Éloges de la version anglaise, Dreams of Awakening :
« Je suis impliqué dans la culture toltèque du rêve depuis de nombreuses années et le livre de Charlie est un des meilleurs que j’ai jamais lus sur les rêves. Nous entrons dans une ère nouvelle dans laquelle il est prédit que les anciennes lignées de rêveurs vont être redécouvertes, et Charlie Morley nous offre un trésor pour cette nouvelle ère, une vision moderne des anciennes pratiques tibétaines du rêve ».
Sergio Magaña Ocelocoyotl, auteur de 2012–2021 : The Dawn of the Sixth Sun
« J’ai animé des retraites conjointement avec Charlie et je le considère comme l’enseignant le plus expérimenté et le plus authentique du rêve lucide en Europe. Il s’est entraîné depuis son adolescence et ce livre offre un programme d’entraînement reposant sur son expérience pratique exceptionnelle ».
Rob Nairn, auteur de Living, Dreaming, Dying
« Explorant de façon joyeuse la conscience, le rêve lucide et le bouddhisme, Charlie Morley ouvre l’esprit du lecteur et l’amène à accepter les prémisses du véritable éveil qu’est le yoga du rêve. Je recommande ce livre à tous ceux qui sont sur la voie du rêve lucide ».
Robert Waggoner, auteur de Lucid Dreaming : Gateway to the Inner Self
« Charlie est la preuve même de l’évolution. Il représente la génération future : vivacité de l’esprit et bonté du cœur. Il est comme un DJ qui mixe l’ancien et le nouveau pour créer une pratique pertinente, utile et, plus important encore, une pratique qui marche. Je recommande ce livre sans réserve. Il est dans le vrai ».
Ya’Acov Darling Khan, co-auteur de Danse Médecine : Voyage chamanique
en mouvement pour éveiller et réaliser tout votre potentiel
« Ce livre passionnant écrit par un brillant et jeune enseignant va captiver tous ceux qui sont fascinés par la possibilité à la fois de rêver et de vivre en toute lucidité ».
Tim Freke, auteur de Vivre Lucide et de Éveillez-vous !
« Charlie est capable de faire du rêve lucide quelque chose de cool, de frais et de parlant à tout le monde et, surtout, il rend son processus facile à comprendre. En tant qu’hypnothérapeute, je peux voir que ce qu’il écrit vient du cœur, sans intention cachée, ce qui est une approche très rafraichissante ».
Valerie Austin, auteur de Self Hypnosis :
A Step-by-Step Guide to Improving Your Life
« Lorsque j’ai lu le livre de Charlie, je pouvais presque l’entendre parler avec sa franchise unique et sa capacité à mêler l’inspiration et les faits de la façon la plus accessible. Plus important encore, ses propos sont d’une rare clarté, ce qui fait que ce livre est accessible à tous ceux qui veulent élargir leur vie onirique et donc leur vie à l’état de veille ».
Graham Nicholls, auteur de Avenues of the Human Spirit, et de Le voyage extracorporel
Mise en garde : cet ouvrage n’a pas vocation à se substituer à une formation complète. Malgré les efforts de l’auteur et de l’éditeur, un ouvrage d’une telle ampleur ne peut être à l’abri d’erreurs ou d’omissions. En outre, les travaux de recherche fondamentale et de découverte dans le domaine des sciences métaphysiques progressent constamment et débouchent sur des connaissances nouvelles qui peuvent entraîner la modification, voire l’abandon, de recommandations ou de normes précédemment admises. L’éditeur décline toute responsabilité quant à d’éventuels dommages résultant d’informations puisées dans cet ouvrage.
Dédicace de l’auteur :
Aux dakinis,
ces femmes éveillées
auxquelles je dois tant.
Dédicace des éditeurs :
À Stéphane « Jinpa » Bras,
merci de nous avoir amenés là où nous sommes aujourd’hui…
La version en français de cet ouvrage a vu le jour grâce à toi !
Merci de veiller sur nous de là où tu es…
Ultimement, la méditation bouddhiste vise à libérer l’esprit de l’illusion et de l’aveuglement. Pour ce faire, il est nécessaire d’entraîner l’esprit et de développer la bienveillance, la compassion et la sagesse. L’esprit qui rêve est un terrain fertile pour développer ces qualités. Dans la tradition tibétaine, la discipline raffinée du Yoga du Rêve se pratique depuis un millier d’années et, en tant que l’un des six célèbres yogas de Naropa, il s’agit d’un élément important de notre retraite intensive au Monastère de Samye Ling. La stabilité du rêve lucide est le fondement du Yoga du Rêve.
Dans Rêves d’éveil, Charlie Morley nous offre une synthèse utile et pratique des approches bouddhistes à la fois occidentales et tibétaines sur le travail sur le rêve. Les méthodes occidentales pour susciter les rêves lucides représentent une base importante pour quiconque souhaite s’engager, dans le futur, dans la pratique du Yoga du Rêve.
Je suis l’un des enseignants de Charlie et j’ai une connexion très forte avec lui ; grâce à cela, j’ai foi en son honnête simplicité et j’ai confiance dans ses méthodes. Sa clarté, son humilité et son humanité rendent facile à comprendre sa présentation de ce sujet profond et important qu’est le rêve lucide et je suis convaincu que les personnes qui vont étudier son livre et suivre ses enseignements peuvent lui faire confiance. L’approche de Charlie est particulièrement précieuse parce qu’il offre une méthode de travail sur le rêve et le sommeil qui va aider les gens dans des sociétés où des méthodes pertinentes faisaient jusque-là défaut.
Je recommande cet ouvrage à quiconque souhaite avoir la possibilité de vivre une vie plus éveillée.
Lama Yeshe Losal Rimpotché
Président du Rokpa Trust
Abbé de Kagyu Samye Ling
Directeur du projet Holy Isle
« Je n’arrive pas à être lucide pendant mes rêves… est-ce que je suis bon à rien » ?
Non, pas forcément. La lucidité ne concerne pas la seule dimension du rêve, mais toutes les dimensions : être réveillé, faire la vaisselle, s’endormir, se laisser aller à la rêverie, se réveiller et ainsi de suite. Alors, quel est l’ingrédient indispensable ? La reconnaissance. Quoi que ce soit que vous expérimentiez, la reconnaissance.
La plupart d’entre nous avance dans la vie à l’aveuglette, au milieu d’un miasme de confusion, poussée par des besoins et des désirs invisibles qui nous laissent insatisfaits, solitaires et vides. Il est courant de se sentir coupé du monde, déphasé, sans but, inutile parce que nous ne connaissons souvent qu’une infime partie de ce que nous sommes, la partie superficielle. Bon nombre d’entre nous a le sentiment qu’il y a quelque chose de « plus », sans savoir comment l’atteindre. C’est frustrant parce que ce « plus » semble important. C’est la raison pour laquelle le rêve lucide a tellement de sens.
Le pouvoir de reconnaissance que nous développons dans l’entraînement à la lucidité modifie l’expérience que nous faisons de tous les aspects de notre vie et nous aide à trancher la confusion névrotique pour accéder à notre potentiel inhérent de lucidité et de sagesse. Ces qualités sont le fondement d’un esprit libre et heureux qui peut s’embarquer sur le chemin du développement psychologique et spirituel.
La question est de savoir comment faire.
Les méthodes efficaces pour établir la lucidité dans le rêve se sont développées en Occident et Charlie les a maîtrisées et améliorées. Une de ces innovations uniques a été des retraites de rêves lucides impliquant des sessions communes où les gens dorment côte à côte et sont réveillés à des heures-clés tout au long de la nuit et du jour. J’ai suivi deux de ces sessions et j’ai été frappé de voir avec quelle rapidité les personnes devenaient lucides dans ce type d’environnement.
Mais plus important encore, nous comprenons alors que l’état hypnagogique (l’endormissement) et l’état hypnopompique (la phase de réveil) sont tout aussi importants que les rêves lucides pour l’apprentissage et le développement. C’est une bonne nouvelle pour les personnes qui luttent pour être lucides parce que cela signifie qu’il existe des moments d’entraînement alternatifs. Je les soupçonne d’être plus importants pour les débutants que les rêves eux-mêmes parce qu’ils sont plus accessibles et que ce sont des moments où nous pouvons expérimenter un libre accès au matériau psychologique que nous supprimons normalement, surtout la phase hypnopompique. Il semble que ce soit devenu ma spécialité et je peux parfois passer des heures dans cet état, à l’aube. L’esprit est plus souple alors, plus détendu, et donc parfois capable d’accueillir des émotions puissantes qu’il bloquerait en temps ordinaire. Cela permet un contexte où sont possibles la profonde compréhension et l’intégration d’états psychologiques perturbants. Ceux-ci sont indispensables pour grandir et mûrir. C’est presque comme si un univers parallèle s’ouvrait à nous, nous permettant une intégration rapide d’un état psychologique non résolu, intégration qui, autrement, prendrait toue une vie. C’est également le lieu où notre profonde sagesse peut nous instruire.
Cet ouvrage offre des instructions et des directives pratiques pour développer la reconnaissance et accroître la conscience dans de nombreux domaines de la vie. Il nous montre comment étendre la magie de la lucidité au-delà du rêve, à l’endormissement, au réveil, et finalement dans notre vie.
Rob Nairn, auteur de Living, Dreaming, Dying
En 1881, E. E. Barnard a découvert une nouvelle galaxie. À l’époque, elle n’a pas été reconnue en tant que galaxie, car l’idée qu’il pouvait y avoir des galaxies multiples était considérée comme ridicule. Il n’y avait qu’une seule et unique galaxie, la nôtre. La Voie Lactée représentait la totalité de l’univers. Quelques décennies après le début du 20e siècle, on a finalement accepté qu’il pût y avoir jusqu’à une douzaine de galaxies, même si de nombreuses personnes pensaient encore que cela était impossible. Nous savons maintenant qu’il y a plus de 100 milliards de galaxies uniquement dans la minuscule partie de l’univers que nous connaissons. On est passé d’une seule galaxie à un milliard de galaxies en l’espace d’une vie.
En étendant notre conscience de l’immensité de l’univers, les enquêtes scientifiques nous aident à nous tirer du sommeil de l’ignorance et à ouvrir les yeux sur le sens de l’infini et de l’abondance. Et, paradoxalement, le mystère s’épaissit.
Il y a une révolution qui se prépare et elle ne se limite pas à notre connaissance de l’espace extérieur. Tout comme il y a des astronautes, il y a des onironautes, des explorateurs de rêves intrépides qui suivent d’anciennes cartes ésotériques menant à l’espace interne, et qui trouvent qu’il y a une immensité semblable remplie de mondes merveilleux.
Dans son livre The Inner Reaches of Outer Space, le grand mythologue Joseph Campbell écrit : « En fait, le premier et le plus important service que nous rend la mythologie est celui d’ouvrir l’esprit et le cœur à la merveille absolue que sont tous les êtres ».
Au fur et à mesure que nous prenons de l’âge, nous perdons cette capacité de reconnaissance. Comme nos responsabilités augmentent et que les angoisses s’accumulent, nous nous précipitons tête baissée dans le futur en traînant derrière nous notre passé. Mais il y a un lieu où nous pouvons encore être des enfants et jouer avec les épiphanies… c’est dans nos rêves. Les livres de Campbell parlaient des mythes, mais ils auraient tout aussi bien pu parler de nos rêves de chaque nuit.
« Mais les rêves ne sont pas vrais », telle est l’objection instinctive qui surgit, mais cette réaction ne peut venir que de quelqu’un qui n’a jamais fait un rêve lucide. Lorsque nous devenons lucides au cours de nos rêves et apprenons à stabiliser cette lucidité, nous savons très rapidement qu’un rêve lucide est tout aussi vrai que la réalité éveillée. Il s’agit simplement d’une réalité qui a des dimensions autres.
Ce sont ces dimensions que cet ouvrage va explorer. Partant d’une structure tripartite du Terrain, de la Voie et de la Germination, mon but est d’offrir une cartographie qui, si on la suit, va permettre de reconnaître l’état de rêve comme reconnaissance du véritable potentiel de notre esprit.
Après avoir jeté de solides bases dans l’histoire, le contexte et les bienfaits du rêve lucide selon les traditions occidentales et bouddhistes, nous suivrons la voie de l’enseignement qui nous amène à être pleinement conscients dans nos rêves et notre sommeil. Enfin, nous explorerons la germination de la pratique, ce voyage dans les pays frontaliers, et nous pourrons alors voir jusqu’où va le terrier.
Les mots ne peuvent traduire la signification de la participation effective à cette aventure. Ce voyage ne se limitera pas à la lecture de ce livre, mais vous emmènera là où l’inspiration vous conduira. Alors, mettons-nous en route… et partons pour les rêves d’éveil…
« Apprenons à rêver, peut-être alors
trouverons-nous la vérité ».
FRIEDRICH KEKULÉ
Le rêve lucide est à parts égales à la fois magique et incompris. C’est pourquoi il est si important d’avoir un terrain de compréhension stable avant de se lancer dans sa pratique. Préparons donc notre terrain, extirpons les faits de la fiction, et ouvrons notre esprit au potentiel illimité du champ qui s’offre à nous.
Commençons par clarifier ces termes. Un rêve lucide est un rêve dans lequel nous sommes effectivement conscients que nous sommes en train de rêver au moment même où le rêve se déroule. Mais ne soyez pas trompés par cette définition sèche. Les rêves lucides sont communément décrits comme les expériences les plus excitantes qui soient. Un rêve pleinement lucide n’est pas brumeux, imprécis et fantasmagorique, c’est une expérience toute en couleurs, en haute définition et super-réaliste. Elle peut profondément reconfigurer notre perception de la réalité.
Le rêve lucide est une forme d’entraînement de l’esprit dans lequel nous apprenons consciemment à reconnaître nos rêves en tant que tels au moment où nous rêvons. Comme avec toute forme d’entraînement de l’esprit, le but est d’être plus conscient, plus conscient de façon à pouvoir éteindre le pilote automatique et s’éveiller à la vie. Rêver en toute lucidité est vivre en toute lucidité.
On dit que l’expression « rêve lucide » vient d’un psychiatre hollandais, Frederick van Eeden, qui l’aurait inventée il y a 100 ans1, mais elle est trompeuse. Les personnes qui participent à mes ateliers décrivent parfois un rêve particulièrement intense et précis qu’ils ont eu et se demandent si ce rêve pourrait être classé parmi les rêves lucides. Ma réponse est toujours que si vous avez besoin de vous demander s’il s’agissait d’un rêve lucide, c’est que ce n’en était probablement pas un. Lorsque vous faites un rêve pleinement lucide, vous ne passez pas votre temps à vous demander s’il répond aux caractéristiques du rêve lucide.
Pour éviter toute confusion, certains ont avancé l’expression alternative de « rêve conscient ». Mais le terme d’origine, « lucide » véhiculait l’idée « d’être lucide » plutôt que la description de la perception même de l’expérience. C’est cet élément de lucidité qui est la pierre angulaire du rêve lucide. En fait, il révèle le profond potentiel de l’esprit comme peu d’autres états de conscience peuvent le faire parce qu’à travers le rêve lucide nous devenons conscients de la conscience même.
Ce réveil de la conscience au sein de l’état de rêve ne s’accompagne d’aucun réveil physiologique. Selon toutes les apparences extérieures, nous sommes encore profondément endormis et « inconscients », pourtant, à l’intérieur, dans cet esprit qui rêve, on pourrait dire que nous sommes bien réveillés. Van Eeden disait : « Dans les rêves lucides, le dormeur se souvient des faits de sa vie quotidienne [et] atteint un état de parfaite conscience… Pourtant, le sommeil n’est pas perturbé, il est profond et réparateur2 ».
Il semble contradictoire d’être à la fois conscient et endormi tout à la fois, et ce paradoxe neurologique montre que ce n’est qu’à la fin des années 1970 que le rêve lucide a pu être vérifié par des techniques scientifiques occidentales.
Plus récemment, des études de la clinique de neurologie de l’Université de Francfort et de l’Institut de Psychiatrie Max Planck ont trouvé que des modifications spécifiques de la physiologie du cerveau apparaissaient une fois que le rêveur devenait lucide. Avec l’aide de la technologie de l’imagerie cérébrale comme la tomographie à résonance magnétique et l’électroencéphalogramme, les scientifiques peuvent maintenant identifier le vrai moment du « Aaah ! Je suis en train de rêver » de la conscience lucide et de ses corrélats neurophysiologiques. Les chercheurs ont conclu que « le rêve lucide constitue un état de conscience hybride qui présente des différences définies et mesurables par rapport à l’état de veille et à la phase de mouvement oculaire rapide (MOR)3 ». Ils ont découvert que lorsque la conscience lucide était atteinte au cours de l’activité onirique, les zones associées à l’auto-évaluation et l’autoperception s’activaient de façon considérable en quelque secondes4. Cela signifie que le paradoxe apparent qui veut que l’on soit à la fois éveillé et endormi, idée qui a provoqué une forte résistance et un fort scepticisme de la part de la communauté scientifique établie, n’était qu’une simple incapacité à comprendre comment deux zones cérébrales distinctes pouvaient être activées simultanément.
La chose qui surprend le plus les rêveurs lucides, la première fois, est le fait que les rêves pleinement lucides ne semblent en rien être un rêve. L’état de rêve lucide est vu et ressenti comme réel. Il s’agit d’une construction mentale méticuleuse et complexe qui semble souvent aussi réaliste que notre réalité de l’état de veille. Elle peut, en fait, sembler tellement réelle que nous en arrivons à remettre en question nos perceptions de la réalité de l’état de veille et être émerveillés par la capacité créative de l’esprit humain. Depuis que j’ai commencé à m’entraîner au rêve lucide, j’en ai eu des centaines et pourtant, je suis toujours frappé par le potentiel infini du rêve lucide et de sa capacité à susciter des dimensions entières de « réalité » au sein de notre propre esprit. Le contexte du rêve lucide est souvent d’un réalisme si précis que des rêveurs lucides de fraîche date en viennent à la conclusion audacieuse qu’il ne s’agit absolument pas d’un rêve et qu’ils ont dû voyager dans une autre dimension. Et en fait, oui, c’est ce qu’ils ont fait, ils ont voyagé dans la dimension de leur propre esprit.
Est-ce que cela signifie que les rêveurs lucides perdent pied avec la réalité ? Non, en fait, c’est tout le contraire ; une fois que nous avons pénétré dans la réalité convaincante du domaine du rêve et que nous savons qu’il est telle une illusion, nous sommes mieux à même de reconnaître l’aveuglement dans l’état de veille. Cela nous rend plus stables et plus conscients.
Si vous n’avez pas encore fait de rêve lucide, ou si vous n’êtes pas encore sûr de ce à quoi il ressemble véritablement, prenez maintenant un instant pour consulter certains rêves lucides qui figurent dans les annexes, à la fin de cet ouvrage. Je vous en prie, prenez vraiment le temps de les lireI.
Principalement, pendant un rêve lucide, l’esprit crée une projection incroyablement détaillée en trois dimensions pour former la réalité fonctionnelle du cadre du rêve, alors qu’une autre partie de l’esprit interagit consciemment et en temps réel avec cette projection. Ainsi, dans un rêve lucide, nous sommes à la fois le créateur et la création, celui qui projette et ce qui est projeté.
Ce processus époustouflant de l’esprit révèle l’infini potentiel du cerveau comme peu d’autres états de conscience peuvent le faire, car dans le rêve lucide, nous devenons conscients au sein de notre propre inconscient. Cela nous ouvre la possibilité d’interagir directement avec des aspects psychologiques et des archétypes à un niveau apparemment tangible.
Mon ami Robert Waggoner, expert en rêves lucides, m’a dit un jour : « Le rêve lucide nous aide à voir la magie qui existe déjà ». C’est vrai ; alors que nous apprenons à voir au-delà l’illusion, le rêve lucide nous donne néanmoins l’expérience tangible de la magie de l’état de rêve.
Dans un rêve pleinement lucide, la qualité de la conscience cognitive nous permet d’interagir directement avec le rêve et de l’influencer. Si nous avons suffisamment de lucidité, nous pouvons vivre un rêve avec exactement la même conscience réflective qu’à l’état de veille. Nous savons que nous sommes effectivement endormis dans notre lit, nous nous souvenons de ce que nous avons prévu de faire une fois la lucidité atteinte, et nous savons que nous nous déplaçons dans notre propre psyché.
Le rêve lucide n’est pas facile à maîtriser, mais il est indéniablement l’une des pratiques les plus passionnantes et les plus gratifiantes de toutes celles dans lesquelles vous ne pouvez jamais vous engager, et vous n’en tirerez que bienfaits psychologiques et spirituels. Pratiquée dans le cadre de la pleine conscience dans le rêve et le sommeil (que nous développerons plus loin), c’est une pratique totalement sans risque, ouverte à tous, indépendamment de l’âge et des capacités de chacun, qui offre une plongée unique dans notre propre psychologie.
Dans une lettre à un ami en deuil, Albert Einstein écrivait : « Un être humain… expérimente son propre moi, ses pensées et ses sentiments comme s’ils étaient séparés du reste, comme une sorte d’illusion d’optique de sa conscience… Essayer de dépasser cette illusion est la seule façon d’atteindre la véritable paix de l’esprit5 ».
Grâce au rêve lucide, nous pouvons dépasser cette illusion dans la mesure où nous faisons l’expérience d’une « réalité » pleinement réaliste qui peut sembler séparée de nous, mais que nous savons être un rêve à qui nous donnons vie et qui est effectivement en nous. Nous sommes ainsi introduits de façon viscérale à la notion radicale que la dualité peut n’être qu’une illusion. Dans un rêve lucide, nous faisons un avec toute chose parce que nous sommes toute chose. Cette expérience peut aider à dissoudre le sentiment d’isolement que nous éprouvons dans l’état de veille, nous permettant finalement de réveiller l’Unicité dont Einstein et les mystiques de tous les temps ont parlé en abondance.
Le rêve n’est pas quelque chose de bien nettement défini comme étant « lucide » ou « non lucide ». C’est plutôt un spectre de lucidité qui repose sur les degrés de conscience au sein du rêve, et qui peut aller du soupçon que nous rêvons peut-être à la conscience réflective totale du fait que nous sommes conscients.
J’ai identifié quatre niveaux de lucidité, même si cela reste un système de catégorisation très basique qu’il ne faut pas suivre de façon trop rigide. Notre progression dans ce spectre n’est pas non plus toujours linéaire et même si le niveau 1 peut souvent nous amener au niveau 2 et ainsi de suite, il est aussi courant de nous retrouver d’emblée au niveau 3 ou 4 grâce à une soudaine explosion de conscience.
Le terme « pré-lucide » a été utilisé pour la première fois par Celia Green, qui fait des recherches sur le rêve lucide, pour décrire l’état d’esprit dans lequel nous remettons en question la réalité du rêve. Même si cette expérience peut nous amener tout droit à la lucidité, il s’agit souvent d’un état que ceux qui débutent dans le rêve lucide connaissent fréquemment, et de façon frustrante, sans devenir lucides.
Dans l’état pré-lucide, nous soupçonnons que nous rêvons, généralement après avoir pris conscience de quelque étrange anomalie onirique. Par exemple, nous sommes pré-lucides si nous nous trouvons à penser « Attends, je ne me montre généralement pas en public en sous-vêtements… Est-ce que je ne serais pas en train de rêver ? »
Ici, nous faisons l’expérience du moment de conscience lucide du « Aaah ! », mais retombons dans un va-et-vient entre lucidité et non-lucidité. Nous pouvons être lucides un instant puis être distraits par le rêve et retomber dans l’absence de lucidité.
Plus couramment, le « flash de lucidité » initial peut être tellement excitant que nous nous réveillons. Le « Attends, je ne me montre généralement pas en public en sous-vêtements… Est-ce que je ne serais pas en train de rêver ? » devient vite un « Oh, super ! Je suis en train de rêver ! C’est génial ! Vivement que j’essaie de… » puis nous nous retrouvons dans notre lit, réveillés. En fait, pour certains débutants, cette excitation extrême du début peut signifier que leurs premiers et rares rêves lucides n’ont duré que quelques secondes avant qu’ils ne se réveillent (Alors, pour éviter cela, reportez-vous à la Deuxième Partie de ce livre).
Il s’agit de l’état de pleine conscience de la conscience réflective au sein du rêve, associé à une interaction volontaire dans le cadre du rêve et de ses personnages.
Ici, nous sommes pleinement conscients que nous rêvons et nous pouvons commencer à exercer une influence sur le cadre du rêve et sur le déroulement du rêve en nous engageant dans n’importe quelle activité que nous avons envie de faire. Avec la pleine lucidité, nous pouvons maintenir cette conscience pendant la totalité de la phase du rêve, qui peut durer une heure ou plus.
De nombreuses personnes pensent qu’il s’agit du niveau de lucidité suprême que l’on puisse atteindre. Je ne suis pas d’accord ; il y a un niveau encore plus profond.
C’est un terme que j’emprunte à Robert Waggoner pour décrire l’état dans lequel nous avons un niveau de conscience qui surpasse la pleine lucidité grâce à une expérience de conscience non duelle partielle.
Qu’est-ce que cela veut dire ? La différence fondamentale entre le rêve « pleinement lucide » et le rêve « super-lucide » repose sur un changement de perception subtil, mais profond. La plupart d’entre nous qui vivons un rêve pleinement lucide vont interagir avec le rêve comme s’il s’agissait de la réalité de l’état de veille. Par exemple, nous allons pouvoir utiliser une porte pour nous rendre dans une autre pièce ou voler dans les airs pour aller dans un endroit nouveau. Mais dans un rêve super-lucide, nous allons tout simplement passer à travers le mur ou nous retrouver instantanément là où bon nous semble plutôt que de voyager pour atteindre ce lieu. Lorsque nous sommes super-lucides, nous faisons reposer nos actions sur le fait que tout ce qui est dans le rêve est une création de l’esprit, sans retomber dans les interactions dualistes de la pleine lucidité, qui est à un niveau inférieurII.
Ce type de rêve relève du spectre de la lucidité, mais ne rentre pas dans l’un des quatre niveaux décrits ci-dessus. Nous faisons l’expérience d’être le témoin de notre rêve depuis une perspective non préférentielle modérée, totalement conscients que nous sommes en train de rêver, mais sans aucune envie d’influencer le rêve ou d’interagir avec lui. Au contraire, nous lui permettons de se dérouler tout seul, souvent comme si nous le regardions sur un écran de cinéma.
Être le témoin de ses rêves peut survenir spontanément, mais c’est généralement le résultat courant d’une méditation prolongée, le méditant transportant effectivement dans la nuit l’attention vigilante non préférentielle et calme de la journée.
N’accordez pas trop d’importance à ces différents niveaux de lucidité. J’ai inclus le spectre de la lucidité ici plus comme moyen d’explorer la nature de la lucidité que pour en faire la pierre angulaire de cette pratique.
De nombreux livres et sites internet vous promettent la capacité de « contrôler vos rêves grâce au rêve lucide », mais c’est un objectif peu judicieux et, il faut le dire, impossible. Même s’il est vrai qu’avec de l’entraînement, un praticien avancé peut gagner un niveau remarquable d’influence volontaire sur de nombreux aspects de leur vie subjective, il y a toujours un aspect bien plus vaste de l’esprit qui crée la majorité du rêve.
Une fois la lucidité atteinte, il est bien entendu naturel de vouloir exercer notre volonté. Une des activités de rêve lucide les plus populaires semble être de voler dans les airs ; aussi travaillons sur cet exemple. Disons que vous êtes lucide et choisissez de voler dans le ciel. Levez le poing vers le ciel et voilà que vous vous envolez, comme Superman. Vous contrôlez alors le rêve, n’est-ce pas ? C’est faux.
Même dans un rêve lucide dans lequel vous volez dans les airs, contrôlant à loisir votre hauteur et votre vitesse, il y a un aspect bien plus vaste de l’esprit qui crée et gère le paysage onirique au-dessus duquel vous volez et le ciel de rêve dans lequel vous vous déplacez. Avez-vous choisi la présence de ces personnages du rêve qui marchent dans les rues, en dessous de vous ? Il se peut que vous contrôliez votre expérience subjective d’un paysage onirique localisé, mais il y a quelque chose de bien plus puissant qui commande tout le reste.
Waggoner dit : « Aucun marin ne contrôle la mer. De la même façon, aucun rêveur lucide ne contrôle le rêve6 ». Ce serait un marin bien arrogant que celui qui croirait pouvoir contrôler l’impressionnante puissance de la mer, et il en est exactement de même pour nos rêves. Mais c’est quelque chose que je n’ai pas toujours admis. Grâce à un entraînement intensif, j’ai une fois atteint un niveau de lucidité dans lequel je pouvais changer la totalité du paysage onirique juste parce que j’avais la capacité de réduire au silence les personnages du rêve pour leur montrer que c’était moi le patron et rejeter avec force de nouvelles lignes du scénario du rêve pour imposer les miennes. Je pensais que finalement, après des années de pratique, j’avais fini par avoir un contrôle total sur mes rêves, mais en fait, j’avais négligé la musique de l’esprit onirique et j’imposais mon propre tempo à la danse, en totale désynchronisation avec ce que le rêve essayait de m’offrir. Ces tentatives ont invariablement mené à une claque bienveillante, mais ferme du maternel esprit du rêve, soit sous la forme d’une perte inexplicable du contrôle lucide du rêve, soit sous la forme d’un bombardement de matériaux flous cauchemardesques.
Une fois que j’ai commencé à renoncer au contrôle excessif que j’exerçais alors, une chose d’étrange est arrivée. J’ai commencé à avoir plus d’influence volontaire dans le cadre de mes rêves lucides, rien de moins. C’était comme si, après avoir changé ma motivation de contrôle pour celle de co-création, l’esprit du rêve répondait favorablement en me donnant une capacité de lucidité plus grande.
Un marin peut apprendre à tellement bien connaître la mer qu’il navigue comme si il la contrôlait. Ainsi, nous aussi pouvons arriver à naviguer sur l’océan de notre esprit onirique.
Une autre préoccupation qu’il faut envisager au début est la peur que le rêve lucide puisse, d’une façon ou d’une autre, interférer avec l’intégrité de l’inconscient en amenant de la conscience dans une zone de notre psychisme qui, normalement, fonctionne de manière autonome. Heureusement, cette peur est sans fondement.
Loin de polluer le pur message de cette partie profonde de nous-mêmes, le rêve lucide permet en fait de prendre plus facilement en compte ce message, ce qui est, selon moi, exactement ce que souhaite l’inconscient. En vérité, l’inconscient apprécie la lucidité, car une ligne de communication directe est enfin établie entre la lucidité et l’inconscient et il « se réjouit » d’avoir à traiter une lucidité plus grande et une conscience plus grande7 ». Finalement, il peut nous parler face à face.
À chaque rêve, l’inconscient nous tend une main amicale. Mais bien trop souvent, c’est une main que l’on ignore, soit en nous ne souvenant pas de nos rêves, soit en ne reconnaissant pas sa valeur. Mais une fois que nous sommes devenus consciemment lucides dans le rêve, nous tendons la main à l’inconscient et finalement faisons de lui un ami.
Comme Rob Preece l’écrit dans The Psychology of Buddhist Tantra, « Lorsque nous acceptons de prendre la psyché au sérieux et écoutons son expression symbolique, nous obtenons une plus grande clarté et une plus grande lucidité vis-à-vis des forces qui nous influencent. Nous ne sommes plus les victimes de l’inconscient8 ».
C’est l’un des bénéfices centraux du rêve lucide, faire de nous des amis de nous-mêmes. Nous ne devenons pas lucides pour essayer de contrôler l’inconscient ou de le régenter, nous devenons lucides pour être ami avec notre inconscient, pour communier avec lui, et finalement pour commencer à l’écouter.
Comme avec toute amitié, nous avons appris à accepter notre nouvel ami sur un pied d’égalité, ne le censurant pas et ne nous disputant pas avec lui, mais l’écoutant avec un cœur ouvert. C’est l’amitié la plus importante que nous ne pourrons jamais avoir, et c’est une amitié qui va aussi avoir des retombées sur notre état de veille, sous la forme d’accès de créativité ou de moments de lucidité spontanés qui vont nous faire savoir que notre nouvel ami est toujours avec nous, même lorsque nous ne rêvons pas.
Même si cette nouvelle amitié est sur un pied d’égalité avec nous-mêmes, l’inconscient a dirigé notre état de rêve pendant bien plus longtemps que nous ne l’avons fait grâce au rêve lucide, et il sera donc toujours en position de force. Nous ne parlons pas de prendre une drogue quelconque qui oblige l’inconscient à accueillir la conscience lucide, mais d’un processus par lequel l’esprit du rêve ouvre sa porte et permet à la lucidité de pénétrer dans son domaineIII. Cela signifie que s’il n’apprécie pas ce que nous faisons dans le rêve lucide, il va tout simplement bloquer nos tentatives de faire quoi que ce soit, aussi, penser que nous pourrions « toucher à l’inconscient » simplement parce que nous sommes lucides revient à attribuer un degré d’influence excessif à notre esprit conscient.
La bonne nouvelle est que tout le monde peut apprendre à pratiquer le rêve lucide. En fait, il n’est pas vraiment nécessaire d’apprendre, il faut simplement se souvenir. Cela s’explique par le fait que nous avons tous été de grands rêveurs lucides dans le passé. Chaque enfant est un rêveur lucide ; la tâche des adultes consiste tout simplement à en réapprendre la technique.
Les enfants font naturellement des rêves lucides9. Pourquoi ? Je crois que cela a un lien avec la créativité. Chez les enfants, c’est le cerveau droit qui domine naturellement, ce qui veut dire qu’ils sont en phase avec le côté créatif, imaginatif, intuitif de leur cerveau. Mais au fur et à mesure qu’ils grandissent, les côtés s’inversent au profit de la domination du cerveau gauche, plus logique, plus calculateur, de l’âge adulte. Rêver est une activité qui dépend presque exclusivement de l’hémisphère droit et il semble donc qu’une fois que nous perdons le contact avec la créativité de l’hémisphère droit de notre cerveau, nous perdons aussi le contact avec nos rêves, et avec notre capacité naturelle à devenir lucide au cours de ceux-ci. En bref, nous oublions comment rêver en toute lucidité lorsque nous oublions d’être des enfants. Mais les artistes, comme les acteurs, les musiciens, gardent souvent, à l’âge adulte, leur prédisposition pour le cerveau droit, ce qui explique qu’ils semblent toujours avoir des rêves lucides spontanés plus souvent que les autres.
Ainsi, le rêve lucide est un état parfaitement naturel de l’esprit que nous pouvons retrouver. Le Bouddha a dit : « Ce qui importe n’est pas depuis combien de temps vous avez oublié quelque chose, mais la rapidité avec laquelle vous allez vous en souvenir ». Ne vous inquiétez donc pas de quand vous avez eu un rêve lucide pour la dernière fois, essayez seulement de vous souvenir comment y arriver à nouveau. Le fait est que si vous rêvez, vous pouvez avoir un rêve lucide ; il suffit d’un peu de pratique.
Dans tout cet ouvrage, j’ai cité des recherches de nombreux laboratoires du sommeil différents, mais le meilleur « laboratoire du sommeil » dont nous disposons est notre propre esprit en train de rêver, et nous y avons accès chaque nuit.
Lorsque j’étais adolescent, la libre accessibilité au rêve lucide était pour moi l’un de ses vrais atouts. Il n’y avait pas besoin d’acheter le moindre équipement, pas d’initiation à recevoir, par de club auquel adhérer. Les seuls articles de base exigés étaient le sommeil et de la détermination. Et ce qu’il y a de bien dans le travail sur le rêve, comparé à d’autres outils d’entraînement de l’esprit, est qu’il ne se passe quasiment jamais 24 heures sans que nous ayons la possibilité de le pratiquer. Que vous travailliez de nuit et dormiez un peu l’après-midi, que vous soyez étudiant et dormiez jusqu’à l’heure du déjeuner, ou que vous soyez retraité et somnoliez dans la journée, il y a toujours du temps pour le rêve lucide.
Comme avec toutes les compétences, certaines personnes vont trouver l’exercice plus facile que d’autres. Il semble que posséder deux chromosomes X aide, car les femmes rendent compte de rêves lucides plus nombreux et ont plus de facilité à se rappeler les rêves que les hommes, mais à la base, le rêve lucide est ouvert à tous. Les adolescents et les adultes de moins de 30 ans ont des phases de rêve plus longues et donc une opportunité légèrement plus grande de pratiquer le rêve lucide, mais tant que votre motivation pour devenir lucide est forte, peu importe le nombre de périodes de rêve que vous avez. J’ai enseigné à des personnes de 12 à 70 ans et la principale clé du succès est la motivation, pas l’âge.
Un grand nombre des ateliers et des retraites de rêves lucides que j’ai animés ont eu lieu dans des centres bouddhistes et j’ai trouvé que les personnes qui pratiquaient la méditation avaient un taux de rêves lucides bien plus élevé que ceux qui ne méditaient jamais, certains d’entre eux ayant des rêves lucides spontanés toutes les semaines. Cela s’explique par le fait que l’attention consciente au cours de la journée se traduit directement dans l’attention consciente au cours des rêves. En fait, l’une des techniques originales d’induction du rêve lucide (dont nous parlerons plus en détail dans la Deuxième Partie) est la méditation de la pleine conscience.
Si vous trouvez que la méditation est un peu trop statique, il semble que la piste de danse puisse tout aussi bien convenir. Avant d’enseigner le rêve lucide, j’ai passé de nombreuses années à travailler dans le monde des professionnels du breakdance et j’ai remarqué que bon nombre de mes amis danseurs trouvaient le rêve lucide incroyablement facile. Est-ce que c’est parce qu’ils tournent autant sur la tête ? Peut-être. Jayne Gackenbach, chercheur en rêve lucide, dit qu’en raison du lien entre le système vestibulaire de l’équilibre de l’oreille interne et la production de mouvements oculaires pendant les rêves, les personnes qui ont un bon équilibre physique (comme celles qui pratiquent le breakdance), ont souvent des facilités pour le rêve lucide10. Gackenbach a fait une autre découverte et c’est celle-là qui est ma préférée : apparemment, les personnes qui font des rêves lucides sont souvent « des personnes qui ont une certaine tendance à avoir un tempérament androgyne et celles qui acceptent de prendre des risques internes comme de s’essayer au tambour chamanique11 ».
Il semble donc que si vous êtes une adolescente attentive, au tempérament artistique, pratiquant le breakdance et le tambour chamanique, vous allez trouver le rêve lucide bien plus facile que la plupart d’entre nous. Mais si vous n’êtes rien de tout cela, ne vous inquiétez pas, nous pouvons tous apprendre à rêver lucidement. Et dans la Deuxième Partie de cet ouvrage, je vous dirai comment.
La pleine conscience dans le rêve et le sommeil est une approche holistique du rêve lucide et du sommeil conscient que j’ai créée avec celui qui m’a appris la méditation bouddhiste, Rob Nairn. Cette nouvelle approche ne consiste pas simplement à apprendre comment avoir des rêves lucides, elle revient plutôt à utiliser toutes les périodes d’endormissement, de rêve et de réveil pour notre évolution spirituelle et psychologique.
La pleine conscience dans le rêve et le sommeil est faite de trois pratiques différentes, à savoir la méditation de la pleine conscience, l’entraînement au rêve lucide à partir à la fois de la tradition occidentale et de la tradition du bouddhisme tibétain, et les techniques de sommeil conscient appelées « vigilance hypnagogique et vigilance hypnopompique ». Ne soyez pas effrayés par ces noms bizarres pour le moment, tout va s’éclaircir plus tard. Notre espoir est qu’en associant des techniques occidentales et orientales nous pourrons jeter un pont entre la vision occidentale souvent superficielle du rêve lucide et les pratiques souvent inaccessibles du yoga du rêve tibétain. La pleine conscience dans le rêve et le sommeil est destinée aux personnes qui veulent aller au-delà du rêve lucide et découvrir quelque chose de plus profond.
La pleine conscience dans le rêve et le sommeil consiste essentiellement à amener une conscience vigilante dans toutes les phases du sommeil, nous permettant d’utiliser les 30 années que nous passons à dormir plutôt que de nous contenter des 6 années que nous passons à rêver. En améliorant notre entraînement dans toutes les phases du sommeil plutôt que simplement dans l’état de rêve lucide, nous pouvons avoir un système bien plus holistique et bien plus vaste, avec des bienfaits qui vont d’étendre bien au-delà du monde des rêves et imprégner notre vie à l’état de veille.
À l’image du rêve lucide, la pleine conscience dans le rêve et le sommeil peut sembler paradoxale, car nous sommes habitués à toujours penser au rêve et au sommeil comme à des processus échappant à la conscience. Mais il est possible d’être conscient pendant la plupart des phases du rêve et du sommeil, et cette conscience va, de façon paradoxale, nous amener à un sommeil plus réparateur et plus bénéfique.
Le but ultime est de permettre à la conscience vigilante de s’insinuer doucement dans toutes les phases de notre cycle de sommeil. Cela implique un processus de profond déconditionnement qui va aussi infiltrer notre état de veille, nous permettant de nous « éveiller à la vie » avec une conscience plus grande et de vivre comme si nous étions dans un rêve lucide.
I. Tout le monde n’aime pas lire le récit des rêves lucides des autres (ce qui explique que je n’ai pas inclus un seul de ces rêves dans le corps principal du texte), mais dans les annexes, j’ai mis plus de 20 rêves qui sont mes propres rêves, pour ceux que cela intéresse.
II. Un rêve super-lucide, pour bon nombre de gens, est une expérience qui se rapproche de la conscience non duelle, un rêve dans lequel la clarté de l’esprit est tellement grande qu’elle peut temporairement dissoudre le sentiment de moi du rêveur.
III. Nous avons environ cinq phases de rêve chaque nuit, aussi, même si nous n’avons qu’un rêve lucide par nuit, il y a encore quatre périodes de rêve dans lesquelles notre inconscient peut avoir libre cours et en faire à sa guise.
« L’histoire du monde n’est rien d’autre que celle de l’évolution de
la conscience de la liberté ».
HEGEL
1975 : huit heures viennent de sonner par un matin de printemps pluvieux à l’Université de Hull. Le psychologue Keith Hearne est penché sur un appareil qui enregistre les mouvements oculaires, le tonus musculaire et l’électroencéphalogramme de l’activité cérébrale du sujet dont il étudie le sommeil, un rêveur lucide de 37 ans du nom d’Alan Worsley. Même s’il ne le sait pas encore, Worsley est sur le point d’entrer dans l’histoire.
Lorsque Hearne a décidé de s’attaquer à la vérification scientifique du rêve lucide, ce concept était encore tourné en ridicule par la communauté scientifique comme étant une « impossibilité paradoxale ». Faisant fi de milliers d’années de comptes-rendus de première main et d’une quantité étonnante d’enseignements bouddhistes sur le sujet, la plupart des chercheurs en rêve et en sommeil considéraient que la conscience vigilante dans les rêves était une illusion fumeuse de l’époque New-Age.
Les contemporains de Hearne se sont rendu compte que la seule façon de vérifier scientifiquement l’activité de rêve lucide était de récolter des données qui prouveraient deux choses simultanément : la première que le rêveur rêvait bien et qu’il n’était pas partiellement réveillé, et la deuxième que le rêveur envoyait consciemment des signaux au monde extérieur tout en étant à l’intérieur du monde du rêve. Mais comment envoyer ces signaux sans se réveiller ? Dans le sommeil, pendant la phase de rêve, le corps est paralysé, à l’exception du système respiratoire et des yeux. Hearne a eu comme le pressentiment que les yeux pouvaient servir à envoyer ce signal capital.
On a demandé à Worsley d’essayer, avant de s’endormir, de devenir lucide puis de s’engager dans une série de lents mouvements oculaires horizontaux (très différents des mouvements légers aléatoires et circulaires du sommeil paradoxal). Ces signaux devaient être transmis au laboratoire par les appareils d’enregistrement des mouvements oculaires alors que l’électroencéphalogramme gardait une trace de son activité cérébrale.
La nuit n’a pas été un grand succès, mais au cours de la dernière heure du cycle de sommeil de Worsley, les phases de mouvements oculaires rapides (REM) sont devenues plus fréquentes. Hearne avait regardé Worsley rêver pendant environ une demi-heure lorsque quelque chose d’incroyable arriva.
« Soudain, du fouillis sans signification des allées et venues des deux canaux d’enregistrement des mouvements oculaires, une série régulière de grands zigzags est apparue sur le graphique », se rappelle Hearne dans son livre The Dream Machine. « Tout de suite, j’ai été sur le qui-vive et j’ai ressenti une euphorie extrême en comprenant que, pour la première fois, j’observais le tout premier signal délibéré jamais obtenu, envoyé au monde extérieur depuis un rêve1 ». « L’impossible » était finalement devenu réalité.
À peu près à la même époque où Hearne était devenu le pionnier de la vérification scientifique du rêve lucide au Royaume-Uni, aux USA, un jeune et brillant rêveur lucide commençait sa thèse de doctorat en psychophysiologie à l’Université de Stanford, en Californie. Ce rêveur prodigue s’appelait Stephen LaBerge, nom qui est devenu synonyme de rêve lucide dans le monde entier. Travaillant à Stanford, LaBerge a décidé de prouver, pour la première fois dans l’histoire, l’existence du rêve lucide ; c’est du moins ce qu’il pensait.
Comment pouvait-il ne pas avoir entendu parler des résultats de Hearne ? Même si ce dernier avait effectivement fait une communication lors d’un colloque sur les sciences du comportement en 1977, puis publié son doctorat une année plus tard, « la communauté scientifique établie peinait à reconnaître ses résultats2 ». En conséquence, sa preuve n’a tout simplement jamais été beaucoup connue, sujette à des articles, ou divulguée de l’autre côté de SciencePerceptual and Motor Skills3