit électoral25 et les consultations populaires au niveau régional26. Elle introduit même un nouveau mode de légiférer : les décrets conjoints27. Enfin, et ce n’est pas le moins, elle revoit des règles essentielles sur le financement des collectivités fédérées28.
Faut-il ajouter, comme dans le poème de Prévert, « et un autre raton laveur » ? Comment mettre de l’ordre dans une liste aussi hétéroclite ? L’ambition de ce dossier n’est pas de fournir une description exhaustive de toutes ses facettes. Il a l’avantage d’avoir été conçu après la publication des premières analyses doctrinales29. Nous pourrons donc y renvoyer systématiquement pour les développements que nous avons choisi de ne pas livrer dans ce travail parce que cette sélection est le prix à payer pour apporter ici une analyse précise et rigoureuse, mais aussi la plus cohérente, synthétique et critique possible en près de deux cents pages.
2. C’est tout le dessein institutionnel de l’État belge qu’il faut revisiter si l’on veut faire un bilan raisonné de la sixième réforme de l’État. L’on gagne donc à dérouler un plan logique qui croise en partie celui de la Constitution elle-même. L’État belge est d’abord un État de droit. Aussi il est doté précisément d’une Constitution qui comprend une procédure de révision et, au moins implicitement, un mode d’emploi sur lesquels il faut revenir, tant il est vrai que ceux qui ont été suivis à l’occasion de la sixième réforme sont peu ordinaires et de nature à faire réfléchir à des améliorations structurelles (chap. 1).
Un État de droit exige un appareil juridictionnel sans faille. Les nouvelles compétences qui ont été accordées à la Cour constitutionnelle méritent un examen critique à cet égard (chap. 2)30.
L’État belge est une démocratie attachée depuis ses origines au régime représentatif. La sixième réforme s’est préoccupée d’apporter quelques améliorations au statut des mandataires et des partis politiques et à divers dispositifs de la démocratie représentative, notamment en matière électorale. Elle a voulu aussi démocratiser le fédéralisme coopératif en créant une nouvelle figure à côté des accords de coopération : les décrets conjoints. Elle a encore élargi le domaine de la démocratie participative en permettant non plus seulement aux provinces et aux communes, mais aussi aux régions, d’organiser des consultations populaires (chap. 3).
L’article 36 de la Constitution s’obstine encore à dire que « le pouvoir législatif fédéral s’exerce collectivement par le Roi, la Chambre des représentants et le Sénat ». Cette disposition était déjà une disposition en trompe-l’œil avant la dernière réforme. Elle est à présent purement et simplement mensongère, car le régime monocaméral est dorénavant de droit commun. Le Sénat n’a sans doute pas disparu, mais ses compétences ont été paradoxalement réduites à la portion congrue, alors que, par sa composition, il est enfin devenu ce qu’il devait être en toute logique fédérale, à savoir une assemblée essentiellement dédiée à la représentation des entités fédérées (chap. 4).
Les nouveaux transferts de compétences au profit des communautés ou des régions seront présentés en synthèse. Ils susciteront surtout deux questions essentielles qui justifieront des développements approfondis. Ont-ils répondu à l’attente si souvent exprimée au nord du pays31 de créer des blocs de compétences plus homogènes ? Et que devient aujourd’hui le principe classique de l’exclusivité des compétences (chap. 5) ?
« La Belgique est un État fédéral qui se compose des communautés et des régions ». Cet article qui ouvre encore le texte constitutionnel mérite aussi, et plus que jamais après la sixième réforme, un examen à frais nouveaux. C’est que la séparation institutionnelle entre les matières régionales et les matières communautaires, qui donne à notre fédéralisme tout à la fois sa principale originalité et les traits les plus saillants de sa complexité, est de plus en plus dépassée par le droit et par les faits. C’est en abordant de front cette question un peu difficile que l’on se mettra à la recherche des moyens de transcender la traditionnelle opposition entre les « communautaristes » et les « régionalistes » pour le plus grand bien d’un État qui ne pourra pas rester éternellement au milieu de ce gué de plus en plus inconfortable. C’est déjà une bonne part du statut de Bruxelles que l’on réexaminera à cette occasion, tant il est vrai que c’est la Région Bruxelles-Capitale, lieu de rencontre des deux principales communautés du pays, qui est à la source de son extrême complication institutionnelle (chap. 6).
Les autres composantes bruxelloises de la sixième réforme seront présentées ensuite. Ce sera le moment de revenir brièvement sur les pommes de discorde les plus homériques du « contentieux communautaire » de la décennie précédente, à commencer par celle qui a déclenché non moins de quatre procédures en conflits d’intérêts32 et coûté la vie du gouvernement Leterme II33 : la scission de la circonscription électorale de Bruxelles-Hal-Vilvorde (BHV) et la réforme de l’arrondissement judiciaire de Bruxelles ; mais aussi la nomination des bourgmestres des communes périphériques, l’enfermement de la Région bruxelloise dans le carcan des dix-neuf communes, les limites de l’autonomie constitutive bruxelloise et la complication de l’écheveau institutionnel bruxellois34 (chap. 7).
Au sein des régions, des collectivités politiques décentralisées pourvoient aux intérêts locaux : c’était jusqu’aujourd’hui les provinces et les communes. Que deviendront les provinces ? La Constitution révisée leur réserve un sort étrange qui permet aux régions wallonne et flamande d’en faire à peu près n’importe quoi (chap. 8).
Les relations internationales et les finances forment deux des derniers titres de la Constitution. Notre dossier aussi. Les relations internationales des communautés et des régions nous donneront l’occasion de revenir sur la réforme du Sénat, notamment pour souligner les lacunes que celle-ci a induites en ce qui concerne le contrôle démocratique des exécutifs dans ce domaine. La réforme du pouvoir de substitution de l’État fédéral en cas de manquement des entités fédérées sera également étudiée (chap. 9).
Étymologiquement, les finances viennent à la fin. Mais, faut-il le dire, les règles qui s’y appliquent ont des incidences majeures pour l’exercice des compétences tant de l’État que de ses composantes et pour les équilibres politiques internes à l’ensemble de la fédération. La réforme du financement des communautés et des régions et les nouvelles modalités du pouvoir fiscal de ces dernières seront examinées tour à tour. Si l’on se souvient que le sous-financement structurel propre à la Région de Bruxelles-Capitale était à l’origine d’une des rares demandes francophones qui ont permis la conclusion de l’accord politique à l’origine de la sixième réforme35, on admettra qu’il convient de lui accorder une attention plus particulière. On le fera d’autant plus qu’il n’est pas exclu que l’histoire se répète dans quelques années… (chap. 10).
3. Nul n’a pu l’oublier, toutes ces nouvelles règles que l’on aura ainsi ramassées en dix chapitres ont été âprement négociées à la suite d’une crise exceptionnellement longue : un an et demi, cinq cent quarante jours plus précisément, depuis les élections fédérales du 13 juin 2010 jusqu’à la nomination des membres du gouvernement Di Rupo le 5 décembre 201136. Comme les précédentes37, mais avec une acuité sans égale, cette crise a fait apparaître la fragilité de l’État belge. Un État fédéral ne vit pas par la seule force juridique de sa Constitution. Il ne peut pas se passer d’un minimum de volonté de vivre ensemble apte à transcender, au moins dans une certaine mesure, les clivages politiques, économiques, sociaux et culturels qui peuvent séparer les composantes qu’il fédère38. On le savait depuis les résolutions du Parlement flamand du 3 mars 199939 : il serait très difficile de former un gouvernement40, compte tenu de l’ampleur des transferts de compétences et des réformes financières réclamés par les principales forces politiques du nord du pays41, elles-mêmes poussées dans le dos par un parti ouvertement séparatiste42, de la tentation sudiste de n’y opposer qu’un front du refus43 et de l’évolution de plus en plus divergente des résultats électoraux de part et d’autre de la frontière linguistique44.
Tout a déjà été écrit pour souligner les mérites des partis politiques45 qui ont réussi, malgré ce contexte, à négocier et conclure l’accord politique du 11 octobre 201146, dit « papillon », du nom de la parure vestimentaire habituellement arborée par le formateur du gouvernement, Elio Di Rupo. Plus discrètement, ces mêmes partis ont aussi réussi à assurer la traduction juridique de cet accord, ce qui n’allait pas de soi dans la mesure où il ne s’agissait que d’un accord-cadre dont les « détails » restaient à écrire. Il faut bien reconnaître que cette performance n’a été réalisée qu’au prix d’une procédure caractérisée par un degré particulièrement élevé de technocratie et de particratie47. Ce travail de longue haleine – il a duré non moins de trois ans – a, en effet, été accompli sous la maîtrise exclusive d’un organe composé d’un représentant par parti coauteur de l’accord48. Présidé par le Premier ministre et les deux secrétaires d’État en charge des Réformes institutionnelles, ce « Comité de mise en œuvre des réformes institutionnelles », dénommé COMORI dans le jargon politique, a gardé en permanence la haute main sur toutes les propositions de révision de la Constitution, de lois spéciales et de lois ordinaires qui ont traduit l’accord politique en règles de droit49. Formellement, il s’est agi de propositions, et non de projets gouvernementaux, parce qu’il fallait associer à leur présentation aux Chambres les élus des partis Écolo et Groen qui étaient restés en dehors de la majorité gouvernementale. Mais les véritables auteurs de ces propositions sont les groupes techniques du COMORI50. Les députés et les sénateurs de la majorité dite « institutionnelle » ont été priés d’adopter ces propositions sans le moindre amendement qui n’aurait pas eu l’aval dudit comité. En réalité, les seuls amendements apportés aux propositions initiales proviennent de réponses aux avis de la section de législation du Conseil d’État, réponses soigneusement négociées par les juristes techniciens du COMORI51. Il y aurait sans doute quelque ingénuité à s’étonner de pareille procédure. Ses traits foncièrement particratiques et technocratiques sont apparus dans toutes les grandes réformes institutionnelles antérieures52 et la gravité sans précédent de la crise de 2010-2011 ne pouvait que renforcer cette tradition. Plus que jamais, les élites politiques se sont souciées de verrouiller la procédure parlementaire pour la mettre à l’abri de toute proposition d’amendement potentiellement explosif.
4. Quoi qu’il en soit, cette sixième réforme de l’État a été systématiquement présentée par ses auteurs comme ayant produit un « déplacement du centre de gravité » de la fédération belge au profit des communautés et des régions53. Nous verrons ce qu’il en est. Elle a aussi suscité de nombreuses réflexions sur l’avenir de l’État belge. Il est vrai que tout a été envisagé au cours des longues crises, non seulement celle de 2010-2011, mais aussi celle de 200754. Tout, y compris la scission de l’État55. Loin de nous l’idée naïve qui consisterait à croire que le cap des tempêtes est derrière nous et que la voie d’un « fonctionnement normal »56 d’un État fédéral comme les autres est en vue. Le programme institutionnel du premier parti de la Chambre57 est assez connu pour que l’on n’y insiste pas et, en toute hypothèse, l’État belge ne sera jamais un État fédéral comme les autres en raison de sa bipolarité foncière58 que l’on peut sans doute tempérer, mais non nier.
Le fil conducteur qui sous-tendra les évaluations critiques auxquelles nous allons soumettre ces nouvelles règles de notre droit constitutionnel ne reposera pas sur ces conjectures. Il consistera plus simplement à se demander dans quelle mesure les principaux dilemmes qui fragilisent ce droit depuis longtemps ont été résolus. Il ne faut pas être prophète pour deviner qu’une accumulation de nœuds gordiens non tranchés équivaudrait à la promesse de nouvelles revendications et d’une septième réforme, quelles que soient la fatigue ou les craintes des acteurs politiques responsables, et cela quand bien même le parti séparatiste qui est aujourd’hui associé au gouvernement Michel se convertirait dans les prochaines années aux vertus de la modération et de la compréhension mutuelle requises pour vivre ensemble dans un État.
Il nous a semblé au seuil de notre entreprise que nous pourrions tester l’hypothèse suivante : bon nombre des réponses qui ont été apportées à ces dilemmes structurels ont consisté à éviter soigneusement de les trancher. Trois exemples majeurs viennent aussitôt à l’esprit. Sur le plan institutionnel, pourra-t-on se dérober à la nécessité de choisir un moment donné entre une logique principalement communautaire et une logique principalement régionale ? Sur le plan des compétences, entre une logique foncièrement autonomiste et une logique essentiellement coopérative59 ? Ou, encore, entre un système de compétences uniquement exclusives et un système qui reconnaît explicitement une place pour des compétences concurrentes ?
D’autres exemples d’importance variable nourrissent encore l’hypothèse. De très nombreux indices donnaient ainsi à penser qu’il fallait choisir une nouvelle procédure de révision de la Constitution ou, sinon, démontrer que le vieil article 195 est encore bon pour le service, mais alors l’appliquer tant dans son esprit que dans sa lettre ; choisir entre la disparition du Sénat et sa résurrection ; régler la question de la durée des législatures respectivement fédérale et régionale en les calquant l’une sur l’autre ou en les dissociant ; refinancer durablement la Région de Bruxelles-Capitale ou lui conférer un sous-statut dépendant de la générosité de ses voisines ; supprimer ou maintenir les provinces ; remédier aux défauts de la technique des accords de coopération ou les remplacer par une autre source, etc. Or, disons-le d’emblée : aucun de ces choix n’a été fait. La sixième réforme de l’État ou l’art de ne pas choisir ?
On nous rétorquera que nous sommes bien exigeants ; en somme, des théoriciens en chambre qui ne veulent pas comprendre les contraintes de la vie politique où l’on pratique au mieux l’art du possible et, donc, celui du compromis. Que le lecteur se rassure. Nous n’ignorons pas ces contraintes et notre propos n’est nullement de jeter l’opprobre sur la réforme 2012-2014. Les lignes qui suivent ne sous-estiment nullement le sens légendaire du compromis qui justifie la fierté des acteurs politiques qui ont eu le courage de prendre leurs responsabilités. Mais à chacun les siennes. Les constitutionnalistes assument les leurs quand ils livrent un portrait fidèle des fondements, des divisions, des structures et des pouvoirs de l’État tels qu’ils sont aujourd’hui, sans rien cacher de ce qui fait leurs faiblesses.
5. On ne saurait clore cette introduction sans relever qu’un des atouts dont on peut espérer que ce dossier sera crédité tient dans la composition et la méthode de travail de l’équipe du Centre interdisciplinaire de recherches en droit constitutionnel et administratif (C.I.R.C.) de l’Université Saint-Louis60 qui l’a rédigé. Les théoriciens et les praticiens, seniors et juniors, qui la constituent ont eu de nombreux échanges pour ajuster leurs points de vue respectifs et produire une analyse cohérente. Ces échanges ont été d’autant plus nourris et féconds que cette équipe compte dans ses rangs quelques-uns des experts qui ont tenu la plume lors des travaux de mise en forme juridique de l’accord « papillon »61. Ces acteurs de la sixième réforme de l’État ont accepté de prendre le recul nécessaire pour s’exprimer en tant que chercheurs, en dialogue avec les autres membres de l’équipe.
Dans chaque chapitre, nous nous sommes attachés à confronter l’hypothèse initiale qui en forme le fil conducteur aux données du droit positif avec la plus grande objectivité scientifique possible. Tantôt cette hypothèse sera vérifiée et étayée ; tantôt elle sera tempérée, et le lecteur pourra alors juger lui-même s’il n’est pas plus juste de parler de l’art du compromis que de l’art de ne pas choisir ; tantôt encore elle sera contredite par des contre-exemples : oui, on le verra, critiquables ou non, certains choix ont bel et bien été faits. Celui de ne léser personne par les nouvelles règles de financement des collectivités fédérées n’en est pas le moindre. On complétera le tableau ici esquissé et on dressera un bilan dans les conclusions.
1. Voy. infra, nos 68 à 80.
2. Voy. infra, nos 20 à 27.
3. Voy. infra, nos 28 à 32.
4. La réforme de cette institution ne sera pas abordée dans le présent dossier. Voy., à son sujet, J. VANPRAET, « Rekenhof: de herziening van artikel 180 van de Grondwet », in J. VELAERS, J. VANPRAET, Y. PEETERS et W. VANDENBRUWAENE (dir.), De zesde staatshervorming: instellingen, bevoegdheden en middelen, Antwerpen, Intersentia, 2014, pp. 913 à 923.
5. Voy. infra, nos 141 à 147.
6. Voy. infra, nos 148 à 150.
7. Voy. infra, no 58.
8. Voy. infra, nos 133, 136 et 137.
9. Voy. infra, nos 160 à 167.
10. Ce thème ne sera pas étudié dans ce dossier. Voy. B. CADRANEL et Y. MOSSOUX, « L’articulation des compétences régionales et locales dans la Région de Bruxelles-Capitale : l’autonomie locale menacée ou recadrée ? », in J. SAUTOIS et M. UYTTENDAELE (dir.), La sixième réforme de l’État (2012-2013). Tournant historique ou soubresaut ordinaire ?, Limal, Anthemis, 2013, pp. 449 à 486.
11. Voy. infra, nos 151 à 153.
12. Dans les régionalisations déjà politiquement admises à ce moment, on trouve, en effet, entre autres, les implantations commerciales, l’économie sociale, la politique des prix afférente aux compétences régionales et communautaires, le Fonds des calamités agricoles, les baux à loyer, les procédures d’expropriation (sauf celles décidées par l’État fédéral) et une part de la sécurité routière : cf. la proposition de loi spéciale portant des mesures institutionnelles, Doc. parl., Sénat, 2007-2008, nos 4-602/1 et 2, la proposition de loi modifiant la loi du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles pour la Communauté germanophone, Doc. parl., Sénat, 2007-2008, nos 4-603/1 et 2 et la proposition de loi portant des mesures institutionnelles, Doc. parl., Sénat, 2007-2008, nos 4-604/1 et 2. Ces trois propositions ont fait l’objet d’avis sévères du Conseil d’État, qui y a vu des facteurs d’éparpillement des compétences aux antipodes de l’objectif d’homogénéisation et de renforcement de la cohérence annoncé dans les développements (voy. infra, no 82). Elles sont devenues caduques à la suite de la dissolution des Chambres du 7 mai 2010. Mais on en retrouve l’essentiel dans les lois, adoptées entre 2012 et 2014, qui constituent la sixième réforme de l’État.
13. Sur ce premier paquet, voy. S. GOVAERT, « Les discussions communautaires sous les gouvernements Verhofstadt III, Leterme et Van Rompuy », C.H. CRISP, 2009, no 2024-2025, pp. 14 à 16 ; B. DALLE, « Overzicht van de communautaire onderhandelingen sinds 2007. Straatje zonder eind of de weg naar verandering? », T.B.P., 2011, pp. 460 et 461.
14. Le nom générique « prestations familiales » englobe les allocations familiales, les allocations de naissance et les primes d’adoption. Sur cette précision terminologique, voy. proposition de loi spéciale relative à la sixième réforme de l’État, avis du Conseil d’État, Doc. parl., Sénat, 2012-2013, no 5-2232/3, pp. 26 et 27.
15. Voy. infra, nos 92, 99, 136 et 187.
16. Ce thème ne sera pas étudié dans ce dossier. Voy. les références infra, no 91.
17. Voy. infra, nos 89, 98, 105, 106, 112, 113, 116 et 137.
18. Voy. infra, nos 89 et 99.
19. Voy. infra, nos 93, 101, 106, 114, 101 et 191.
20. Voy. infra, no 96.
21. Voy. infra, nos 178 et 179.
22. Voy. infra, nos 133 et 137.
23. Voy. infra, nos 41 à 43.
24. Voy. infra, no 44.
25. Voy. infra, nos 47 à 52.
26. Voy. infra, nos 62 à 66.
27. Nous convenons dans ce dossier que, par l’expression « décrets conjoints », nous visons non seulement les décrets conjoints au sens strict, mais aussi les décrets et ordonnances conjoints et les ordonnances conjointes. Voy. infra, nos 59 à 61.
28. Voy. infra, nos 181 à 220.
29. Voy. la bibliographie à la fin du présent dossier.
30. La vague de la sixième réforme a aussi atteint les juridictions administratives et les juridictions judiciaires. On évoquera très brièvement les premières dans le même chapitre 2 et les secondes dans les chapitres 5 et 7.
31. C’était le thème récurrent, du moins en apparence, des résolutions du Parlement flamand du 3 mars 1999 (voy. G. PAGANO, « Les résolutions du Parlement flamand pour une réforme de l’État », C.H. CRISP, 2000, no 1670-1671) et de tous les documents politiques qui les ont actualisées jusqu’à la veille de la négociation de « l’accord institutionnel pour la sixième réforme de l’État » conclu le 11 octobre 2011. Le principal de ces documents est l’Octopusnota du 1er février 2008 qui sera reprise en annexe de l’accord de gouvernement du Vlaamse Regering de 2009 (cf. Parl. St., Vl. Parl., 2009, no 31, pp. 101 à 114). Cette Octopusnota est une note du ministre-président Kris Peeters, datée du 1er février 2008, qui présentait les principales options du gouvernement flamand pour une réforme de l’État aux délégations des huit partis associés dans un groupe de travail présidé par M. Leterme sous le gouvernement Verhofstadt III. Cf., à ce sujet, S. GOVAERT, « Les discussions communautaires sous les gouvernements Verhofstadt III, Leterme et Van Rompuy », op. cit., p. 12, et B. DALLE, « Overzicht van de communautaire onderhandelingen sinds 2007. Straatje zonder eind of de weg naar verandering? », op. cit., pp. 459 et 460 et 465 et 466. Selon Benjamin Dalle, qui a été chef de cabinet du secrétaire d’État néerlandophone aux Réformes institutionnelles de 2011 à 2014, cette note a été utilisée comme document de base pour les négociations entre le parti socialiste et la N-VA sous la conduite du préformateur Elio Di Rupo : cf. B. DALLE, « De uitvoering van het “Vlinderakkoord” van 11 oktober 2011. Van politiek akkoord tot publicatie in het Belgisch Staatsblad (2011-2014) », in A. ALEN e.a. (dir.), Het federale België na de zesde staatshervorming, Brugge, die Keure, 2014, p. 20. Sur ces négociations dont bon nombre de pistes se retrouvent dans l’accord final du 11 octobre 2011, voy. S. GOVAERT, « Les négociations communautaires et la formation du gouvernement Di Rupo (juin 2010-décembre 2011) », C.H. CRISP, 2012, no 2144-2145, pp. 10 à 18, 83 et 84.
32. Fondées sur l’article 32 de la loi ordinaire de réformes institutionnelles du 9 août 1980, elles ont été déclenchées successivement par le Parlement de la Communauté française, l’assemblée de la Commission communautaire française, le Parlement régional wallon et celui de la Communauté germanophone, pour suspendre l’examen d’une proposition de loi qui scindait la circonscription électorale de Bruxelles-Hal-Vilvorde sans compensation et avait été adoptée par la Commission de l’intérieur de la Chambre des représentants, le 7 novembre 2007, grâce aux votes des seuls membres néerlandophones de cette commission.
33. Après la dernière procédure en conflit d’intérêts qui se termine par un nouvel échec le 18 avril 2010, les libéraux flamands décident de retirer leur confiance au gouvernement Leterme II qui présente sa démission le 26 avril. La Chambre reprend néanmoins l’examen de la proposition de loi litigieuse, ce qui conduit alors le groupe linguistique français à tirer la sonnette d’alarme prévue par l’article 54 de la Constitution pour éviter l’adoption de la proposition en séance plénière et solliciter l’avis motivé du Conseil des ministres. Démissionnaire, celui-ci est bien sûr inapte à rendre cet avis et la procédure est alors à nouveau suspendue. Dès ce moment, il est acquis que la formation d’un nouveau gouvernement après les élections fédérales du 13 juin 2010 sera impossible sans un règlement de ce contentieux politique. Sur ce contexte et ces procédures, voy. S. GOVAERT, « Bruxelles-Hal-Vilvorde : du quasi-accord de 2005 à la procédure en conflit d’intérêts », C.H. CRISP, 2007, no 1974 ; ID., « Les discussions communautaires sous les gouvernements Verhofstadt III, Leterme et Van Rompuy », op. cit., pp. 26 à 37 ; ID., « Les discussions communautaires sous le gouvernement Leterme II (2009-2010) », C.H. CRISP, 2012, no 2126, pp. 9 à 13 et 26 à 30. Sur la source de ce contentieux et la solution intervenue, voy. infra, nos 141 à 147.
34. Le thème dit de la simplification intrabruxelloise ne sera cependant pas étudié dans ce dossier. Cf., à ce sujet, notamment, B. CADRANEL et Y. MOSSOUX, « L’articulation des compétences régionales et locales dans la Région de Bruxelles-Capitale : l’autonomie locale menacée ou recadrée ? », op. cit.
35. Dès la cinquième réforme de 2001, un des coauteurs de ce dossier avait pu écrire : « Si l’on se souvient que c’est le sous-financement structurel de la Communauté française qui a constitué la source politique du compromis de la Saint-Polycarpe, on peut sinon prévoir, au moins redouter une nième négociation et de nouveaux donnant-donnant, le jour où la Région de Bruxelles-Capitale criera à l’étranglement financier. Si l’on ajoute que cette région demeure l’objet des revendications encore insatisfaites du mouvement flamand, on admettra que le fédéralisme belge ne sort décidément pas stabilisé ni tellement plus cohérent des accords du Lombard » (H. DUMONT, « Saint-Polycarpe ou l’impossible cohérence du fédéralisme belge », Adm. publ., 2002, p. 316). Sur cette demande francophone entre 2001 et 2010, voy. P. ZIMMER, « La situation budgétaire de la Région de Bruxelles-Capitale », C.H. CRISP, 2006, no 1941 ; ID., « Les évolutions démographiques et socio-économiques de la Région de Bruxelles-Capitale depuis 1990 », C.H. CRISP, 2007, no 1948-1949 ; B. DALLE, « Overzicht van de communautaire onderhandelingen sinds 2007 », op. cit., pp. 458, 459 et 485, ainsi que la note du gouvernement bruxellois présentée le 25 janvier 2008 au groupe dit « Octopus » (sur celui-ci, voy. supra, note 31), note reprise pour l’essentiel dans l’accord de gouvernement de 2009, Doc., Parl. Rég. Brux.-Cap., 2009, no A-8/1, pp. 127 à 132. Pour la N-VA, toutefois, le sous-financement de Bruxelles était « un mythe tenace » (cf. N-VA, Nu durven veranderen. Verkiezingsprogramma 13 juni 2010, p. 67, cité par P. BLAISE, V. DE COOREBYTER et J. FANIEL, « Les résultats des élections fédérales du 13 juin 2010 », C.H. CRISP, 2010, no 2082-2083, p. 16).
36. Voy., notamment, sur cette crise et sur la précédente de 2007 (entre les élections législatives de juin 2007 et la formation du gouvernement Verhofstadt III le 21 décembre 2007), outre les références supra sous les notes 33 et 35, H. DUMONT, « La crise de l’État belge : un défi pour la raison publique », Raison publique, 2008, no 8, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, pp. 71 à 93, et ID., « Un impossible dialogue ? Deux communautés dans la tourmente », in A. VON BUSEKIST (dir.), Singulière Belgique, Paris, Fayard, 2012, pp. 29 à 45 ; M. UYTTENDAELE, « Chronique d’une législature maudite. Réflexions sur l’instabilité politique de la Belgique », Pouvoirs, 2011, no 136, pp. 51 à 68 ; P. POPELIER, D. SINARDET, J. VELAERS et B. CANTILLON (dir.), België, quo vadis? Waarheen na de zesde staatshervorming?, Antwerpen/Cambridge, Intersentia, 2012.
37. Toutes les grandes révisions de la Constitution depuis 1970 ont été la résultante de crises : cf. X. DELGRANGE et H. DUMONT, « Le rythme des révisions constitutionnelles et l’hypothèse de l’accélération du temps juridique », Adm. publ., 1999, pp. 210 à 235.
38. Cf., sur ce thème, H. DUMONT, « État, Nation et Constitution. De la théorie du droit public aux conditions de viabilité de l’État belge », in H. DUMONT, Ch. FRANCK, F. OST et J.-L. DE BROUWER (dir.), Belgitude et crise de l’État belge, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 1989, pp. 73 à 124, et ID., « La crise de l’État belge : un défi pour la raison publique », op. cit.
39. Voy. les références citées supra, sous les notes nos 31 et 35.
40. Selon B. DALLE (« Overzicht van de communautaire onderhandelingen sinds 2007 », op. cit., pp. 484 et 485), c’est la « doctrine Van Rompuy » qui a préconisé la stratégie consistant à conditionner la formation d’un gouvernement à une réforme approfondie de l’État pour forcer les partis francophones qui prétendaient n’être « demandeurs de rien » depuis la cinquième réforme de l’État à néanmoins négocier un accord : cf., en ce sens, une interview de H. VAN ROMPUY dans le périodique Knack, 21 décembre 2005. En réalité, les partis francophones étaient surtout demandeurs d’un refinancement structurel de la Région de Bruxelles-Capitale : voy. supra, note no 35.
41. Voy. les références citées supra, sous les notes nos 31 et 35.
42. Sur les positionnements de la N-VA au milieu des crises de 2007 et de 2010-2011, cf. notamment S. GOVAERT, « Les discussions communautaires sous les gouvernements Verhofstadt III, Leterme et Van Rompuy », op. cit., pp. 63 et 64 ; P. BLAISE, V. DE COOREBYTER et J. FANIEL, « Les résultats des élections fédérales du 13 juin 2010 », C.H. CRISP, 2010, no 2082-2083, p. 16, et S. GOVAERT, « Les négociations communautaires et la formation du gouvernement Di Rupo (juin 2010-décembre 2011) », op. cit., pp. 55 à 57 et 82 à 84. Le paradoxe veut toutefois que seuls 17 % des électeurs de ce parti étaient favorables à la scission de la Belgique lors des élections du 13 juin 2010, tandis que 10 % d’entre eux étaient même favorables à un retour à la Belgique unitaire… : cf. M. SWYNGEDOUW et K. ABTS, « Les électeurs de la N-VA aux élections fédérales du 13 juin 2010 », C.H. CRISP, 2011, no 2125, p. 28.
43. Sur le thème du danger de l’abus de minorité, cf. X. DELGRANGE et H. DUMONT, « Les compromis constitutionnels et la loyauté dans le fédéralisme coopératif belge. Les principes en jeu dans le conflit d’intérêts relatif aux écoles francophones des communes périphériques », in Liber amicorum Michel Mahieu, Bruxelles, Larcier, 2008, pp. 407 à 430, et H. DUMONT, « Le fédéralisme multinational belge se prête-t-il à une mutation confédérale ? Les onze leçons d’un fédéralisme immature », in M. SEYMOUR et G. LAFOREST (dir.), Le fédéralisme multinational. Un modèle viable ?, Bruxelles, P.I.E. Lang, 2011, pp. 177 à 210.
44. Cf. P. BLAISE, V. DE COOREBYTER et J. FANIEL, « Les résultats des élections fédérales du 10 juin 2007 », C.H. CRISP, 2007, no 1964-1965 ; ID., « Les résultats des élections fédérales du 13 juin 2010 », op. cit.
45. En l’occurrence le PS, le sp.a, le CD&V, le cdH, le MR, l’Open Vld, Écolo et Groen, autrement dit les partis francophones et néerlandophones des trois familles politiques traditionnelles et les Verts, sans lesquels la majorité requise par l’adoption des lois spéciales aurait été hors d’atteinte. Les Verts ont accepté de soutenir la réforme sans pour autant entrer dans le gouvernement Di Rupo. Cf. S. GOVAERT, « Les négociations communautaires et la formation du gouvernement Di Rupo… », op. cit., p. 83.
46. Cf. Un État fédéral plus efficace et des entités plus autonomes. Accord pour la sixième réforme de l’État, 11 octobre 2011, accessible sur le site www.lachambre.be.
47. Cf., en ce sens, aussi B. DALLE, « De uitvoering van het “Vlinderakkoord” van 11 oktober 2011… », op. cit., p. 40.
48. Le plus souvent le président du parti : cf. ibid., p. 24.
49. À côté du COMORI, un groupe de travail distinct composé d’un sénateur par parti associé à la majorité spéciale a préparé la réforme du Sénat sous la présidence du sénateur PS Philippe Moureaux. Le Premier ministre et les deux secrétaires d’État en faisaient partie à titre d’observateurs (cf. B. DALLE, « De uitvoering van het “Vlinderakkoord” van 11 oktober 2011… », op. cit., p. 24). Les réformes intrabruxelloises ont aussi fait l’objet d’un groupe de travail ad hoc : il était composé de représentants bruxellois des huit partis associés (cf. ibid., p. 36). Des accords de coopération ont, par ailleurs, été négociés au sein du Comité de concertation : cf. ibid., pp. 37 à 38.
50. La première version des textes était généralement rédigée et préalablement discutée au sein d’un groupe de travail restreint composé de membres des cabinets du Premier ministre et des deux secrétaires d’État (le GT3). Elle était ensuite soumise à un groupe de travail technique composé d’un expert par parti (le GT8). Les consensus réalisés au sein de ce GT8 se sont souvent révélés décisifs, le COMORI ne devant intervenir en pratique que pour trancher les désaccords (cf. B. DALLE, « De uitvoering van het “Vlinderakkoord” van 11 oktober 2011… », op. cit., pp. 25 à 27).
51. Cf. ibid., p. 28.
52. Cf. W. DE WACHTER, « “Démocratie” et “particratie” dans le processus décisionnel de la quatrième réforme de l’État » et J.-L. DE BROUWER, « Démocratie et partis politiques dans une société “pluriethnique”. Quelques réflexions liminaires », Adm. publ., 1994, pp. 89 à 100 ; P. DELWIT et B. HELLINGS, « La nouvelle réforme de l’État : processus, contenu, méthode », Adm. publ., 2002, pp. 99 à 106 ; H. DUMONT, « Les problèmes méthodologiques », in Fr. DELPÉRÉE (dir.), Les lois spéciales et ordinaire du 13 juillet 2001. La réforme de la Saint-Polycarpe, Bruxelles, Bruylant, 2002, pp. 13 à 43.
53. Voy. infra, no 81.
54. Voy. les références citées supra, sous les notes nos 31, 33, 35 et 42.
55. Cf., sur ce thème, notamment, O. CORTEN e.a. (dir.), Les démembrements d’États et délimitations territoriales : l’uti possidetis en question(s), Bruxelles, Éd. de l’U.L.B., 1999 ; H. DUMONT et S. VAN DROOGHENBROECK, « Le statut de Bruxelles dans l’hypothèse du confédéralisme », Brussels Studies, 15 octobre 2007, no 10 (www.brusselsstudies.be) ; J. SOHIER, « Le “plan B” », in J. SAUTOIS et M. UYTTENDAELE (dir.), La sixième réforme de l’État (2012-2013). Tournant historique ou soubresaut ordinaire ?, Limal, Anthemis, 2013, pp. 531 à 550 ; M. VERDUSSEN, « La Belgique appartient-elle à l’avenir ou au passé ? », op. cit., pp. 573 à 581.
56. Notion relative sans nul doute, dans la mesure où chaque État fédéral a ses particularités, mais tout de même… Voy., à cet égard, les intéressantes réflexions théoriques de P. POPELIER et D. SINARDET, « Stabiliteit en instabiliteit in de Belgische federale staatsstructuur », in P. POPELIER, D. SINARDET, J. VELAERS et B. CANTILLON (dir.), België, quo vadis ? Waarheen na de zesde staatshervorming?, op. cit., pp. 3 à 31. Comp. H. DUMONT, « Le fédéralisme multinational belge se prête-t-il à une mutation confédérale ? Les onze leçons d’un fédéralisme immature », op. cit.
57. Cf. N-VA, Verkiezingsprogramma 2014.
58. Cf. M. VERDUSSEN, « La Belgique. Un fédéralisme bipolaire mû par une dynamique de dissociation », in M. SEYMOUR et G. LAFOREST (dir.), Le fédéralisme multinational. Un modèle viable ?, Bruxelles, P.I.E. Lang, 2011, pp. 211 à 225.
59. Dans un État fédéral, un certain équilibre entre les principes d’autonomie et de coopération est un gage de stabilité et de bonne gouvernance.
60. Les principales réalisations collectives de ce centre ont été présentées dans la préface à l’ouvrage dirigé par S. VAN DROOGHENBROECK, Le droit international et européen des droits de l’homme devant le juge national, Bruxelles, Larcier, 2014, pp. VI et VII.
61. Voy. supra, notes nos 49 et 50.