Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
De l’Audace, Mademoiselle, 1950-
Mémoires épicuriennes. 3
ISBN 978-2-923972-01-5
I. Titre.
PS8607.E387M453 2012 C843’.6 C2011-942406-1
PS9607.E387M453 2012
ISBN PAPIER : 978-2-923972-01-5
ISBN EPUB : 978-2-923972-25-1
Imprimé au Canada
Dépôt légal 1er trimestre 2012
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
© 2012, Les Éditions de l’Interdit
Un soir de novembre, alors que le froid et l’humidité de l’automne nous avaient atteints jusqu’à la moelle, on m’offrit de remplacer un serveur dans un bar bien connu de la métropole dont j’ignorais totalement l’existence. J’avais besoin d’argent et mon ami Carlos, que je connaissais depuis peu, savait que j’étais à la recherche d’un emploi. Comme je ne fréquente pas ce genre d’établissement, le domaine m’était tout à fait étranger. Il insista, me disant que ma beauté naturelle inviterait au pardon, pour n’importe quelle maladresse que je pourrais accidentellement commettre. Je me revêtis donc de ma robe noire dont la forme laissait suffisamment voir ma poitrine pour attirer l’attention même des plus vertueux et m’y rendis en vitesse.
À mon arrivée, je me précipitai séance tenante au bar. Carlos m’y attendait. Il me donna une formation d’à peine cinq minutes et vlan, j’étais déjà serveuse. Je n’avais qu’à servir la bière, pour le reste Max s’en occuperait, paraît-il. L’ennui, c’est que le Max en question était légèrement dans les « vap » et Carlos, pressé par ses affaires, ne semblait pas s’en soucier outre mesure. En résumé, il me laissa seule avec un gars, pour le moins qu’on puisse dire impotent, qui ne pouvait aucunement se concentrer à faire un black russian ou une vodka jus d’orange. Heureusement, un petit livret contenant toutes les recettes se trouvait attaché sous le comptoir. Je n’avais qu’à me pencher pour lire tout en exhibant généreusement ma poitrine afin que les pourboires se multiplient. À la moindre difficulté, je n’avais qu’à sonner le portier.
Les clients paraissaient satisfaits de mes services. Personne n’émit de commen-taires sur ma façon de servir qui parfois était démesurément sèche. Collés à moi comme des sangsues aussitôt que je répondais à l’affirmative à savoir si j’allais passer au vert. Je ne comprenais rien à leur charabia et je répondais tantôt oui, tantôt non. Quand la musique changea de rythme et que les portes du fond s’ouvrirent, je compris où j’étais : dans un club d’échangistes. Ouf! À l’entrée, les libertins prenaient un bracelet vert qui les identifiait et les autres, les voyeurs, un rouge. Je m’em-pressai d’enfiler un bracelet rouge dans chaque bras pour ne pas être importunée par cette harde de dépravés sexuels amateur de scoptophilie.
De moi-même, je ne me serais jamais aventurée, mais une fois sur place, pourquoi ne pas jouer au voyeurisme? Cela me donnerait matière à écrire sur le sujet si l’envie m’en prenait un jour. Je fermai mon bar comme prévu et parvins à me frayer un chemin jusqu’à la grande salle où se trouvaient des chambrettes séparées par une vitre transparente. Dans la première, un jeune homme d’à peine vingt-cinq ans, les fesses légère-ment appuyées sur un banc assez haut, remontait ses testicules d’une main et se masturbait de l’autre en attente d’une volontaire aspirante pour lui administrer des soins buccaux. Le pauvre, son bras de vitesse engorgé, il restait là jouissant des regards posés sur lui. Soudain, une femme dans la mûre trentaine s’avança et lui fit l’honneur de sa bouche pulpeuse en lui léchant le gland par petits coups de langue, puis elle engloutit le phallus tout entier en le macérant de sa salive et en le polissant de ses lèvres aspirantes comme pour en dégager tout le venin. Désireux de pousser les limites de la jouissance, l’homme se défit de l’emprise et attendit. Elle enleva sa tunique en la laissant tomber délicatement de chaque côté de son corps, puis se caressa les seins avec élégance. L’homme la tira vers lui en la retournant et prit possession de sa poitrine à pleine main en dirigeant son sexe droit vers sa fente tout humide du désir d’être pénétrée avec vigueur. Ce qu’il fit avec démence. Ouf! Au moment où il entra en elle, rien n’aurait pu l’en détacher. De ses deux mains, il la tenait par les hanches en frottant vivement son érectionnette dans son couloir à jouissances, tellement fort et tellement longtemps, que même dans un état de lubricité des plus profonds, elle n’aurait pu s’en délecter. Au bout d’un moment, elle voulut s’en détacher. Elle devint toute pâle et faillit en perdre connais-sance; elle tomba sur le matelas et lui, continua sa danse en elle jusqu’à ce qu’il jouisse. Dégoutée par cette scène, je changeai de chambre.
Je ne m’apercevais pas que mon tour de taille ainsi que mon décolleté en inspiraient plus d’un. Même si je portais un bracelet rouge à chaque bras, plusieurs me zyeutaient. Je poursuivis mon voyeurisme en m’attardant sur un couple très amoureux qui en invitait un autre à les rejoindre pour échanger des jouissances, disons-le, différentes. Il était clair que l’homme n’était pas armé pour satisfaire sa femme, il faisait plutôt office d’allumeur. Genre de relation dont le dildo est toujours occupé et sans cesse à renouveler. Les deux femmes s’en remirent à l’autre mâle, équipé comme un Africain. La blondinette, un peu affamée par le manque de prestance du membre de son compagnon, se jeta littéralement sur le bien membré en tournant autour de lui de façon agui-chante. De temps à autre, elle se caressait les seins et l’invitait à enfouir sa tête entre les deux. L’homme semblait attendre que la gourmande qu’il avait devant lui empoigne sa virilité de ses mains expertes et que de sa bouche, elle le vide de son liquide séminal. Ce qu’elle fit sans tarder. Elle commença par passer une main sous les testicules en les manipulant comme on le fait de boules chinoises, en bougeant adroitement les doigts. Puis, elle remonta la main, longeant le pénis qui, droit comme un soldat, attendait patiemment que lui vienne l’ordre de glisser en elle. Mais le cerveau ne capta pas cette demande immédiatement, et la dame dut glisser sa main sur sa vulve et de son majeur, activer son bourgeon de jouissances. Agenouillée devant lui, elle reprit le membre d’une main et le glissa à sa bouche brûlante de désir. Le tenant par les cuisses uniquement, ses lèvres comprimaient son sexe de mouvement en mouvement et de succion en succion, lui procurant ainsi mille plaisirs délectables et indescriptibles.
Durant ce temps, il lui peaufinait le bout des seins, éveillé comme au petit matin. Il la prit donc dans ses bras immenses et la coucha sur le dos. Il glissa ses doigts dans sa fente toute mouillée, longea deux doigts sur la paroi intérieure de son vagin comme pour trouver son point G. Au bout d’à peine cinq minutes, elle gémit comme si c’était la première fois et lui, profita de son immobilité dans la jouissance, pour la pénétrer suavement. Elle en parut toute bouleversée tellement sa satisfaction était grande. Lui continua sa course à la volupté, dansant en elle et lui faisant faire le tour du firmament dans la voie céleste de l’orgasme. Repus de jouissances, ils se regardèrent, le sourire aux lèvres tel un début de relation durable : pas un instant, elle n’avait regardé son compagnon, comme si elle en avait subitement perdu le souvenir. Les deux autres, oubliés, étaient restés cois sur la chose.
Je passai à un autre acte. Je prenais des notes. Non pas que je me complaisais dans ce voyeurisme, mais par de simples ramassis d’acquisitions visuelles sachant bien que je ne participerais jamais à ce genre d’expériences charnelles au vu et au su de tous. Le troisième couple sur lequel je m’attardai me surprit au point où, si j’avais été journaliste, j’aurais aimé leur passer une entrevue. L’homme, rasé de la tête aux pieds, était relativement grand et mince. La femme, les cheveux rouges et taillés à la garçonne, était costaude comme un joueur de football, mais le portait avec élégance. Ils étaient dans une salle un peu plus grande que les autres, où étaient suspendus : une mini-chaîne stéréo, un fouet, un masque, un poteau de danse, des anneaux, des menottes reliées à une barre de métal, deux costumes de cuir avec de multiples ouvertures à ne pas revêtir dehors en plein hiver.
Comme s’ils se donnaient en spectacle, appelons-les Liette et Hubert, saluèrent la vingtaine de personnes qui les regardaient. Sans minauderie, ils se départirent de leurs vêtements comme on retire la nappe de la table de la salle à manger. Puis Liette, affichant fièrement son corps de meneuse, appuya sur le bouton de l’appareil musical, faisant naître ainsi un rythme de départ. Elle s’appropria le poteau de danse de la main droite tout en le retenant de sa jambe gauche repliée et le pubis comprimé. Elle étendit ensuite le bras gauche et montra son coéquipier. Une minorité applaudit. Tous les deux s’exé-cutèrent sur la colonne de danse en effectuant des gestes très érotiques. Avec souplesse, elle pointa la jambe en l’air et la fit tourner autour du poteau tout en se rapprochant. Ainsi, les jambes ouvertes à 180 degrés, son vagin était complè-tement visible, on y voyait clairement ses petites lèvres de même que son clitoris proéminent. Il s’approcha d’elle et lui embrassa la vulve et glissa sa langue dans sa fente en exécutant lui-même une pirouette indescriptible qui se termina en un déhanchement des plus sexuels. Ensuite, elle prit une autre pose, la tête renversée en se retenant de ses jambes repliées, sa poitrine pendante du côté inverse, clin d’œil nouveau pour les spectateurs. Finalement, comme dernier mouvement, elle arriva à tenir le poteau de ses bras écartés et à placer ses jambes dans un angle de 90 degrés, tous applaudirent à mains levées. Buf!
Cela me fit rigoler.
Durant ce temps, Hubert revêtit ses vêtements de cuir et se suspendit par les pieds à la barre de métal, son sexe pendant jusqu’à ce que Lyette enfile des cuissardes à bretelles doubles entourant chacun de ses seins, une ceinture de métal retenant le tout. Aussi bizarre que cela puisse paraître, ce n’est qu’une fois habillés de leurs accoutrements qu’ils commencèrent à s’enflammer l’un l’autre. Lyette sortit le fouet et flagella Hubert qui en redemandait. Plus il recevait des coups, plus il était en érection; la violence de Lyette l’excitait au plus haut point. Il sortit ses pieds de la barre et attacha Lyette aux anneaux à l’aide de menottes. Elle aussi se laissa fouetter et à chaque coup qu’elle recevait, elle criait « encore, encore ». Il arrêta au troisième coup, mais ne la détacha pas. Il écarta plutôt ses jambes, les retint au sol par un instrument quelconque et, sans qu’elle ne puisse bouger le moindrement, la prit par-derrière et enfonça son sexe à l’intérieur d’elle en fouissant sans cesse pour qu’elle jouisse. Libertine comme pas une, elle demanda aux spectateurs si quelqu’un d’autre était intéressé à prendre la place d’Hubert. Un homme arriva, enfila un condom, et éjecta l’autre par terre. Lyette se sentit tout à coup vulnérable et regretta presque de l’avoir invité. Il prit Lyette par les hanches et lentement, il s’inséra en elle. Ce n’est pas ce qu’elle voulait. Elle lui cria « ordure, tu me fais du bien, ce n’est pas ce dont j’ai besoin. » Il comprit et, comme une bête sauvage, s’exécuta sans lui laisser de répits. À se faire farcir ainsi, cela lui procurait un immense bonheur et plus sa perversité était démente, plus elle aima. Lubrifié de partout, il la sodomisa, elle en cria de jouissances. Hubert la détacha, la coucha sur lui en la prenant par devant alors que l’autre la reprenait par-derrière. Hubert jouit le premier, Lyette la deuxième et l’autre n’en finissait plus de s’attarder en elle lorsqu’il cria jouissance durant que Lyette immobile jouissait à répétition de l’avoir soutenu à l’intérieur d’elle. Ouf!
Je continuai ma tournée, ne sachant plus si tout cela m’avait excitée ou non. Comment peut-on regarder des tas de gens baiser sans avoir la culotte mouillée? Pas convaincue. Je m’arrêtai sur un homme qui était déguisé en « Batman », mais avec une ouverture par-devant puis une autre par-derrière laissant voir tout son fessier. Couvert de la tête au pied, c’est sûr qu’il désirait être sous l’anonymat. Je l’observai en le suivant subrepticement. Il s’arrêtait là où des femmes plantureuses se trouvaient et tentaient de les séduire avec son sexe en érection qui, n’ayons pas peur des mots, désirait se faire manger tout en longueur et aspiré du chapeau jusqu’à la dernière goutte. Bizarrement, son sexe me semblait familier. Comme les lumières étaient tamisées, il m’était difficile de l’examiner à fond. Je le suivis en tentant de m’imaginer où se rendrait cet être costumé qui se promenait d’une salle à l’autre avec son engin dans les mains et que tous regardaient comme le bouffon de la place.
Soudainement, il ouvrit la bouche en s’excusant après avoir heurté quelqu’un de son coude. Je m’avançai vers lui, pas certaine de ce que je voyais. Plus je m’avançais, plus il reculait. Il tenta de s’échapper. Je criai : « arrêtez-le ». Un gars que j’avais servi au bar me le récupéra rapidement. Je m’approchai, lui enlevai le masque et m’aperçus que c’était mon compagnon de vie… affublé d’un bracelet vert… sensé suivre des cours de théâtre. Et VLAN pour notre dernière pièce.
La gifle que je lui flanquai l’envoya directement prendre une trajectoire qui le mena à l’appartement si bien que lorsque je revins chez moi, aucune de ses affaires n’y était. Un coup de vent avait tout ramassé. Maudit pervers!