Au retour de l’école… La place des parents dans l’apprentissage scolaire
Dyslexie et autres maux d’école – Quand et comment intervenir
J’ai mal à l’école – Troubles affectifs et difficultés scolaires
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
Béliveau, Marie-Claude, 1961-
Mieux vivre l’école… en 7 savoirs et quelques astuces
(La Collection du CHU Sainte-Justine pour les parents)
Comprend des réf. bibliogr.
ISBN 978-2-89619-256-4
1. Aptitude à la scolarité. 2. Succès scolaire. 3. Apprentissage, Troubles de l’. I. Titre. II. Collection: Collection du CHU Sainte-Justine pour les parents.
LB1132.B44 2011 372.21 C2011-940494-X
Illustration de la couverture : Marion Arbona
Conception graphique : Nicole Tétreault
Diffusion-Distribution au Québec : Prologue inc.
en France : CEDIF (diffusion)/Daudin (distribution)
en Belgique et au Luxembourg : SDL Caravelle
en Suisse : Servidis S.A.
Éditions du CHU Sainte-Justine
3175, chemin de la Côte-Sainte-Catherine
Montréal (Québec) H3T 1C5
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© Éditions du CHU Sainte-Justine 2011
Tous droits réservés
ISBN 978-2-89619-256-4 (imprimé)
ISBN 978-2-89619-438-4 (pdf)
Dépôt légal : Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2011
Bibliothèque et Archives Canada, 2011
Membre de l’Association nationale des éditeurs de livres
Ce livre, qui se situe dans la foulée des ouvrages que j’ai publiés précédemment, est inspiré de milliers d’histoires d’enfants que j’ai rencontrés jour après jour depuis plus de 25 ans. Ce sont eux et leurs parents que je tiens à remercier en premier lieu, parce qu’ils m’ont aidée à comprendre à quel point leur problématique est multifactorielle et pourquoi, dans ce contexte, il n’est jamais simple de répondre à la question « comment les aider ». À postériori, ce qu’ils m’auront appris de mieux, c’est qu’il faut prendre le temps d’écouter, de comprendre, de proposer, de réviser ses positions, de se questionner et d’agir, malgré les questions qui persistent.
Merci également à Luc Bégin, éditeur, pour avoir lancé ce projet et m’avoir accordé une fois de plus sa confiance et son inestimable soutien. Merci aussi à tous les membres de l’équipe des Éditions du CHU Sainte-Justine pour leur professionnalisme et le plaisir avec lequel ils travaillent… une ambiance plus qu’inspirante! Enfin, mes remerciements à Karine Busilacchi, précieuse collègue et amie, pour ses conseils, son aide et ses commentaires si pertinents. Un dernier merci à mes trois enfants et à ceux qui ont partagé avec moi quelques astuces tirées de leur propre histoire scolaire.
Avant-propos
Introduction
Savoir s’adapter…
Savoir s’adapter… au changement
Entrer à l’école, c’est d’abord accepter de sortir de chez soi
Le changement d’enseignant
Du côté des parents, il faut aussi savoir s’adapter
S’adapter, c’est continuer à grandir malgré les circonstances
Pour aider l’enfant à vivre le départ de l’enseignant
Savoir s’adapter… au stress
Une transition parfois difficile et source de stress
Du premier au dernier de classe : le stress de performance
Savoir s’adapter, c’est aussi gagner de l’autonomie
Des moyens pratiques pour atténuer le stress de performance
S’adapter à l’inconnu en situation de stress : les examens d’admission
Savoir s’adapter… à l’adversité
Faire face aux situations difficiles
Lorsque son enseignant ne l’aime pas
Faire face à la violence ou à l’intimidation à l’école
L’enseignant fait des fautes d’orthographe
Savoir rêver et renoncer quand il le faut
Rêver… du côté des enfants
La motivation scolaire : du rêve à la réalité
Rêver… du côté des parents
L’école à la maison
Et l’enfant doué?
La dérogation scolaire
Camp d’immersion pour l’apprentissage d’une langue seconde
Les jumeaux à l’école
Savoir renoncer
Rêver dans la réalité, c’est parfois devoir renoncer
Choisir son professeur : les deux côtés de la médaille
Savoir s’intégrer : respecter, partager, coopérer
Savoir respecter
Se respecter soi-même
Respecter ses pairs et s’intégrer socialement
Respecter les gens et l’autorité : « Je te vouvoie! »
Le code de vie
Quelles règles respecter?
Les bonnes manières
Des mots et des règles
Respecter le bien d’autrui
Savoir partager et coopérer
Prendre sa place sans prendre toute la place
Partager, coopérer, s’intégrer… un grand défi pour certains
Savoir apprendre
Comment apprendre?
Les systèmes de représentation mentale
Pour mémoriser…
Pour apprendre…
Les processus cognitifs dans le traitement de l’information
Stratégies d’enseignement et d’apprentissage
Des styles cognitifs aux styles d’enseignement et d’apprentissage
Réussir malgré des difficultés d’apprentissage: un véritable défi
Apprendre, c’est aussi faire des efforts, s’appliquer et persévérer
Place au langage!
Redonner sa place au langage, outil central d’apprentissage
Quand un retard de langage dégénère
Quelques conseils aux parents
Place à la lecture!
Place à l’écriture!
« Je clavarde, il tchatte » : une nuisance aux apprentissages scolaires?
Finalement, apprendre, c’est aussi s’exercer
Savoir étudier
Devoirs et travaux scolaires, ouf!
La place des parents dans l’apprentissage scolaire
L’enseignant, seul maître à bord
Étudier… comment faire?
Quand copier devient un moyen de réussir
Savoir s’organiser
Savoir s’organiser… dans l’espace
Savoir s’organiser… dans le temps
Trucs pour améliorer l’ambiance au moment des devoirs et des leçons
Savoir s’organiser… avec ses effets personnels
Savoir réussir pour mieux vivre l’école
Quand l’enfant a « mal à l’école »
Une place au sein du groupe
L’école en question…
Pour aider un enfant en difficulté à l’école
Conclusion
Annexe I • Portrait fonctionnel :
Troubles d’apprentissage
Annexe II • Portrait fonctionnel :
Trouble déficitaire de l’attention, avec ou sans hyperactivité
Ressources
Cet ouvrage a été conçu à partir de nombreux écrits que j’ai déjà publiés sous forme d’articles ou de livres. Sans en reprendre le contenu en détail, je vous propose aujourd’hui de revoir plusieurs de ces idées dans une perspective plus large afin de jeter un éclairage nouveau sur l’école. Dans ce contexte, le lecteur ne devra pas s’étonner de voir certaines notions traitées de façon plus générale que ce qu’il a pu lire antérieurement. J’ai voulu prendre un certain recul et présenter dans un même livre les facteurs qui, en plus de la question des apprentissages à proprement parler, contribuent à faire de la vie de l’écolier une période plus ou moins riche en terme de préparation à la vie d’adulte.
L’objectif étant de présenter une vision plus large du « mieux vivre l’école », j’invite le lecteur qui désire approfondir ces 7 savoirs, et en particulier le Savoir apprendre, le Savoir étudier et le Savoir s’organiser, à se référer aux ouvrages suivants publiés aux Éditions du CHU Sainte-Justine :
› Au retour de l’école… La place des parents dans l’apprentissage scolaire
› J’ai mal à l’école – Troubles affectifs et difficultés scolaires
› Dyslexie et autres maux d’école – Quand et comment intervenir
Mieux vivre l’école… Est-ce possible quand, depuis le début, tout est si compliqué pour Nicolas, Sandrine ou Mathieu? Il y a de nombreuses raisons qui rendent la vie scolaire éprouvante pour certains enfants. Plusieurs d’entre eux ne savent pas entrer en relation avec leurs pairs tandis que d’autres vivent trop de tensions à la maison pour profiter des richesses du milieu scolaire. De plus, nombreux sont ceux qui ne maîtrisent pas suffisamment le langage pour bien s’intégrer à l’école et y faire les apprentissages auxquels on tente de les initier. D’autres présentent des difficultés particulières sur les plans physique, socioaffectif ou psychiatrique, ce qui limite de façon générale l’acquisition de plusieurs habiletés et connaissances dans un milieu scolaire qui offre un enseignement traditionnel. Chez plusieurs enfants qui, pour toutes sortes de raisons, ont pris l’école en aversion, il suffit parfois d’une enseignante bien particulière, d’une « perle rare » en quelque sorte, pour que l’école prenne une tout autre perspective. Dans d’autres cas, c’est justement le départ inattendu d’une telle enseignante qui fait basculer la vie scolaire de celui qui, grâce à elle, réussissait relativement bien « malgré tout », c’est-à-dire malgré ses grandes difficultés.
Depuis le petit tracas sans conséquence grave jusqu’aux troubles d’apprentissage ou de comportement sévères, c’est toute la gamme des soucis, des préoccupations ou des simples questionnements qui est responsable des ombres sur la toile où, d’année en année, se dessine l’histoire scolaire des enfants. Pour traverser le mieux possible cette période, qui s’ajoute aux années préscolaires au cours desquelles on a posé les fondations, les écoliers ont besoin d’un coffre à outils qui soit le mieux garni possible, ainsi que d’un environnement scolaire qui réponde à leurs besoins. Chacun est unique et le seul fait d’évoluer dans des conditions très différentes sur les plans familial, économique et socioculturel accentue les différences qu’on observe entre les enfants quant à leurs forces et difficultés, et donc quant à la qualité de leur « coffre à outils », c’est-à-dire des moyens dont ils disposent pour affronter leur environnement et répondre aux attentes qu’on a envers eux.
Le coffre à outils de l’écolier, aussi minimal et déficitaire soit-il parfois, doit contenir un certain nombre d’habiletés dont nous rappellerons l’importance en les exposant sous la forme de savoirs à acquérir pour mieux vivre l’école. Comme tout apprentissage, celui de ces savoirs est influencé par l’équipement de base que possède l’enfant et par les conditions environnementales dans lesquelles il évolue.
Dans le présent ouvrage, nous vous proposons de détailler le contenu de ce coffre à outils dont l’enfant doit disposer pour que sa vie scolaire le mène vers une vie d’adulte satisfaisante, voire réussie, au cours de laquelle il pourra s’épanouir à la mesure de ses ambitions et de ses capacités. Parmi les sept savoirs que nous aborderons, nous discuterons d’abord de l’importance de savoir s’adapter à différents milieux pour s’intégrer et acquérir des attitudes favorables aux apprentissages. Tout au long de son parcours scolaire, l’enfant fait face à de multiples situations où il doit s’adapter aux changements, aux stress inhérents à la vie scolaire et même à l’adversité. Puis, l’enfant doit savoir rêver et renoncer quand il le faut pour pouvoir apprendre en se projetant dans un avenir imaginé et auquel il aspire, mais qu’il devra peut-être modifier tout au long de sa vie, en fonction de la réalité. De plus, pour bien vivre en groupe avec pairs et adultes, il est indispensable qu’il sache s’intégrer en apprenant à respecter les autres, les règlements et l’environnement dans lequel il évolue. Savoir s’intégrer est fondamental pour être en mesure de partager et de coopérer avec les autres. De plus, à l’extérieur comme à la maison, il faut savoir apprendre, étudier et s’organiser pour que l’école soit réellement un lieu d’apprentissage et d’intégration des connaissances. Apprendre, c’est réfléchir, analyser, prendre du recul pour mieux voir, prendre des décisions éclairées, étudier, s’organiser, choisir, renoncer, etc. Or, savoir réussir pour mieux vivre l’école suppose que l’on a intégré tous ces savoirs.
Pour compléter cette présentation, le lecteur trouvera à la fin de chacune des six premières sections une liste de comportements susceptibles d’indiquer la présence de difficultés. Les comportements mentionnés peuvent avoir d’autres explications que celles qui sont proposées ici. Toutefois, on peut penser que plus on relève de symptômes par rapport à un savoir, plus il est important de chercher des moyens d’aider l’enfant à acquérir des habiletés dans ce domaine.
À notre avis, la réussite scolaire dépasse largement l’obtention d’une note de passage! Réussir à l’école, c’est emmagasiner des connaissances et des habiletés qui seront utiles la vie durant.
En plus de tout cela, quelques trucs et astuces sont toujours utiles… autant de clins d’œil que feront les plus expérimentés à ceux qui se démènent et cherchent encore…
S’adapter à un nouveau milieu auquel on est invité à s’intégrer, c’est se conformer à ses règles, s’y habituer et s’accoutumer aux façons de faire qui le régissent. Tout parent qui conduit son enfant à l’école pour une première fois souhaite qu’il sache s’adapter à son nouveau milieu. Bien souvent, il a déjà une petite idée d’où en est son jeune sur ce plan parce qu’il l’a vu s’adapter ou tenter de le faire dans d’autres milieux, avant l’école. En effet, chez les grands-parents, chez des amis, à la garderie et même au parc, les enfants comme les adultes doivent constamment s’adapter à de nouvelles situations, à de nouveaux milieux et à de nouvelles personnes.
Au premier jour de la rentrée scolaire, les parents sont confiants ou inquiets, selon les expériences plus ou moins favorables que l’enfant a déjà à son actif. Quoi qu’il en soit, les parents doivent savoir que s’adapter, ça s’apprend! Même si l’enfant arrive moins solide sur ce plan, il continuera à développer cette habileté au fil des expériences qu’il vivra, expériences dans lesquelles il aura parfois besoin d’être accompagné. L’enfant qui a de bonnes capacités d’adaptation aura plus de facilité à s’intégrer et, de ce fait, il sera davantage en mesure d’acquérir des attitudes favorables aux apprentissages, dont la confiance, la détermination et la persévérance. Savoir s’adapter, c’est savoir « faire avec » les hauts et les bas d’un milieu qui a son fonctionnement propre, son système de règles, ses valeurs et des attentes plus ou moins différentes de celles que l’on connaît déjà. C’est donc entrer dans ce nouveau monde avec un minimum de confiance pour « demeurer soi » tout en cherchant à répondre aux attentes extérieures.
Savoir s’adapter à différentes situations n’est possible que si l’on possède un minimum de sécurité intérieure. Pour y arriver, il faut croire qu’on peut changer ses façons de faire et répondre aux attentes extérieures sans perdre son identité propre. Dans les pages qui suivent, nous illustrerons certaines situations qui exigent que l’enfant mette en œuvre ses habiletés d’adaptation, des situations où il doit s’adapter au changement, aux différents stress suscités par le milieu scolaire et à certaines circonstances plus difficiles, bref des situations où il doit faire face à l’adversité. À l’aube de la rentrée scolaire, le premier pas que les enfants et leurs parents doivent faire — et ce n’est pas le moindre — c’est de s’adapter à ce nouveau milieu qu’est l’école. Le passage de la maison à l’école, qui se fait tout à fait spontanément pour certains, s’avère très exigeant pour d’autres.
Pour les parents, la meilleure façon d’entrevoir la rentrée de l’enfant à l’école primaire, c’est sans contredit de faire confiance. L’année qui s’amorce apportera ses joies et ses peines qui, somme toute, contribueront largement au développement de l’enfant dans toutes ses facettes. Voilà ce qui compte d’abord.
Comme toute expérience, cette première année à l’école primaire porte en elle-même de nouvelles occasions d’apprendre et de se construire. En ce sens, apprendre à l’école dépasse largement l’acquisition de connaissances. L’enfant y apprend aussi à vivre avec les autres, à prendre sa place, à affirmer son point de vue, à découvrir et à tolérer les différences, à accepter les règles et à s’y conformer. Il devra s’adapter à un nouveau milieu, à de nouvelles personnes, à de nouvelles façons de faire. Pour les parents aussi, l’entrée à l’école est exigeante sur le plan de leur capacité d’adaptation, surtout quand c’est le premier enfant de la famille qui fait ce pas vers l’extérieur de la maison. Il est parfois difficile pour les parents de faire confiance à la fois à un milieu qu’ils ne connaissent pas et aux capacités d’adaptation de leur enfant, afin de le laisser ouvrir ses ailes sur le chemin des écoliers. Ce sont là les prémices du déploiement des forces de l’enfant.
Apprendre, c’est grandir, dans la mesure où les parents accompagnent l’écolier tout en gardant une juste distance. L’école, comme les devoirs et les leçons, c’est l’affaire de l’enfant! Bien sûr, les parents doivent superviser, accompagner, encourager, mais d’abord et avant tout, ils doivent viser l’autonomie de leur enfant, qui n’en sera que plus fier lorsqu’il constatera et montrera ce qu’il aura réussi à faire tout SEUL.
Les compétences déjà acquises par l’enfant lui seront d’autant plus utiles à l’école qu’il devra parvenir à les utiliser sans aide. Le meilleur service à lui rendre est donc de le soutenir dans ses efforts pour s’adapter et pour répondre aux demandes qui lui sont faites et auxquelles, en principe, il est capable de donner suite. Dans cette perspective, les parents ont un rôle déterminant à jouer en occupant la juste place qui leur revient, soit ni trop près ni trop loin.
Par ailleurs, au moment d’organiser des activités parascolaires — autre belle occasion d’aider l’enfant à s’adapter à différents milieux —, les parents ont intérêt à penser à long terme. Le moment venu, il leur faudra respecter les engagements pris au début de l’année, en revenant de vacances, quand toute la famille est pleine d’énergie. À la fin de l’hiver, quand les piles commencent à se décharger, il devient d’autant plus important de partager du temps de qualité avec son enfant, ce qui revient à investir dans de bonnes relations familiales. Pourquoi ne pas réserver les activités parascolaires pour la fin de semaine plutôt que de courir chaque soir après l’école? Les enfants aussi s’essoufflent. Savoir s’adapter, c’est aussi savoir vivre en respectant ses limites.
Voici quelques moyens pour soutenir les efforts d’adaptation de l’enfant à l’école et pour aider les parents à mieux vivre son passage de la maison à l’école.
Astuce
Faites de l’entrée scolaire une fête à venir en comptant sur un calendrier les jours précédant le « grand jour ». Le décompte des 10 derniers jours aidera l’enfant à anticiper le jour officiel de l’entrée à l’école et, pour celui qui contient mal sa hâte, à attendre.
Au nombre des situations où il faut s’adapter au changement, il y a celle qui se produit lors du départ de l’enseignant en cours d’année. Nous avons tous des souvenirs plus ou moins clairs de notre passage à l’école. Les enseignants qui nous ont marqués font souvent partie intégrante de nos nombreuses images du passé. Il n’est pas rare que l’on attribue nos réussites ou nos échecs à certains de ces enseignants, qui tantôt ont attisé notre désir d’apprendre et de nous surpasser ou qui, au contraire, ont éteint en nous un élan ou nous ont même parfois dégoûtés de l’école.
La relation qui s’établit entre l’enseignant et l’élève est souvent déterminante pour la réussite scolaire et, surtout, pour l’engagement de l’enfant à l’école. C’est vrai pour tous au début de l’école, et cela le demeure souvent durant tout le parcours scolaire pour ceux qui éprouvent des difficultés à apprendre ou à s’adapter à l’école.
L’enfant qui entre à l’école laisse peu à peu derrière lui ses « années magiques » durant lesquelles c’était principalement de ses parents qu’il recevait soins et affection. En accompagnant l’enfant vers sa vie scolaire, les parents acceptent de remettre un peu de leur autorité à ceux qui s’occuperont d’une partie importante de son éducation. Ce faisant, ils lui permettent de s’attacher à ces personnes qui feront désormais partie de son entourage immédiat.
Plus l’enfant a de la facilité à évoluer dans ce milieu, moins il a besoin de l’enseignant pour le guider. En revanche, l’enfant qui n’est pas sûr de lui ou qui éprouve certaines difficultés à apprendre ou à se lier avec les autres a besoin d’un plus grand soutien pour intégrer la nouveauté, s’adapter et apprendre. Les enfants sont donc très souvent dépendants de leur enseignant pendant les premières années d’école, certains ayant plus de mal que d’autres à acquérir l’autonomie nécessaire à la vie scolaire. L’engagement de l’enfant à l’école est généralement lié au fait que l’autorité parentale a bien été transférée à l’enseignant, cette nouvelle personne qui va devenir un pôle de référence très important.
On connaît le lien qui relie l’affectivité et les capacités d’apprentissage. C’est pourquoi le départ d’un professeur en cours d’année est si souvent vécu comme une grande perte pour l’enfant, particulièrement s’il est plus « vulnérable », c’est-à-dire s’il vit des difficultés d’apprentissage ou d’adaptation. Durant ce qui constitue parfois un véritable deuil, qui doit être vécu étape par étape, l’enfant a besoin qu’on prenne au sérieux ses sentiments.
Dans un premier temps, la motivation pour l’école découle du lien entre l’enfant et son enseignant. En général, le jeune écolier veut apprendre à lire, à écrire et à compter, mais dépend beaucoup de son enseignant pour le faire. Plus il grandit, plus sa motivation lui permet de devenir autonome. Il est guidé par son enseignant tout en étant capable d’initiative, de créativité et d’autonomie, ce qui lui permet souvent de dépasser les exigences, d’établir ses propres liens entre ce qu’il apprend et ce qu’il connaît déjà, et de développer des stratégies d’apprentissage de plus en plus efficaces.
Pour d’autres, en revanche, l’absence de plaisir dans l’apprentissage empêche ce type de motivation intrinsèque, véritable moteur de l’apprentissage. La motivation demeure alors extrinsèque, c’est-à-dire que pour apprendre, les enfants demeurent dépendants des circonstances extérieures, ce que l’on observe souvent chez les plus jeunes ou chez ceux qui vivent des difficultés scolaires. Dans ces situations, le départ d’un enseignant qui a su créer une relation stimulante pour l’apprentissage revêt souvent un caractère plus dramatique. En effet, au-delà du départ de la personne, c’est souvent tout le monde scolaire qui se fragilise ou qui s’écroule en même temps que leur confiance et leurs raisons d’apprendre. À cause de leurs besoins particuliers et de leurs capacités d’adaptation parfois limitées, ce changement a souvent un effet plus marqué pour eux que pour d’autres enfants.
Par ailleurs, si l’un de ces enfants n’a pas vu s’établir cette relation pédagogique essentielle, il peut se sentir soulagé, autant que ses parents bien souvent, par le départ de l’enseignant. Le changement est alors porteur d’espoir : le nouvel enseignant parviendra peut-être à établir une relation qui redonnera à l’enfant le goût de fréquenter l’école.
En 5e année du primaire, Mylène s’est retrouvée dans la classe de… madame Frigon, la prof dont personne ne veut, car elle est très sévère, elle donne beaucoup de devoirs et ne fait pas de sorties avec sa classe. Peu de temps après, Mylène apprend toutefois que l’enseignante redoutée va prendre sa retraite sous peu. Bien qu’elle soit soulagée dans l’immédiat, cela a pour effet de reporter à plus tard son véritable début d’année, tout comme les autres élèves de la classe qui n’arrivent pas à s’attacher à une enseignante qui a déjà un pied dans la porte. Pour Mylène, qui se débrouille bien toute seule et qui n’accorde pas trop d’importance à la personnalité de l’enseignante, la situation n’est pas tellement dommageable. Elle n’a aucune difficulté d’apprentissage, elle est motivée à apprendre et elle est poussée par sa propre curiosité. Par contre, celles et ceux qui ont besoin d’une relation privilégiée avec l’enseignante pour apprendre trouvent difficiles ces deux premiers mois. Ils n’ont pas l’occasion d’établir une relation solide avec celle qui n’est responsable de la classe que de façon temporaire, surtout qu’ils connaissent sa réputation.
Comme leur enfant, les parents sont souvent inquiets à l’annonce du départ d’un enseignant en cours d’année, et ce, particulièrement quand leur enfant vit des difficultés scolaires. Généralement, ils ont travaillé très fort pour accepter de faire confiance et de déléguer au professeur une partie de leur autorité. Ils se demandent maintenant si le nouvel enseignant sera capable de faire aussi bien avec leur enfant que l’ancien. Cette anxiété rejaillit sur l’enfant, qui finit par se poser les mêmes questions.
Plus l’alliance parents-enfant-enseignant est solide, plus la perte de l’enseignant soulève de craintes. Les parents redoutent alors de voir réduit à néant tout ce qui avait été mis en place pour améliorer la qualité de la vie scolaire. La situation est la même quand ils voient partir un spécialiste (orthopédagogue, orthophoniste, psychoéducateur, etc.) qui est intervenu fréquemment auprès d’un enfant et qui doit confier ses dossiers à quelqu’un d’autre. L’enfant et ses parents peuvent s’inquiéter à l’idée de la disparition de ces pôles de référence et ils auront d’autant plus de mal à accepter le nouvel arrivant.
Pour minimiser les effets du départ d’un enseignant ou de l’un des intervenants en milieu scolaire, il est important, quand c’est possible, de bien le planifier. La plupart des enseignants prennent soin de préparer leur départ. Il est également crucial que les parents aident l’enfant pour que le passage d’un enseignant à l’autre se fasse dans les meilleures conditions possible.
Le départ d’un enseignant pendant l’année peut être un véritable traumatisme pour certains enfants, même quand ils n’ont pas de difficultés scolaires. Ils le vivent parfois aussi intensément qu’une grande peine d’amour. En fait, tout départ réveille des sentiments plus ou moins vifs qui rappellent, consciemment ou inconsciemment, des pertes ou des séparations antérieures.
Chez Charles, 7 ans, le départ de son enseignant de 2e année suscite une profonde détresse. Pour ses proches, ses réactions semblent tout à fait exagérées, ce départ ayant été bien préparé, et ce depuis plusieurs mois. Les parents sont consternés de voir la peine du petit garçon qui venait de traverser sans véritable réaction la séparation de ses parents et qui s’était adapté sans problèmes à une garde partagée survenue subitement. Ses parents se sentent impuissants et désemparés devant ces réactions qui leur semblent incompréhensibles : larmes, cauchemars, perte de vivacité, brusque désintérêt pour l’école… En fait, pour Charles, cette nouvelle perte réactive d’un coup tous les sentiments qu’il n’avait pas su reconnaître ni osé exprimer au moment de la séparation de ses parents. Elle lui permet de laisser sortir toutes les larmes qu’il avait contenues jusque-là pour éviter d’inquiéter ses parents, déjà aux prises avec une grande culpabilité.
Il ne faut donc jamais prendre à la légère le départ d’une personne aussi importante qu’un enseignant dans la vie d’un enfant. Lorsque les parents ont reconnu et accepté les émotions de leur enfant, ils peuvent l’accompagner dans cette étape qui se vit de façon plus ou moins dramatique pour l’instant.