Un jour, mes étudiants m’ont fait asseoir et m’ont intimé l’ordre d’écrire ce livre. Ils voulaient que les gens puissent profiter de notre travail pour améliorer leur existence. C’était quelque chose que je voulais faire depuis longtemps, mais c’est à ce moment que c’est devenu ma priorité numéro un.
Mon travail s’inscrit dans une tradition qui souligne la puissance de nos croyances. Il peut s’agir de croyances dont nous sommes ou non conscients, mais elles affectent fortement ce que nous voulons et le fait que nous réussissions ou non à l’obtenir. Cette tradition montre également comment le fait de changer les croyances des gens – même les plus simples d’entre elles – peut avoir des effets profonds.
Dans ce livre, vous apprendrez comment une croyance simple à propos de vous-même – une croyance que nous avons mise à jour dans nos recherches – guide une grande part de votre vie. En fait, elle imprègne chaque composante de votre vie. Une bonne partie de ce que vous pensez être votre personnalité se développe en réalité à partir de cet « état d’esprit ». Et une bonne partie de ce qui peut vous empêcher d’atteindre votre potentiel également.
Aucun livre n’a jamais expliqué en quoi consiste cet état d’esprit ni montré aux gens comment s’en servir dans leurs vies. Vous comprendrez tout à coup les grands hommes – en sciences, en littérature, en arts, en sports, et dans les affaires – et ceux qui auraient pu le devenir. Vous comprendrez votre partenaire, votre patron, vos amis, vos enfants. Vous verrez comment libérer votre potentiel – et celui de vos enfants.
C’est pour moi un privilège de partager mes découvertes avec vous. En plus des réactions des participants à mes recherches, j’ai agrémenté chaque chapitre de récits tirés de la presse ou basés sur mon existence et mon expérience, de façon à ce que vous puissiez voir les états d’esprit en action. (Dans la plupart des cas, les noms et les informations personnelles ont été modifiés pour préserver l’anonymat ; dans certains cas, plusieurs personnes ont été condensées en une seule pour clarifier le propos. Un certain nombre d’échanges verbaux sont recréés de mémoire, et je les ai restitués de mon mieux.)
À la fin de chaque chapitre et tout au long du dernier chapitre, je vous indique des manières d’appliquer les leçons – des façons d’identifier l’état d’esprit qui guide votre vie, de comprendre comment il fonctionne, et de le changer si vous le souhaitez.
Je voudrais saisir l’opportunité de remercier toutes les personnes qui ont rendu ma recherche et ce livre possibles. Mes étudiants ont fait de ma carrière de recherche un bonheur total. J’espère que je leur ai autant appris que j’ai appris d’eux. Je voudrais également remercier les organismes qui ont soutenu notre recherche : la William T. Grant Foundation, la National Science Foundation, le ministère de l’Éducation, le National Institute of Mental Health, le National Institute of Child Health and Human Development, et la Spencer Foundation.
Les personnes de chez Random HouseI ont formé l’équipe la plus encourageante que je puisse souhaiter : Webster Younce, Daniel Menaker, Tom Perry, et, surtout, Caroline Sutton, mon éditrice. Votre enthousiasme au sujet de mon livre et vos excellentes suggestions ont fait toute la différence. Je remercie mon merveilleux agent, Giles Anderson, ainsi que Heidi Grant de m’avoir mise en contact avec lui.
Merci à toutes les personnes qui m’ont donné des idées et des commentaires, mais j’adresse un merci tout particulier à Polly Shulman, Richard Dweck et Mary Ann Peshkin pour leurs commentaires approfondis et perspicaces. Enfin, je remercie mon mari, David, pour son amour et son enthousiasme, qui donnent à ma vie une dimension supplémentaire. Son appui tout au long de ce projet a été extraordinaire.
Mon travail a porté sur le développement et il m’a aidée à favoriser mon propre développement. J’espère qu’il aura le même effet sur vous.
I Maison d’édition de la version originale de l’ouvrage (NdT).
Quand j’étais une jeune chercheuse à ses débuts, un événement particulier a changé ma vie. J’étais obsédée par l’idée de comprendre comment les gens font face aux échecs, et j’ai décidé d’étudier ce phénomène en observant comment les élèves s’attaquent à des problèmes difficiles1. Ainsi, j’ai emmené des enfants, un par un, dans une salle de leur école, je les ai mis à l’aise, et je leur ai ensuite donné une série de problèmes à résoudre. Les premiers étaient assez faciles, mais les suivants étaient difficiles. Pendant que les élèves grognaient, transpiraient et peinaient, j’ai observé leurs stratégies et j’ai sondé ce qu’ils pensaient et ressentaient. Je m’attendais à relever des différences entre leurs manières de faire face à la difficulté, mais j’ai constaté une chose que je n’avais pas du tout prévue.
Confronté aux problèmes difficiles, un garçon de dix ans a rapproché sa chaise, s’est frotté les mains, s’est léché les babines et s’est écrié : « J’aime avoir un défi ! » Un autre, qui suait sur les problèmes, me regarda avec une expression heureuse et dit avec autorité : « Vous savez, j’espérais que ce serait instructif ! »
« Qu’est-ce qui ne va pas chez eux ? », me suis-je demandé. J’avais toujours pensé que soit vous faisiez face à l’échec, soit vous ne faisiez pas face à l’échec. Je n’avais jamais pensé que quiconque puisse aimer l’échec. Étaient-ce des enfants extraterrestres ou avaient-ils découvert quelque chose ?
Tout le monde a un guide, un modèle, quelqu’un qui a indiqué le chemin à prendre à un moment critique de sa vie. Ces enfants furent mes modèles. De façon évidente, ils savaient quelque chose que je ne savais pas et j’étais déterminée à découvrir quoi – afin de comprendre le genre d’état d’esprit qui pourrait transformer un échec en cadeau.
Que savaient-ils ? Ils savaient que les qualités humaines, telles que les compétences intellectuelles, pouvaient être cultivées par l’effort. Et c’est ce qu’ils faisaient – devenir plus intelligents. Non seulement ils n’étaient pas découragés par l’échec, mais ils ne pensaient même pas qu’ils étaient en train d’échouer. Ils pensaient qu’ils apprenaient.
Pour ma part, je pensais, au contraire, que les qualités humaines étaient gravées dans la pierre. Pour moi, vous étiez intelligent ou vous ne l’étiez pas, et l’échec signifiait que vous ne l’étiez pas. C’était aussi simple que ça. Si vous pouviez aligner les succès et éviter les échecs (à tout prix), vous pouviez rester intelligent. Les combats, les erreurs, la persévérance ne faisaient tout simplement pas partie du tableau.
Savoir si les qualités humaines peuvent être cultivées ou si elles sont gravées dans la pierre est une vieille question. Savoir ce que ces croyances signifient pour vous en est une nouvelle : quelles conséquences cela a-t-il de penser que votre intelligence ou personnalité est quelque chose que vous pouvez développer, par opposition à quelque chose qui est un trait fixe et profond ? Considérons d’abord le débat séculaire et hautement controversé sur la nature humaine et revenons ensuite à la question de ce que ces croyances signifient pour vous.
Depuis l’aube des temps, les gens ont pensé, agi, et réussi différemment les uns des autres. Il était certain que quelqu’un poserait la question de savoir pourquoi les gens étaient différents les uns des autres – pourquoi certains sont plus intelligents ou plus moraux – et si une chose les rendait différents de manière permanente. Les experts ont adopté les deux positions. Certains ont affirmé qu’il y avait une base physique importante à ces différences, les rendant inévitables et immuables. Au cours des époques, ces prétendues différences physiques ont inclus les bosses sur le crâne (phrénologie), la taille et la forme de ce dernier (craniologie) et, aujourd’hui, les gènes2.
D’autres ont pointé les différences importantes existant entre les origines, les expériences, la formation ou les manières d’apprendre des gens. Vous serez peut-être surpris(e) d’apprendre3 qu’un grand défenseur de cette vision des choses était Alfred Binet, l’inventeur du test de Q.I. Le test de Q.I. n’était-il pas censé résumer l’intelligence immuable des enfants ? En fait, non. Binet, un Français travaillant à Paris au début du XXe siècle, a conçu ce test pour identifier les enfants qui ne tiraient pas profit de l’enseignement des écoles publiques de Paris, de sorte que de nouveaux programmes éducatifs puissent être conçus pour les remettre sur la bonne voie. Sans nier les différences individuelles entre les intellects des enfants, il croyait que l’éducation et l’exercice pourraient provoquer des changements fondamentaux de l’intelligence. Voici une citation d’un de ses livres principaux, Les idées modernes sur les enfants, dans lequel il résume son travail avec des centaines d’enfants en difficulté d’apprentissage :
« Quelques philosophes récents […] affirm[e]nt que l’intelligence d’un individu est une quantité fixe, une quantité qu’on ne peut pas augmenter. Nous devons protester et réagir contre ce pessimisme brutal. […] Avec de l’exercice et de l’entraînement, et surtout de la méthode, on arrive à augmenter son attention, sa mémoire, son jugement et à devenir littéralement plus intelligent qu’on ne l’était auparavant. »4
Qui a raison ? Aujourd’hui la plupart des experts conviennent que ce n’est pas soit les uns soit les autres. Ce n’est pas la nature ou la culture, pas les gènes ou l’environnement. Dès la conception, il y a des interactions constantes entre les deux. En fait, comme l’a affirmé Gilbert Gottlieb5, un éminent neurologiste, non seulement les gènes et l’environnement coopèrent pendant que nous nous développons, mais les gènes requièrent des informations de la part de l’environnement pour fonctionner correctement.
Dans le même temps, les scientifiques apprennent que les gens ont plus de capacité qu’on ne le pensait pour l’apprentissage et le développement du cerveau tout au long de la vie. Bien sûr, chaque personne a un fondement génétique unique. Les gens peuvent commencer avec différents tempéraments et différentes aptitudes, mais il est clair que l’expérience, la formation, et l’effort personnel les amènent à parcourir le reste du chemin. Robert Sternberg, le grand spécialiste actuel de l’intelligence, écrit que le facteur principal qui détermine si les gens atteignent un niveau d’expertise « n’est pas une quelconque capacité fixe, mais l’engagement intentionnel qu’ils y consacrent »6. Ou, comme l’a reconnu Binet, son prédécesseur, ce n’est pas toujours les gens qui naissent les plus intelligents qui finissent les plus intelligents.
C’est une chose d’avoir des experts donnant leurs avis au sujet de questions scientifiques ;. c’est autre chose de comprendre comment ces points de vue s’appliquent à vous. Pendant 20 ans, ma recherche a montré que le point de vue que vous adoptez sur vous-même affecte profondément la manière dont vous conduisez votre vie. Elle peut déterminer si vous devenez la personne que vous voulez être et si vous accomplissez les choses qui comptent pour vous. Comment cela se produit-il ? Comment une simple croyance peut-elle avoir la puissance de transformer votre fonctionnement psychologique et, en conséquence, votre vie ?
La croyance dans le fait que vos qualités sont gravées dans la pierre – l’état d’esprit fixe – crée un besoin impérieux de faire ses preuves, encore et toujours. Si vous avez seulement une certaine quantité d’intelligence, une certaine personnalité et un certain sens moral, vous feriez mieux de montrer que vous en avez une quantité adéquate. Cela ne conviendrait tout simplement pas d’avoir l’air ou de se sentir déficient par rapport à des caractéristiques aussi fondamentales.
Certains d’entre nous sont formés à cet état d’esprit depuis leur plus jeune âge. Même enfant, j’étais focalisée sur le fait d’être intelligente, mais l’état d’esprit fixe m’a vraiment été inculqué par Mme Wilson, mon institutrice de sixième (à l’âge de 11-12 ans). À la différence d’Alfred Binet, elle croyait que les scores de Q.I. des personnes reflétaient l’entièreté de ce qu’elles étaient. En classe, nous étions assis dans l’ordre des Q.I., et elle ne faisait confiance qu’aux élèves au Q.I. élevé pour battre les brosses ou apporter un mot au proviseur. Hormis les maux d’estomac quotidiens qu’elle provoquait par son attitude catégorique, elle créait un état d’esprit par le biais duquel chaque élève de la classe avait un seul but dévorant : avoir l’air intelligent, ne pas avoir l’air bête. Qui pouvait s’occuper ou apprécier d’apprendre quand notre être tout entier était mis en jeu chaque fois qu’elle nous distribuait un test ou appelait un élève ?
J’ai vu tant de personnes animées par ce but insatiable de faire leurs preuves – en classe, dans leur carrière, et dans leurs relations. Chaque situation réclame une confirmation de leur intelligence, de leur personnalité, ou de leur caractère. Chaque situation est évaluée : est-ce que je réussirai ou est-ce que j’échouerai ? Est-ce que j’aurai l’air intelligent ou idiot ? Est-ce que je serai accepté ou rejeté ? Est-ce que je me sentirai gagnant ou perdant ?
Mais, après tout, notre société n’accorde-t-elle pas de la valeur à l’intelligence, à la personnalité et au caractère ? N’est-il pas normal de vouloir posséder ces traits ? Oui, mais…
Il y a un autre état d’esprit dans lequel ces traits ne sont pas simplement une main de poker que vous devez accepter et avec laquelle vous devez jouer, en essayant sans cesse de vous convaincre, vous et les autres, que vous avez une quinte floche alors que vous êtes secrètement embarrassé parce que vous avez une paire de dix. Dans cet autre état d’esprit, le jeu avec lequel vous jouez est seulement le point de départ pour un développement ultérieur. Cet état d’esprit de développement est basé sur la croyance que vos qualités fondamentales sont des choses que vous pouvez cultiver par vos efforts. Bien que les gens puissent être différents de beaucoup de façons, par leurs talents et aptitudes initiales, leurs intérêts, ou leur tempérament, chacun peut changer et se développer par le travail et l’expérience.
Les gens avec cet état d’esprit croient-ils que n’importe qui peut être n’importe quoi, que n’importe qui ayant la motivation ou la formation appropriée peut devenir Einstein ou Beethoven ? Non, mais ils croient que le vrai potentiel d’une personne est inconnu (et qu’il est impossible de le connaître) ; qu’il est impossible de prévoir ce qui peut être accompli avec des années de passion, de dur labeur et de formation.
Saviez-vous que Darwin et Tolstoï étaient considérés comme des enfants ordinaires ? Que Ben Hogan, un des plus grands golfeurs de tous les temps, manquait totalement de coordination et de grâce quand il était enfant ? Que la photographe Cindy Sherman, dont le nom s’est retrouvé sur presque toutes les listes regroupant les artistes les plus importants du xxe siècle, a échoué à son premier cours de photographie ? Qu’on a conseillé à Geraldine Page, une des plus grandes actrices nord-américaines, d’abandonner au vu de son manque de talent ?
Vous pouvez voir comment la croyance dans le fait que des qualités qui vous sont chères peuvent être développées crée une passion pour l’apprentissage. Pourquoi gaspiller du temps à prouver encore et toujours à quel point vous êtes bon(ne) quand vous pourriez devenir meilleur(e) ? Pourquoi cacher vos insuffisances au lieu de les surmonter ? Pourquoi chercher des amis et partenaires qui ne feront que consolider votre confiance en vous plutôt que ceux qui vous mettront aussi au défi de vous développer ? La volonté de grandir et de tenir bon, même (ou en particulier) quand ça ne va pas, c’est la marque de l’état d’esprit de développement. C’est l’état d’esprit qui permet à des personnes de réussir à certains des moments les plus difficiles de leur vie.
Pour vous donner une meilleure notion de la façon dont les deux états d’esprit fonctionnent, imaginez – d’une façon aussi concrète que possible – que vous êtes un(e) jeune adulte vivant une très mauvaise journée :
Un jour, vous allez à un cours qui est vraiment important pour vous et que vous aimez beaucoup. Le professeur rend les notes des examens de milieu de trimestre. Vous avez obtenu un 12/20. Vous êtes très déçu(e). Ce soir-là, sur le chemin du retour, vous constatez que vous avez écopé d’une contravention. Vraiment frustré(e), vous appelez votre meilleur(e) ami(e) pour partager votre expérience, mais vous vous sentez incompris(e).
Que penseriez-vous ? Que ressentiriez-vous ? Que feriez-vous ?
Quand j’ai posé ces questions à des personnes avec l’état d’esprit fixe, voici ce qu’elles ont dit : « Je me sentirais rejeté(e) », « Je suis un échec total », « Je suis un(e) idiot(e) », « Je suis un(e) perdant(e) », « Je me sentirais sans valeur et idiot(e) – tout le monde est mieux que moi », « Je suis merdique ». En d’autres termes, ils verraient ce qui s’est produit comme une mesure directe de leur compétence et de leur valeur.
Voici ce qu’ils penseraient de leurs vies : « Mon existence est pitoyable », « Ma vie est nulle », « Quelqu’un là-haut ne m’aime pas », « Le monde entier cherche à m’avoir », « Quelqu’un cherche à me détruire », « Personne ne m’aime, tout le monde me déteste », « La vie est injuste et tous mes efforts sont inutiles », « La vie est dégueulasse. Je suis stupide. Jamais rien de bon ne m’arrive », « Je suis la personne la plus malheureuse sur Terre ».
Pardonnez-moi, mais a-t-il été question de mort et de destruction ou seulement d’une note d’examen, d’une contravention et d’un appel téléphonique décevant ?
Ces personnes ont-elles seulement une faible estime d’elles-mêmes ou sont-elles des pessimistes patentées ? Non ! De fait, quand elles ne font pas face à l’échec, elles se sentent aussi méritantes et optimistes – aussi intelligentes et attirantes – que les personnes avec l’état d’esprit de développement.
Mais alors, comment feraient-elles face à cette situation ? « Je ne prendrais plus la peine de consacrer tant de temps et d’effort à bien faire quoi que ce soit » (en d’autres termes, ne laissez personne vous évaluer à nouveau). « Ne rien faire », « Rester dans mon lit », « Me saouler », « Manger », « Hurler sur quelqu’un si j’en ai l’opportunité », « Manger du chocolat », « Écouter de la musique et bouder », « Entrer dans mon placard et m’y asseoir », « Me bagarrer avec quelqu’un », « Crier », « Casser quelque chose », « Qu’y a-t-il à faire ? »
Qu’y a-t-il à faire ! Vous savez, quand j’ai écrit l’anecdote concernant la personne adulte, j’ai intentionnellement évoqué une note de 12/20, pas de 4/20. C’était un examen de milieu de trimestre, pas un examen final. C’était une contravention, pas un accident de voiture. La personne s’est sentie incomprise et pas clairement rejetée. Rien de catastrophique ni d’irréversible n’est arrivé. Pourtant, à partir de ce matériel brut, l’état d’esprit fixe crée le sentiment de l’échec complet et de la paralysie totale.
Quand j’ai donné le même topo à des personnes avec l’état d’esprit de développement, voici ce qu’elles ont dit. Elles penseraient :
« Je dois travailler plus dur en cours, faire plus attention en garant la voiture, et me demander si mon ami(e) a eu une mauvaise journée. »
« Le 12/20 m’indiquerait que je devrais travailler beaucoup plus dur en cours, mais j’ai le reste du semestre pour améliorer mes notes. »
Il y avait beaucoup, beaucoup plus de réponses de ce type, mais je pense que vous avez compris l’idée. Maintenant, comment feraient-ils face à cette situation ? Directement.
« Je commencerais à penser à étudier plus dur (ou à étudier d’une manière différente) pour mon prochain test dans ce cours, je paierais la contravention, et je mettrais les choses au clair avec mon (ma) meilleur(e) ami(e) la prochaine fois que nous discuterons. »
« Je regarderais ce qui était faux sur mon examen, prendrais la résolution de mieux faire, paierais mon PV, et appellerais mon ami(e) pour lui dire que j’étais énervé(e) la veille. »
« Travailler dur pour mon prochain examen, parler au professeur, faire attention à l’endroit où je me gare ou contester la contravention, et découvrir ce qui ne va pas avec mon ami(e). »
Vous ne devez pas avoir un état d’esprit ou l’autre pour être vexé. « Qui ne le serait pas ? Des choses comme une faible note ou la rebuffade d’un ami ou d’un être aimé, ce ne sont pas des événements amusants. Personne ne s’est léché les babines avec délectation. Pourtant, les gens avec l’état d’esprit de développement ne se sont pas mis une étiquette négative sur le front et n’ont pas baissé les bras. Bien qu’ils se soient sentis affligés, ils étaient prêts à prendre des risques, à affronter les défis, et à poursuivre le travail pour les relever.
Est-ce que tout ceci est une idée si originale que ça ? Nous avons un bon nombre de dictons qui soulignent l’importance du risque et le pouvoir de la persévérance, tel que « Qui ne risque rien, n’a rien », « Si vous ne réussissez pas au début, essayez, essayez encore » ou « Rome ne s’est pas construite en un jour ». (D’ailleurs, j’ai été enchantée d’apprendre que les Italiens ont la même expression.) Ce qui est vraiment étonnant, c’est que les gens avec l’état d’esprit fixe ne seraient pas d’accord. Pour eux, c’est « Qui ne risque rien, ne perd rien », « Si au début vous ne réussissez pas, vous n’avez probablement pas la capacité », « Si Rome ne s’est pas construite en un jour, peut-être n’était-elle pas censée exister ». En d’autres termes, le risque et l’effort sont deux choses qui pourraient indiquer vos insuffisances et prouver que vous n’étiez pas fait(e) pour la tâche. En fait, il est surprenant de voir à quel point les gens avec l’état d’esprit fixe ne croient pas à l’effort.
Ce qu’il y a de neuf également, c’est que les idées que les gens ont à propos du risque et de l’effort se développent à partir de leur état d’esprit plus fondamental. Ce n’est pas par hasard que certains reconnaissent la valeur des défis et l’importance de l’effort. Notre recherche a prouvé que ceci découle directement de l’état d’esprit de développement. Quand nous enseignons aux gens l’état d’esprit de développement, avec son accent sur la croissance, ces idées au sujet du défi et de l’effort émergent. De même, ce n’est pas par hasard que certains prennent en grippe le défi et l’effort. Quand nous mettons (temporairement) des personnes dans un état d’esprit fixe en mettant l’accent sur les traits permanents, elles craignent rapidement l’idée de défi et dénigrent celle d’effort.
Nous voyons souvent des livres avec des titres comme Les dix secrets des personnes qui ont le mieux réussi au monde encombrer les étagères des librairies, et ces livres peuvent donner plusieurs trucs utiles. Mais ils consistent habituellement en une liste de conseils sans relation entre eux, comme « Prenez davantage de risques ! » ou « Croyez en vous ! » Alors qu’on vous laisse admirer les personnes qui peuvent le faire, il n’est jamais évident de savoir comment ces choses vont ensemble ou comment vous pourriez un jour devenir comme ça. Ainsi, vous êtes inspiré pendant quelques jours, mais, fondamentalement, les personnes qui ont le mieux réussi au monde gardent leurs secrets.
Au lieu de ça, quand vous commencerez à comprendre les états d’esprit fixe et de développement, vous verrez précisément comment une chose mène à une autre – comment la croyance dans le fait que vos qualités sont gravées dans la pierre mène à une foule de pensées et d’actions, et comment la croyance dans le fait que vos qualités peuvent être cultivées mène à une foule de pensées et d’actions différentes, vous faisant suivre une voie totalement distincte. C’est ce que nous, psychologues, appelons une expérience de type eurêka !I. Non seulement j’ai vu ceci dans ma recherche quand nous enseignons aux gens un nouvel état d’esprit, mais je reçois tout le temps des courriers de personnes qui ont lu mon travail.
Elles se reconnaissent : « Quand j’ai lu votre article, je me suis littéralement retrouvé(e) à dire, à plusieurs reprises, “c’est moi, c’est de moi que ça parle !” ». Elles perçoivent les connexions : « Votre article m’a complètement soufflé(e). J’ai eu le sentiment d’avoir découvert le secret de l’univers ! » Elles sentent leurs états d’esprit se réorienter : « Je peux certainement rapporter avoir vécu une sorte de révolution personnelle de ma propre pensée, et c’est un sentiment passionnant. » Et elles peuvent mettre cette nouvelle façon de penser en pratique pour elles-mêmes et pour d’autres : « Votre travail m’a permis de transformer mon travail avec les enfants et de voir l’éducation d’une façon différente » ou « Je voulais juste vous faire savoir l’impact – au niveau personnel et pratique – qu’a eu votre exceptionnelle recherche sur des centaines d’étudiants ».
Il se peut que les personnes avec l’état d’esprit de développement ne pensent pas qu’elles sont Einstein ou Beethoven, mais ne sont-elles pas malgré tout plus enclines à avoir une vision exagérément positive de leurs capacités et à essayer des choses dont elles ne sont pas capables ? En fait, des études prouvent que les gens sont très mauvais pour estimer leurs capacités8. Récemment, nous avons cherché à voir qui était le plus susceptible de l’être. Bien sûr, nous avons constaté que les gens estimaient très mal leur performance et leur capacité. Mais c’était ceux avec l’état d’esprit fixe qui concentraient presque toute l’inexactitude observée. Les personnes avec l’état d’esprit de développement étaient quant à elles étonnamment lucides9.
Quand vous y réfléchissez, cela se comprend. Si, comme ceux avec l’état d’esprit de développement, vous croyez que vous pouvez vous développer, alors vous êtes ouvert(e) aux informations exactes sur vos capacités actuelles, même si elles sont peu flatteuses. Qui plus est, si vous êtes orienté(e) vers l’apprentissage, comme ils le sont, vous avez besoin d’informations précises sur vos capacités actuelles afin d’apprendre efficacement. En revanche, si tout est soit une bonne soit une mauvaise nouvelle au sujet de vos précieuses qualités – comme c’est le cas chez les personnes avec l’état d’esprit fixe –, le tableau est presque inévitablement déformé. Quelques résultats sont magnifiés, d’autres sont justifiés, et, sans que vous ne le sachiez, vous ne vous connaissez pas du tout.
Howard Gardner, dans son livre Les personnalités exceptionnelles, a conclu que les individus exceptionnels avaient « un talent spécial pour identifier leurs propres forces et faiblesses »10. Il est intéressant que ceux avec l’état d’esprit de développement semblent avoir ce talent.
L’autre chose que les personnes exceptionnelles semblent avoir est un talent spécial pour changer les revers de l’existence en succès futurs. Les chercheurs étudiant la créativité s’entendent à ce propos. Une enquête réalisée auprès de 143 chercheurs spécialistes de la créativité a mis en évidence un large consensus à propos de l’ingrédient numéro un nécessaire à l’accomplissement créatif11. Et c’était précisément le type de persévérance et de résilience produit par l’état d’esprit de développement.
Vous pouvez demander à nouveau, comment une seule croyance peut-elle mener à tout cela – l’amour du défi, la croyance dans l’effort, la résilience face aux revers, et un plus grand succès (plus créatif !) ? Dans les chapitres qui suivent, vous verrez précisément comment cela se produit : comment les états d’esprit changent ce pour quoi les personnes se battent et la façon dont elles considèrent la réussite. Comment ils changent la définition, la signification et l’impact de l’échec. Et comment ils changent au plus profond la signification de l’effort. Vous verrez comment ces états d’esprit entrent en jeu à l’école, dans les sports, sur le lieu de travail, et dans les relations. Vous verrez d’où ils viennent et comment ils peuvent être changés.
DÉVELOPPEZ VOTRE ÉTAT D’ESPRIT
Quel état d’esprit avez-vous ? Répondez à ces questions au sujet de l’intelligence. Lisez chaque affirmation et décidez si vous êtes plutôt en accord ou plutôt en désaccord avec elle12.
Votre intelligence est quelque chose de très caractéristique vous concernant et que vous ne pouvez pas beaucoup changer.
Vous pouvez apprendre de nouvelles choses, mais vous ne pouvez pas vraiment changer votre niveau d’intelligence.
Peu importe votre degré d’intelligence, vous pouvez toujours un peu le changer.
Vous pouvez toujours modifier substantiellement votre niveau d’intelligence.
Les questions 1 et 2 sont les questions liées à l’état d’esprit fixe. Les questions 3 et 4 reflètent l’état d’esprit de développement. Avec quel état d’esprit êtes-vous le plus en accord ? Vous pouvez être un mélange des deux, mais la plupart des gens penchent en faveur de l’un ou de l’autre.
Vous avez également des croyances au sujet d’autres capacités. Vous pourriez substituer « talent artistique », « capacités sportives » ou « compétence en affaires » à « intelligence ». Essayez de le faire.
Et pas seulement au sujet de vos capacités ; de vos caractéristiques personnelles également. Lisez ces affirmations au sujet de votre personnalité et de votre caractère et décidez si vous êtes plutôt en accord ou plutôt en désaccord avec elles.
Vous êtes un certain type de personne, et on ne peut pas faire grand-chose pour changer cela.
Peu importe le genre de personne que vous êtes, vous pouvez toujours changer de façon substantielle.
Vous pouvez faire les choses différemment, mais les composantes importantes de la personne que vous êtes ne peuvent pas vraiment être changées.
Vous pouvez toujours changer les aspects fondamentaux de la personne que vous êtes.
Ici, les questions 1 et 3 sont les questions liées à l’état d’esprit fixe et les questions 2 et 4 reflètent l’état d’esprit de développement. Avec lesquelles étiez-vous le plus d’accord ?
Était-ce différent de votre état d’esprit concernant l’intelligence ? Cela se peut. Votre « état d’esprit sur l’intelligence » entre en jeu quand les situations impliquent les habiletés mentales.
Votre « état d’esprit sur la personnalité » entre en jeu dans les situations qui impliquent vos caractéristiques personnelles – par exemple, la mesure dans laquelle vous êtes fiable, coopératif(ve), bienveillant(e), ou compétent(e) socialement. L’état d’esprit fixe vous rend soucieux(se) de la façon dont vous serez jugé(e) ; l’état d’esprit de développement vous rend soucieux(se) de vous améliorer.
Voici encore quelques autres façons de penser aux états d’esprit :
Pensez à quelqu’un dont vous savez qu’il est imprégné par l’état d’esprit fixe. Pensez à la façon dont il essaie toujours de faire ses preuves et à sa sensibilité au fait d’avoir tort ou de faire des erreurs. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi il était comme ça ? (Êtes-vous vous-même comme ça ?) Maintenant, vous pouvez commencer à comprendre pourquoi.
Pensez à quelqu’un dont vous savez qu’il maîtrise bien l’état d’esprit de développement – quelqu’un qui comprend que les qualités importantes peuvent être cultivées. Pensez aux façons dont il fait face aux obstacles. Pensez aux choses qu’il fait pour se développer. Trouvez quelques-unes des choses que vous pourriez vouloir changer en vous ou des domaines dans lesquels vous aimeriez progresser.
Très bien. Maintenant, imaginez que vous avez décidé d’apprendre une nouvelle langue et que vous vous êtes inscrit(e) à un cours. Après quelques cours, le formateur vous appelle devant la classe et commence à vous poser des questions à brûle-pourpoint.
Adoptez un état d’esprit fixe. Votre capacité est en jeu. Pouvez-vous sentir tous les regards pointés sur vous ? Pouvez-vous voir le visage du formateur qui vous évalue ? Sentez la pression, sentez votre ego se hérisser et chanceler. Que pensez-vous et ressentez-vous d’autre ?
Maintenant, adoptez un état d’esprit de développement. Vous êtes un(e) débutant(e) et c’est la raison pour laquelle vous êtes là. Vous êtes là pour apprendre. Le professeur est une ressource pour l’apprentissage. Sentez la pression vous quitter ; sentez votre esprit s’ouvrir.
Le message est : vous pouvez changer votre état d’esprit.
I Appelée Aha ! Experience en anglais et assez difficile à traduire (NdT).
Quand j’étais jeune, je voulais trouver le prince charmant. Très beau et couronné de succès. Un beau parti. Je voulais une carrière prestigieuse, mais rien de trop difficile ni de trop risqué. Et je voulais que tout cela vienne à moi comme validation de ce que j’étais.
Il aurait fallu beaucoup d’années avant que je sois satisfaite. J’ai trouvé un type génial, mais il était encore en devenir. J’ai une super carrière, mais honnêtement, c’est un défi constant. Rien n’a été facile. Mais alors, pourquoi suis-je satisfaite ? J’ai changé mon état d’esprit.
Je l’ai changé en raison de mon travail. Un jour, ma doctorante, Mary Bandura, et moi essayions de comprendre pourquoi certains étudiants étaient si motivés à prouver leur capacité, alors que d’autres pouvaient ne pas s’en préoccuper et apprendre. Nous avons soudain réalisé qu’il y avait deux significations à la capacité, et non une seule : une capacité fixe qui doit être prouvée, et une capacité variable qui peut être développée par l’apprentissage.
C’est ainsi que sont nés les états d’esprit. J’ai immédiatement su lequel j’avais. J’ai compris pourquoi j’avais toujours été aussi préoccupée par les erreurs et les échecs. Et j’ai reconnu pour la première fois que j’avais le choix.
Quand vous adoptez un état d’esprit, vous entrez dans un nouveau monde. Dans un monde – celui des traits fixes –, la réussite consiste à prouver que vous êtes intelligent(e) ou doué(e). À valider ce que vous êtes. Dans l’autre – le monde des qualités changeantes –, il est question de se déployer pour apprendre quelque chose de nouveau. De se développer.
Dans un monde, l’échec consiste à essuyer un revers. À obtenir une mauvaise note. À perdre une compétition. À se faire virer. À être rejeté. Il signifie que vous n’êtes pas intelligent(e) ou pas doué(e). Dans l’autre monde, l’échec consiste à ne pas se développer. À ne pas atteindre les choses qui comptent pour vous. Il signifie que vous n’accomplissez pas votre potentiel.
Dans un monde, l’effort est une mauvaise chose. Comme l’échec, il signifie que vous n’êtes pas intelligent(e) ou pas doué(e). Si vous l’étiez, vous n’auriez pas besoin d’effort. Dans l’autre monde, l’effort est ce qui vous rend intelligent(e) ou doué(e).
Vous avez le choix. Les états d’esprit sont seulement des croyances. Ce sont des croyances puissantes, mais elles sont seulement dans votre tête, et vous pouvez les changer. Pendant votre lecture, pensez à ce que vous voudriez atteindre et à l’état d’esprit qui vous y amènera.
Benjamin Barber, un éminent sociologue, a un jour dit : « Je ne divise pas le monde entre les faibles et forts, ou entre les succès et les échecs. […] Je divise le monde entre les apprenants et les non-apprenants. »13
Qu’est-ce qui, sur Terre, pourrait faire de quelqu’un un non-apprenant ? Tout le monde est né avec un intense désir d’apprendre. Les enfants en bas âge développent quotidiennement leurs compétences. Pas seulement les compétences ordinaires, mais aussi les tâches les plus difficiles d’une vie, comme apprendre à marcher et à parler. Ils ne décident jamais que c’est trop dur ou que l’effort n’en vaut pas la peine. Les bébés ne s’inquiètent pas de faire des erreurs ou de s’humilier. Ils marchent, ils tombent, ils se relèvent. Ils vont simplement de l’avant.
Qu’est-ce qui est susceptible de mettre un terme à cet apprentissage exubérant ? L’état d’esprit fixe. Dès que les enfants s’avèrent capables de s’évaluer, certains d’entre eux deviennent effrayés par les défis. Ils attrapent peur de ne pas être intelligents. J’ai étudié des milliers de gens depuis la maternelle, et il est stupéfiant de voir combien ceux qui rejettent une occasion d’apprendre sont nombreux.
Nous avons donné un choix à des enfants de 4 ans14 : ils pouvaient soit refaire un problème facile, soit en essayer un plus difficile. Même à ce jeune âge, les enfants avec l’état d’esprit fixe – ceux qui croyaient dans les traits fixes – s’en sont tenus au problème sans danger. Les enfants qui sont nés intelligents « ne font pas d’erreurs », nous ont-ils dit.
Les enfants avec l’état d’esprit de croissance – ceux qui croyaient qu’ils pouvaient devenir plus intelligents – ont trouvé que c’était un choix étrange. Pourquoi me demandez-vous ça, Madame ? Pourquoi quelqu’un voudrait-il continuer à faire le même problème encore et encore ? Ils ont choisi des problèmes difficiles les uns après les autres. « Je meurs d’envie d’y arriver ! », s’est exclamée une petite fille.
Ainsi, les enfants avec l’état d’esprit fixe veulent s’assurer qu’ils réussissent. Les gens intelligents devraient toujours réussir. Mais pour des enfants avec l’état d’esprit de développement, le succès concerne le développement personnel. Il porte sur le fait de devenir plus intelligent.
Une adolescente de cinquième (12-13 ans) l’a bien résumé. « Je pense que l’intelligence est quelque chose pour laquelle vous devez travailler […] elle ne vous est pas simplement donnée. […] La plupart des enfants, s’ils ne sont pas sûrs d’une réponse, ne lèveront pas leur doigt pour répondre à la question. Mais ce que je fais d’habitude, c’est pourtant lever mon doigt, parce que, si j’ai tort, mon erreur sera corrigée. Ou alors je lèverai mon doigt et dirai : “Comment pourrait-on résoudre ce problème ?” ou “Je n’arrive pas à ça. Pouvez-vous m’aider ?”. Rien qu’en faisant ça, j’augmente mon intelligence. »15
C’est une chose de ne pas s’attaquer à un problème. C’en est une autre de ne pas saisir une occasion qui est importante pour votre futur. Pour voir si cela se produirait, nous avons tiré profit d’une situation peu commune16. À l’université de Hong Kong, tout se fait en anglais. Les cours sont en anglais, les manuels sont en anglais, et les examens sont en anglais. Mais certains étudiants qui entrent à l’université ne sont pas à l’aise en anglais. Cela se comprendrait donc qu’ils s’empressent de faire quelque chose à ce sujet.
Alors que les étudiants arrivaient pour s’inscrire en première année, nous savions lesquels n’étaient pas habiles en anglais. Et nous leur avons posé une question-clé : si les professeurs proposaient un cours pour les étudiants qui doivent améliorer leurs compétences en anglais, est-ce que vous le suivriez ?
Nous avons également mesuré leur état d’esprit. Nous l’avons fait en leur demandant dans quelle mesure ils étaient d’accord avec des affirmations comme celle-ci : « Vous avez une certaine quantité d’intelligence, et vous ne pouvez pas vraiment faire grand-chose pour la changer. » Les gens qui sont d’accord avec ce genre d’affirmation ont un état d’esprit fixe.
Ceux qui ont un état d’esprit de développement sont d’accord avec ceci : « Vous pouvez toujours sensiblement changer le niveau d’intelligence qui est le vôtre. »
Plus tard, nous avons regardé qui avait dit oui pour le cours anglais. Les étudiants avec l’état d’esprit de développement ont dit un oui énergique. En revanche, ceux avec l’état d’esprit fixe n’étaient pas très intéressés.
Croyant que la réussite est une question d’apprentissage, les étudiants avec l’état d’esprit de développement ont saisi leur chance. Mais ceux avec l’état d’esprit fixe n’ont pas voulu exposer leurs faiblesses. Au lieu de cela, pour se sentir intelligents à court terme, ils étaient disposés à mettre leurs parcours universitaires en danger.
Voilà comment l’état d’esprit fixe transforme des gens en non-apprenants.
Vous pouvez même voir la différence dans les ondes cérébrales des gens. Des gens avec les deux états d’esprit sont venus à notre laboratoire d’étude des ondes cérébrales à l’université de Colombia17. Alors qu’ils répondaient à des questions difficiles et obtenaient des feed-back, nous étions curieux de découvrir quand leurs ondes cérébrales montreraient qu’ils étaient intéressés et attentifs.
Les gens avec un état d’esprit fixe étaient intéressés uniquement quand le feed-back concernait leur capacité. Leurs ondes cérébrales ont montré qu’ils prêtaient une attention particulière quand on leur disait si leurs réponses étaient exactes ou erronées.
Mais quand ils étaient confrontés à de l’information qui pouvait les aider à apprendre, il n’y avait aucun signe d’intérêt. Même lorsqu’ils avaient une mauvaise réponse, ils n’étaient pas intéressés d’apprendre quelle était la bonne réponse.
Seuls les gens avec un état d’esprit de développement ont prêté une attention particulière à l’information qui pouvait enrichir leurs connaissances. Ce n’était que pour eux que l’apprentissage était une priorité.
Si vous deviez choisir, quelle serait votre priorité ? Plein de succès et de validation, ou des tonnes de défis ?
Ce n’est pas simplement en ce qui concerne les tâches intellectuelles que les gens doivent faire ces choix. Les gens doivent également décider quel genre de relations ils veulent : celles qui soutiennent leur ego ou celles qui les mettent au défi de se développer ? Quel est votre partenaire idéal(e) ? Nous avons posé cette question à de jeunes adultes18, et voici ce qu’ils nous ont répondu.
Les gens avec l’état d’esprit fixe ont dit que le (la) partenaire idéal(e) :
En d’autres termes, le (la) partenaire parfait(e) mettrait en valeur leurs qualités fixes. Mon mari dit qu’il avait l’habitude de se sentir comme ça, qu’il voulait être le dieu d’une religion individuelle (celle de sa partenaire). Heureusement, il a abandonné cette idée avant de me rencontrer.
Les gens avec l’état d’esprit de développement espéraient un autre type de partenaire. Ils ont dit que leur partenaire idéal(e) serait quelqu’un qui :
Bien sûr, ils ne voulaient pas des gens qui s’en prendraient à eux ou mineraient leur estime de soi, mais ils voulaient des gens qui stimuleraient leur développement. Ils ne supposaient pas qu’ils étaient des êtres totalement évolués et sans défauts qui n’avaient plus rien à apprendre.
Sans doute êtes-vous déjà en train de vous demander qu’est-ce qui se passe si deux personnes avec des états d’esprit différents se mettent ensemble ? Une femme avec l’état d’esprit de développement dit au sujet de son mariage avec un homme à l’état d’esprit fixe :
J’avais à peine fini d’ôter le riz de mes cheveux quand j’ai commencé à réaliser que j’avais fait une grosse erreur. Chaque fois que je disais quelque chose du genre « Pourquoi n’essaierions-nous pas de sortir davantage ? » ou « J’aimerais que tu me consultes avant de prendre des décisions », il était anéanti. Alors, plutôt que de parler de la question que j’avais soulevée, je devrais littéralement passer une heure à réparer les dégâts et à l’aider à se sentir à nouveau bien. En plus, il courait alors téléphoner à sa mère, qui l’a toujours couvert de l’adoration constante dont il semblait avoir besoin. Nous étions jeunes et juste mariés. Je voulais seulement communiquer.
Ainsi, pour le mari, l’idée d’une relation réussie – s’accepter complètement, sans critique – n’était pas celle qu’en avait l’épouse. Et pour l’épouse, l’idée d’une relation réussie – affronter les difficultés – n’était pas celle qu’en avait le mari. Le développement d’une personne était le cauchemar de l’autre.
Concernant le fait de régner du haut d’un piédestal et de vouloir être considéré comme parfait, vous ne serez pas étonné(e) que ceci soit souvent appelé « la maladie du PDG ». Lee Iacocca en a fait la mauvaise expérience19. Après son succès initial à la tête de Chrysler Motors, Iacocca ressemblait étonnamment à nos enfants de 4 ans avec l’état d’esprit fixe. Il continuait à sortir les mêmes modèles de voiture encore et encore, avec de simples changements superficiels. Malheureusement, c’était des modèles dont plus personne ne voulait.
En attendant, les compagnies japonaises repensaient complètement ce à quoi les voitures devaient ressembler et la façon dont elles devaient fonctionner. Nous savons comment tout cela a tourné. Les voitures japonaises ont rapidement envahi le marché.
Les PDG font face à ce choix tout le temps. Devraient-ils affronter leurs limites ou devraient-ils créer un monde où ils n’en ont aucune ? Lee Iacocca a choisi la deuxième alternative. Il s’est entouré de fidèles, a banni les détracteurs – et a rapidement perdu le contact avec la direction que prenait son domaine d’activité. Lee Iacocca était devenu un non-apprenant.
Mais tout le monde n’attrape pas la maladie du PDG. Beaucoup de grands patrons affrontent leurs limites de façon régulière. Darwin Smith, prenant du recul sur sa performance extraordinaire chez Kimberly-ClarkI, a déclaré : « Je n’ai jamais cessé d’essayer d’être compétent pour le poste. »20 Ces hommes, comme les étudiants de Hong Kong avec l’état d’esprit de développement, n’ont jamais cessé de prendre le cours de remédiation.
Les PDG font face à un autre dilemme. Ils peuvent choisir des stratégies à court terme qui stimulent les actions de la compagnie et les font ressembler à des héros. Ou ils peuvent travailler à une amélioration à long terme – en risquant la désapprobation de Wall Street alors qu’ils créent la base de la santé et de la croissance de l’entreprise sur le long terme.
Albert Dunlap, qui s’autoproclamait de l’état d’esprit fixe21, est intervenu pour remettre Sunbeam sur pied. Il a choisi la stratégie à court terme consistant à passer pour un héros à Wall Street. Les actions ont monté, mais l’entreprise est tombée en morceaux.
Lou Gerstner, à l’état d’esprit de croissance avéré22, a été appelé pour remettre IBM sur pied. Alors qu’il se mettait à l’énorme tâche consistant à réviser la culture et les politiques d’IBM, le cours des actions stagnait et Wall Street ricanait. On l’a qualifié de raté. Quelques années plus tard, pourtant, IBM dominait encore le secteur.
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