pour passer quinze jours en compagnie d’un maître spirituel à la manière de ces temps de retraite qui ouvrent une brèche dans notre univers quotidien.
pour aller plus loin, une bibliographie expliquée.
Ce livre a été écrit pour acquitter, partiellement, une dette de reconnaissance. En 2005, quelques semaines après son élection, le pape Benoît XVI promettait, s’il le pouvait, de venir en pèlerinage à Lourdes, en 2008, pour le 150e anniversaire des Apparitions. Il donnait aussi quelques orientations pour la célébration de ce jubilé. La promesse devait rester discrète, mais c’était un encouragement pour l’évêque de Tarbes et Lourdes que j’étais à l’époque.
Parmi ses titres, le pape est « serviteur des serviteurs de Dieu ». Peu après ses 50 ans, Joseph Ratzinger est appelé à interrompre sa carrière universitaire. Il devient archevêque de Munich. Il prend pour devise quelques mots de saint Jean : « collaborateur de la vérité ». La vérité a besoin de serviteurs, humbles et courageux. Quelques années plus tard et pour plus de vingt ans, il devient préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi : service d’autant plus austère qu’elle amène parfois à critiquer, voire à sanctionner.
C’est avec le même désintéressement que le cardinal Ratzinger accepta la charge de la catholicité, au service de ses frères dans l’épiscopat, mais aussi de tous les fidèles et, finalement, de tous ceux qui prêtent l’oreille à sa parole. « Pape » est le terme familier qui désigne le père. Désormais, le service de Joseph Ratzinger serait d’être père d’une multitude, le « Saint-Père », en sachant, tout comme celui dont il porte le prénom, que Dieu seul mérite en plénitude le nom de « père ».
Pendant quinze jours, nous regarderons et écouterons le pape Benoît XVI, depuis son élection (les trois premiers jours) jusqu’à la renonciation (dernier jour). Pour l’auteur de Foi chrétienne, hier et aujourd’hui, au cœur de la foi se trouve une Personne, Jésus, présent dans l’eucharistie (4e et 5e jours). En lui sont abattus les murs qui séparent eros et agapè, foi et raison (6e et 7e jours). Parce qu’il est la Vérité, le Christ invite à engager le dialogue avec tout homme : les païens, les musulmans, les juifs (du 8e au 10e jour). À l’image de son Maître, le serviteur des serviteurs de Dieu fut souvent un serviteur souffrant, objet de haine, éclaboussé par la honte (11e et 12e jours). La Documentation catholique intitula, à juste titre, le numéro consacré à son départ : « Le courage d’un pape » : il a puisé son courage dans l’espérance qui transparaît dans le sourire de Notre-Dame de Lourdes (13e et 14e jours).
À la fin de chaque journée, une courte phrase de l’Écriture est une invitation à prier. Le pape Benoît XVI a souvent répété qu’il n’était pas un mystique. Mais lui être fidèle, c’est se tourner vers Dieu. Ses encycliques portent sur les trois vertus théologales, foi, espérance et charité. Elles sont « théologales » parce qu’elles nous viennent de Dieu et nous unissent à lui.
Joseph Ratzinger est né un Samedi saint, le 16 avril 1927, à 4 heures du matin. Il fut baptisé le jour même, la « vigile » pascale et la bénédiction de l’eau baptismale ayant lieu, à l’époque, dans la matinée. Sa sœur Maria a cinq ans de plus que lui. Elle vivra près de son frère jusqu’à sa mort en 1991. Son frère Georg, de trois ans son aîné, prêtre lui aussi, dirigera pendant trente ans la chorale de la cathédrale de Ratisbonne, « Les moineaux de Ratisbonne ».
Le père étant gendarme, la famille déménage à plusieurs reprises sans quitter la Bavière : Marktl sur l’Inn, Tittmoning, Aschau sur l’Inn et, à partir de 1937, Traunstein. Joseph Ratzinger étudie au lycée, puis au petit séminaire.
En 1943, avec d’autres séminaristes, il fut enrôlé dans la DCA (Défense contre l’aviation), tout en continuant de suivre des cours. En 1944, il est appelé au Service du travail obligatoire et, avec quelques autres, refuse de s’engager dans la SS. On nous renvoya sous les quolibets et les jurons. Il est muté dans une caserne mais décide de rentrer chez lui. Il est prisonnier quelques semaines des Américains.
De 1945 à 1951, il étudie la philosophie, puis la théologie à l’université de Munich. La dernière année, il se prépare directement au sacerdoce. Il est ordonné, en même temps que son frère, le 29 juin 1951 et sert dans une paroisse pendant un an. Un an plus tard, il est nommé professeur au séminaire de Freising, ancien siège du diocèse de Munich. Il est reçu docteur avec une thèse sur saint Augustin.
De 1959 à 1977, il est professeur de théologie fondamentale et de théologie dogmatique, successivement, dans les universités de Bonn, de Münster, de Tübingen et de Ratisbonne (Regensburg, en allemand). Pendant le concile Vatican II, il est conseiller théologique du cardinal Frings, archevêque de Cologne. Il est nommé « expert », puis membre de la Commission théologique internationale. En 1972, il fonde la revue internationale de théologie, Communio.
1977 : Joseph Ratzinger est nommé archevêque de Munich-Freising et créé cardinal la même année. Il fait la connaissance du cardinal Karol Wojtyła au conclave qui élit le pape Jean-Paul Ier.
De 1981 à 2005, le cardinal Ratzinger est préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi et président de la Commission biblique internationale. Il participe activement à l’élaboration du Catéchisme de l’Église catholique. En 1991, il est atteint d’une hémorragie cérébrale dont les séquelles concernent surtout la vision. En 1992, il est élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques à l’Institut de France. Le pape Jean Paul II lui demande de rester à son poste tant que lui-même sera pape.
Deux documents feront polémique. En 1984, l’Instruction « sur quelques aspects de la “théologie de la libération” » met en garde contre l’orientation marxiste de certains mouvements. En 2000, la Congrégation publie une Déclaration « sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Église ». Le document réagit contre la tentation de relativisme doctrinal. Par ailleurs, la déclaration réserve la qualification « Église » aux communautés où est présente la succession apostolique. Les autres sont appelées « communautés chrétiennes ».
En 2002, le cardinal Ratzinger est nommé doyen du Sacré Collège. À ce titre, il préside les obsèques du pape Jean Paul II et organise le conclave pour l’élection du successeur.
Le 19 avril, le cardinal Ratzinger est élu au quatrième scrutin. Il prend le nom de Benoît XVI, dans la ligne de Benoît XV, le pape qui avait tenté d’abréger la Première Guerre mondiale. Le pape professait par ailleurs, depuis longtemps, une grande vénération pour saint Benoît et le monachisme. « Benoît », Benedictus : le monde a bien besoin de croire qu’il est béni !
Pour les années du pontificat, la notice procédera par thèmes, sans suivre la chronologie.
Peu après son élection, le pape Benoît XVI, âgé déjà de 78 ans, déclara qu’il ne voyagerait pas autant que son prédécesseur. Cependant, en plus des trente visites pastorales à travers l’Italie, il entreprit vingt-trois voyages apostoliques en vingt-quatre pays différents : pays européens, dont l’Allemagne (trois fois), mais aussi Afrique, Amérique du Nord, du Centre et du Sud, Proche-Orient, Australie. La France l’a reçu à Paris et à Lourdes en septembre 2008 : le motif du voyage était le 150e anniversaire des Apparitions de Lourdes. En 2011, ne pouvant s’y rendre lui-même, il a envoyé un message à la Station spatiale internationale.
Certains de ces voyages ont été marqués par des discours, tenus dans des instances non religieuses et dépassant le cadre du pays où ils étaient prononcés. Ainsi le discours de Ratisbonne, sur la raison et la foi, malgré la controverse qu’il a suscitée sur une citation malencontreuse ; aux Nations unies ; en France, au collège des Bernardins, sur la culture et la recherche de Dieu ; à Berlin, sur le droit, la justice et la paix ; à Londres, devant le Parlement.
Parmi les voyages, trois d’entre eux ont particulièrement marqué le Saint-Père : les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ). L’une d’elles avait lieu à Cologne l’été qui suivait son élection. Trois ans plus tard, les jeunes se rassemblaient à Sydney et, en 2011, à Madrid. Benoît XVI a donné aux veillées du samedi soir un caractère plus recueilli, en introduisant un temps d’adoration eucharistique. La perspective de ne plus être capable physiquement de présider la Journée mondiale de Rio de Janeiro l’été 2013 semble avoir été un des motifs qui ont abouti à la renonciation du mois de février.
Le pape Benoît XVI a publié trois encycliques : Deus caritas est, « Dieu est amour » en 2005 (voir le 6e jour) ; Spe salvi, « Sauvés dans l’espérance » en 2007 (voir le 13e jour) ; Caritas in veritate, sur le développement humain intégral en 2009. Lors de sa renonciation, il travaillait à l’encyclique sur la foi qui aurait complété la trilogie : foi, espérance, charité. Dans sa vision, les trois ne sont pas séparables : le chrétien croit en l’amour et la grande espérance s’appuie sur la certitude d’être aimé de Dieu, éternellement. Le pape François a repris le travail de son prédécesseur et l’a présenté, trois mois après son élection en 2013, dans l’encyclique Lumen fidei, « La lumière de la foi ». Le pape Benoît XVI a poursuivi la pratique des audiences publiques du mercredi. La catéchèse donnée à cette occasion porte, certains jours, sur la fête liturgique. Quand il revient d’un voyage apostolique, le pape en rend compte dans l’audience du mercredi qui suit. En dehors de ces cas particuliers, le pape a d’abord commenté les psaumes, à la suite de Jean Paul II. Il traita ensuite du Christ et de l’Église. Il présenta les grandes figures de l’Église, notamment saint Paul auquel il consacra vingt audiences. Pendant près de deux ans, il parla des Pères de l’Église. Il présenta quinze figures de saintes femmes, dont Jeanne d’Arc, et, dans les derniers temps, quelques saints du deuxième millénaire.
Durant ce pontificat, se sont tenus trois synodes ordinaires : en 2005 sur l’Eucharistie ; en 2008 sur la Parole de Dieu ; en 2012 sur la transmission de la foi. Ils ont donné lieu à trois exhortations apostoliques : Sacramentum caritatis en 2007 ; Verbum Domini en 2010. Le pape François a publié l’exhortation sur le synode de 2012, sous le titre Evangelii gaudium, « La joie de l’Évangile », en 2013. L’Afrique et le Moyen-Orient ont été évoqués dans deux synodes spéciaux qui, eux aussi, ont donné lieu à deux exhortations.
L’année Saint Paul, inaugurée avec le patriarche Bartholomeos (2008-2009), l’année sacerdotale (2009-2010) et l’année de la Foi (2012-2013) ont rythmé le pontificat. Plus économe en la matière que son prédécesseur, Benoît XVI a cependant procédé à deux béatifications notables : le cardinal John Henry Newman durant son voyage en Angleterre (2010) et le pape Jean Paul II en 2011.
Au plan œcuménique, Benoît XVI a poursuivi des relations privilégiées avec le patriarche de Constantinople. Ils ont prié ensemble à Istanbul, dans l’église du patriarche (2006). En Terre sainte, il a rencontré les représentants de toutes les confessions chrétiennes. Il a été accueilli au patriarcat grec orthodoxe et au patriarcat arménien. Les relations se sont réchauffées avec le patriarcat de Moscou, en attendant qu’une visite soit possible : un concert lui a été offert pour le 5e anniversaire de son élection. À Rome, il a reçu le catholicos arménien, le patriarche assyrien, des baptistes et même des mennonites.
L’Allemagne est un pays où les protestants et les catholiques sont en nombre à peu près équivalent. Comme universitaire, le pape connaissait bien les théologiens et exégètes protestants. Il partageait jusqu’à un certain point la quête spirituelle de Luther et, à la Congrégation pour la doctrine de la foi, il avait œuvré pour la déclaration commune, entre catholiques et luthériens, sur la justification (3e