Louisa Kern
nouvelle
Q = romance rose
QQ = libertinérotique
QQQ = pornobscène
Sandra B. est une putain.
Elle préfère putain à pute, allez savoir pourquoi. Mais elle peut bien choisir ses mots, au fond, ça ne change rien.
Vous la reconnaissez ? On la croise dans la rue, adossée aux voitures, jambe soulevée, cuisse offerte. Fataliste, elle ne guette même plus votre regard derrière le pare-brise. Et malgré son eau de toilette de supermarché, elle a toujours l’impression de puer. Votre gazole, à vous qui ne vous êtes pas arrêté. Ton sperme, à toi qui es déjà reparti.
Claudia F. est la femme de votre vie.
C’est vous qui le dites. En tout cas, vous le pensiez le jour où vous l’avez épousée. Vous l’avez rencontrée à l’aube de vos quarante ans. Vous étiez très épris l’un de l’autre. L’un dans l’autre aussi, pour être honnête. Désir toujours de mise : Claudia F. n’en finissait pas d’avoir envie de vous.
Elle se décrivait comme une femme passionnée, avait fait un nombre considérable d’expériences, des voyages exotiques et une carrière honorable. Belle femme, elle n’avait que le défaut de ses qualités : tout devait se conformer à ses projets. Y compris vous-même, son nouvel époux. Et à l’époque, souvenez-vous, vous n’y voyiez aucun mal, n’éleviez pas d’objection.
Peut-être Sandra B. a-t-elle eu la chance de vous rencontrer alors qu’elle n’avait pas quinze ans. Elle avait trouvé ce boulot pour se faire de l’argent de poche après le collège. De toute façon, elle n’aimait pas les cours, elle arrêterait l’année d’après. Autant se faire du blé, préparer son indépendance. Elle était barmaid dans un bistrot du 20e. Confectionnait des sandwichs, servait des bières. Vous lui avez tendu un billet. C’ ’’ ’