Il y a plus de quarante ans, j’ai invité Brian Clement à se joindre à la Fondation Soleil à Genève, en Suisse. Mon intention était de lui demander de transmettre à l’Europe le message que la nourriture est une médecine, et c’est ce qu’il a fait. Avec son épouse, Anna Maria Clement, il a développé un programme complémentaire de santé avant-gardiste au célèbre Institut de santé Hippocrate. Cet extraordinaire programme de transformation devrait être utilisé comme modèle universel, de sorte que les gens du monde entier puissent se libérer plus efficacement de l’emprise de la maladie, de la confusion et de la dépression.
Le Dr Clement et son Programme de changement de vie Hippocrate nourrissent les gens en leur apprenant à assumer l’entière responsabilité de leurs choix de vie. L’approche globale du programme couvre la santé physique, mais aussi émotionnelle, mentale, ainsi que le bien-être spirituel. Au cours des dernières décennies, cela a été une grande joie pour moi de suivre l’évolution de ce programme. Les résultats que le Dr Clement et son équipe ont réalisés auprès de dizaines de milliers de personnes sont en tous points remarquables.
Une des plus grandes illusions de notre temps est la conviction qu’une bonne santé dépend d’éléments extérieurs à nous-mêmes, comme en témoigne l’utilisation massive de produits chimiques, de médicaments et de vaccins. Nous avons pollué notre corps et empoisonné l’environnement mondial, créant ainsi un cloaque interne et externe qui nous sépare du monde naturel et de notre état de santé naturel.
Le corps humain fonctionne à merveille sans apport d’aliments d’origine animale. Le poisson, la viande, les produits laitiers et les œufs n’ont pas leur place dans notre alimentation. L’élevage industriel et la fabrication de produits d’origine animale ont détruit aussi bien notre environnement que notre santé. Pendant des millénaires, les guérisseurs, les enseignants spirituels et les chamans ont propagé ce message: « Ne tuez pas ». Ce principe universel reçoit une validation contemporaine dans la recherche scientifique actuelle qui prouve que la mauvaise santé et la dégradation de l’environnement sont le résultat d’une dérogation à ce code fondamental. Il est temps de permettre à toutes les créatures, sans oublier les poissons, les crustacés et les autres habitants de l’océan, de vivre leur vie pleinement, tout comme nous aspirons à vivre la nôtre.
Je suis ravi de présenter ce livre de référence, intitulé Ces poissons qui tuent. Il expose la multitude de problèmes qui proviennent de la consommation de la faune aquatique et révèle comment la maladie physique peut se manifester, même lorsque nous mangeons des aliments généralement considérés comme sains. Si vous croyez que le poisson est un choix plus nutritif que la viande, allez plus loin et découvrez toute l’histoire! Lisez ce livre et vous comprendrez que ce que les commerçants alimentaires vous ont fait croire est une illusion. Non seulement le Dr Clement vous convaincra-t-il d’arrêter de consommer la faune aquatique, mais il vous expliquera pourquoi les régimes à base de plantes sont la seule nourriture qui convient aux êtres humains.
Ces poissons qui tuent est une contribution de premier ordre dans le domaine de la santé humaine. Ce livre a le potentiel de sauver des millions de vies, tant humaines qu’animales. Félicitations à vous, cher lecteur, qui avez la sagesse de chercher la vérité et de l’appliquer à votre vie. Puissiez-vous jouir de la paix, de la santé et de la joie dans tout ce que vous entreprenez.
Christian Tai Schaller, médecin, écrivain et pionnier dans le domaine de la médecine alternative et de la santé holistique
Crabe
Tortue
Écrevisse
Thon
Labre large de l’ouest de l’Atlantique
Lorsque les plus grands scientifiques marins du monde se réunissent à l’occasion de conférences internationales, leur principal sujet de discussion, en particulier depuis cinq ou six ans, porte sur les actions humaines qui déclenchent et accélèrent le déclin des habitats océaniques et des espèces qui y vivent. En avril 2011, lors d’une réunion à l’université d’Oxford, des scientifiques ont porté ces préoccupations concernant la santé des océans à un niveau supérieur.
Lors de cet événement, organisé conjointement par le Programme international sur l’état de l’océan et l’Union internationale pour la conservation de la nature, des dizaines de personnalités scientifiques mondiales sont arrivées à des conclusions qui devraient toucher tous les êtres humains sur la planète, mais surtout ceux qui continuent de manger sans trop réfléchir du poisson et d’autres animaux de l’océan. Les scientifiques affirment que nous assistons au déclin important de nombreuses espèces, au point où la ressource perd toute valeur commerciale, avec des taux inégalés de disparition régionale des habitats. Ils disent que nous pourrions perdre, en une seule génération, les espèces marines aussi bien que les écosystèmes marins dont ils dépendent pour leur survie196. « Si les différentes estimations que nous avons reçues se réalisent, a souligné le rapporteur officiel des Nations Unies pour l’environnement, Pavan Sukhdev, alors nous sommes en mesure de dire que d’ici quarante ans, tout le poisson aura disparu. Les experts des Nations Unies estiment que 30 % des stocks de poissons dans le monde sont déjà épuisés, les tendances actuelles permettant de prévoir que la quasi-totalité de la pêche océanique ne sera plus commercialement viable d’ici 2050197.
C’est une catastrophe écologique. Avec la surpêche qui se poursuit et les humains qui mangent certaines espèces jusqu’à leur extinction, nous voyons que les effets combinés du changement climatique, de la pollution anthropique et de la perte des habitats naturels commencent à produire un phénomène d’extinction de la vie océanique à l’échelle planétaire. Ce qui se passe dans nos océans aujourd’hui est comparable à ce qui a eu lieu lorsque les dinosaures et de nombreuses autres formes de vie se sont éteints. Les scientifiques ont établi qu’au moins cinq phénomènes d’extinction massive ont eu lieu depuis 600 millions d’années; cette nouvelle catastrophe pourrait bien les dépasser tous198.
Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?
Au cours de la conférence internationale de 2011, les scientifiques ont énuméré plusieurs considérations vitales qui expliquent la crise de la vie marine. Les points suivants résument leurs principales conclusions199.
Le changement climatique.
La perte d’habitat et la surpêche sont les principales causes de l’extinction des espèces marines, mais le changement climatique joue désormais un rôle dans l’accélération de ce processus. La hausse de la température de l’eau dans les océans oblige certaines espèces à descendre en eaux plus profondes et plus froides, où elles sont incapables de survivre. Dans le même temps, des changements dans les courants océaniques, ainsi que des températures plus chaudes causées par les changements climatiques, perturbent les approvisionnements alimentaires des animaux marins en contraignant des espèces entières à s’adapter et à survivre dans de nouvelles conditions climatiques.
Les activités humaines.
La vaste dégradation des écosystèmes causée par les activités humaines compromet la capacité naturelle de l’océan à s’adapter au changement climatique. Jusqu’à un certain point, les océans font preuve de résilience face au stress du changement climatique, mais les perturbations causées par l’homme ont miné cette capacité naturelle à s’adapter. Par exemple, la combinaison du ruissellement des terres agricoles imbibées de polluants, tels que les agents pathogènes et les perturbateurs endocriniens, a réduit la capacité de récupération des récifs coralliens. Dès lors, les écosystèmes des récifs ne sont plus dominés par le corail, mais plutôt par les algues, qui accélèrent la perte de diversité génétique des poissons et des autres animaux de l’océan.
La carence en oxygène.
Le réchauffement et l’acidification des océans, causés principalement par les activités humaines, ont accéléré le processus de l’hypoxie. Préjudiciable pour les organismes aérobies, l’hypoxie se produit lorsque la quantité d’oxygène dissous dans une masse d’eau est insuffisante. Il ne faut pas longtemps avant que cette privation d’oxygène déclenche une réaction en chaîne de phénomènes de mortalité massive, qui part des micro-organismes et s’étend à toute la chaîne alimentaire.
Les répercussions planétaires.
Parmi les pires scénarios sur l’océan qui ont déjà été prédits, plusieurs se sont déjà produits. On observe une diminution de la glace marine arctique, les calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique fondent, le niveau de la mer monte, et les quantités de méthane libérées à partir des fonds marins de la planète augmentent. Ces effets démultiplient d’autres problèmes, y compris l’apparition des efflorescences algales nuisibles, la perte de grandes espèces de poissons ayant une longue durée de vie, et la déstabilisation globale du réseau trophique dans les écosystèmes marins.
Les eaux profondes sont négligées
Lorsque l’on considère les effets des activités humaines sur la vie des océans, on oublie souvent les eaux les plus profondes, qui se trouvent à deux cents mètres et plus au-dessous du niveau de la mer. C’est le plus grand environnement de la planète, qui couvre environ la moitié de la surface de la Terre; or, depuis des siècles, il sert de dépotoir.
Dans le cadre d’une initiative appelée Recensement de la vie marine, des spécialistes des sciences de la mer de nombreux pays ont analysé l’ensemble du savoir humain sur le milieu des grands fonds marins et les effets des activités humaines. Les résultats de cette étude de grande envergure ont été publiés en août 2011200. Les conclusions suivantes sur les grands fonds marins et les quelque 10 millions d’espèces qui y vivent méritent d’être prises en compte lorsqu’on se demande s’il est justifié de consommer les animaux aquatiques.
Les rejets et déchets.
Depuis 1972, le rejet délibéré en mer de certaines substances à partir des navires est interdit en vertu d’un accord international. La pratique persiste, cependant, et on estime que 6,4 millions de tonnes de détritus et de déchets des vraquiers, des pétroliers, des bateaux de pêche et d’autres sources sont encore déversés chaque année dans les eaux profondes. Presque toutes les études scientifiques des fonds marins, effectuées à l’aide de véhicules télécommandés, détectent la présence de déchets. Les plus courants sont les plastiques, les canettes d’aluminium, le verre, le métal et les engins de pêche. « Les répercussions des déchets sur les habitats et la faune des grands fonds, rapporte une équipe scientifique, peuvent inclure la suffocation des animaux qui avalent les matières plastiques, le rejet de produits chimiques toxiques, la propagation des espèces envahissantes [et] des dommages physiques à la faune sessile, comme les coraux d’eau froide qui sont endommagés par les matières rejetées201. »
Les eaux usées, les dragues et les déchets miniers.
Un des sites examinés, l’eau profonde le long de la côte est des États-Unis, est un dépotoir pour les déchets industriels et municipaux, tels que les eaux d’égout brutes (il y en aurait environ 36 millions de tonnes). Les déchets contiennent des niveaux élevés de polluants organiques persistants qui produisent des « changements fauniques évidents dans le fond marin »202. Il reste encore à mesurer de façon adéquate la contamination des formes de vie marine qui se nourrissent de cette faune. Les déchets miniers toxiques se retrouvent le plus souvent dans les zones de haute mer situées près d’endroits comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
Les produits pharmaceutiques.
Jusqu’aux années 1980, l’île de Puerto Rico a donné des incitatifs fiscaux aux compagnies pharmaceutiques, ce qui les a encouragées à déverser leurs déchets dans les eaux profondes, à environ quarante miles au nord de l’île. Au moins 387 000 tonnes de déchets de médicaments, représentant environ 880 avions de ligne Boeing 747 remplis de toxines, ont été rejetées dans ce secteur. « Les études de la région utilisée pour l’élimination des déchets ont constaté des changements tangibles dans la communauté microbienne marine, écrit une équipe scientifique, et ces déchets sont extrêmement toxiques pour de nombreux invertébrés marins203. »
Ce type de déversement des déchets de médicaments est une pratique courante sur toute la planète. Les antibiotiques, les antidépresseurs, les pilules contraceptives, les médicaments pour traiter le cancer, les analgésiques et une foule d’autres déchets pharmaceutiques ont un effet de bioaccumulation dans la chaîne alimentaire. En plus de l’immersion intentionnelle de médicaments périmés, les résidus de médicaments se retrouvent dans l’océan à la suite des excrétions humaines rejetées dans les égouts.
Les déchets radioactifs.
Les résidus des essais d’armes nucléaires et de déchets médicaux radioactifs sont concentrés sur la côte et dans les canyons du nord-est de l’océan Atlantique, de plus petites évacuations des déchets radioactifs ayant eu lieu dans le nord-ouest de l’Atlantique ainsi que dans le nord-est et le nord-ouest de l’océan Pacifique. La plupart de ces déchets ont été stockés dans des fûts, puis chargés sur des navires et jetés par-dessus bord. Les sous-marins nucléaires coulés sont une autre source de déchets radioactifs de haute activité; elle représente une menace importante pour l’environnement.
Produits chimiques d’usage industriel.
Les toxines industrielles les plus fréquemment détectées sont des polluants organiques persistants, tels que les dioxines, les métaux toxiques, les pesticides, les herbicides et les plastiques, lesquels sont résistants à la dégradation et s’accumulent dans les sédiments océaniques. Ce n’est que tout récemment que l’on a commencé à mesurer les concentrations de contaminants dans les poissons. Les premiers résultats montrent la présence de dioxines dans les crevettes rouges (Aristeus antennatus) en Méditerranée occidentale et dans les poissons vivants à des profondeurs de 900 à 1500 mètres dans le nord-ouest de la Méditerranée. La bioaccumulation des hydrocarbures aromatiques polycycliques dans la vie aquatique est également attestée dans les eaux profondes du golfe du Mexique.
La pollution par les navires perdus. Plusieurs milliers de navires ont coulé au cours du dernier siècle. Comme personne n’en connaît le nombre, il est impossible d’évaluer correctement les problèmes de contamination possible. Durant la Seconde Guerre mondiale seulement, lors du conflit se déroulant dans l’Atlantique entre les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Allemagne, près de quatre mille navires militaires et marchands ont coulé, souvent dans les eaux les plus profondes. Beaucoup de ces navires transportaient des munitions qui constituent maintenant une source persistante de pollution toxique menaçant les écosystèmes et la vie aquatique. Les agents de guerre chimique que les forces navales de différents pays ont délibérément déversés dans tous les océans au cours du XXe siècle compromettent encore davantage ces formes de vie.
L’exploitation minière en haute mer et l’exploration pétrolière et gazière.
Les opérations minières ciblent les nodules de manganèse, qui poussent dans les fonds océaniques profonds depuis des millions d’années. Lorsque ces nodules sont supprimés, la faune locale disparaît. Les autres créatures sont enterrées sous des couches de sédiments de déchets miniers, ce qui provoque également leur disparition. « Les activités minières à grande échelle ont un réel potentiel d’extinction des espèces », rapportent les scientifiques204. D’autres cibles d’exploration comprennent les sulfures polymétalliques et le cobalt, qui résultent de l’activité hydrothermale sur le plancher océanique, principalement dans l’océan Pacifique.
Les activités océaniques de forage de pétrole et de gaz ont lieu maintenant jusqu’à 3000 mètres de profondeur. À ces profondeurs, les effets des accidents et de la pollution accidentelle sont amplifiés. Nous n’avons pas besoin de chercher plus loin que l’explosion, en avril 2010, de la plateforme Deepwater Horizon, dans le golfe du Mexique, pour voir ce qui se passe lorsque cinq millions de barils de pétrole brut sont déversés. Les dommages environnementaux causés par cet accident sont encore visibles et ressentis, et pas seulement sur les plages ou dans les eaux de surface. Comme le signalait le National Geographic News du 5 novembre 2010, les chercheurs ont trouvé des colonies de corail couvertes de pétrole à 1400 mètres de profondeur; cette pollution a entraîné la mort progressive des coraux et la disparition consécutive de la vie aquatique qui dépendait de ceux-ci205.
Les activités humaines produisent de nombreux effets microscopiques
Les études et les rapports mentionnés ci-dessus ont été effectués au niveau macroscopique. Or ces conclusions sont renforcées par des informations provenant d’observateurs au niveau microscopique. Considérons, par exemple, ce qu’on a appelé « l’hécatombe du grand homard » dans le détroit de Long Island, où les neuf dixièmes de la population de homards a disparu au cours de la dernière décennie.
Le 8 août 2011, le New York Times rapportait que le homard avait été victime de l’action humaine :
Les scientifiques ont accusé le réchauffement climatique, citant la hausse des températures dans les eaux basses où vivent les homards. Les autres coupables étaient des pesticides, tels ceux qui ont été utilisés pour combattre le virus du Nil occidental. L’hécatombe a commencé au moment où les restes de l’ouragan Floyd balayaient Long Island; les pêcheurs de homards croient que des pesticides ont alors été charriés dans le détroit206.
La surpêche et l’acidification des océans (causée par l’augmentation des concentrations de dioxyde de carbone dans l’atmosphère) créent les conditions idéales pour une explosion de la population des méduses. Le 8 juillet 2011, un éditorialiste du quotidien britannique The Guardian rapportait que les méduses ont remplacé le maquereau comme espèce prédominante dans la baie de Cardigan, à l’ouest du Pays de Galles. Voici le compte rendu de George Monbiot :
Jusqu’en 2010, le maquereau était la capture la plus fiable de la baie de Cardigan. L’année dernière, tout a changé [...] avec l’arrivée d’un nombre inimaginable de méduses. Il ne s’agissait pas des parapluies de cocktail transparents auxquels j’étais habitué, mais de créatures blanches solides et caoutchouteuses de la taille d’un ballon de football. Elles évoluaient à proximité de la surface de l’eau ou se profilaient, vastes et claires, dans les profondeurs. Il n’y avait guère un mètre cube d’eau qu’elles n’occupaient pas207.
Une semaine avant la chronique de Monbiot, un monstrueux essaim de méduses a coupé les deux réacteurs de la centrale nucléaire de Torness en Écosse, obstruant le système de prise d’eau. Quelques jours plus tard, un autre essaim de méduses forçait la fermeture d’une centrale nucléaire en Israël. Des rapports similaires de méduses envahissant l’espace vide de l’océan sont venus de tous les coins de la planète208.
L’acidification des océans nuit aux poissons d’une manière que les humains n’auraient jamais pu prévoir. Le 2 juillet 2011, Science News rapportait que l’acidité de l’eau diminue la densité des os des oreilles des poissons, ce qui empêche certaines espèces de percevoir des sons inquiétants. Parce qu’ils sont incapables de distinguer les sons des prédateurs qui approchent, ces poissons deviennent une proie plus facile.
« Depuis le début de la révolution industrielle, peut-on lire dans l’article, environ 142 milliards de tonnes de dioxyde de carbone d’origine humaine ont été dissoutes dans les océans de la planète. L’ajout de ce gaz dans l’eau de mer produit de l’acide carbonique et repousse l’eau près de l’extrémité acide de l’échelle de pH au rythme le plus rapide qui soit depuis 650 000 ans209. »
Enfin, pensez aux effets du réchauffement et de l’acidification des eaux de l’océan sur les cycles migratoires des poissons. Selon le quotidien britannique The Telegraph, depuis 2009, un poisson provoquant des hallucinations lorsqu’il est consommé a commencé à migrer dans les eaux britanniques de la Méditerranée et de la côte de l’Afrique du Sud. C’est une espèce de dorade appelée Sarpa salpa, un mangeur de plancton pourvu de rayures dorées qui empoisonne ses prédateurs au moyen d’un produit chimique hallucinogène. Les humains qui consomment ce poisson peuvent avoir de vives hallucinations pendant plusieurs jours. Le Telegraph rapporte un incident impliquant deux Français (de 40 et 90 ans) qui ont dû être hospitalisés après avoir mangé le Sarpa salpa. Quelques minutes après leur repas, ils ont eu des hallucinations auditives et ils ont été la proie de cauchemars pendant plusieurs jours210.
L’introduction par l’homme d’espèces envahissantes multiplie les problèmes
Les tentatives humaines de bricoler les écosystèmes en introduisant de nouvelles espèces de poissons ont souvent des effets inattendus qui accélèrent le déclin de la santé des animaux aquatiques de la planète. Pensez à ce qui s’est passé avec la carpe.
Pendant les années 1800, les pêcheurs du Midwest des États-Unis ont introduit la carpe commune, originaire d’autres régions du monde, dans l’écosystème, car ce poisson peut atteindre plusieurs dizaines de kilos dans la vase des lacs. Durant les années 1960, d’autres espèces de carpes, comme la carpe à grosse tête et la carpe argentée, ont été introduites dans les étangs américains pour qu’elles mangent les algues qui les envahissaient, principalement en raison du ruissellement des engrais utilisés sur les terres agricoles.
Le 2 juillet 2011, la revue Science News rapportait que ces espèces de carpes sont devenues envahissantes. Elles supplantent les autres poissons dans le Mississippi et d’autres systèmes fluviaux, tandis que les autres espèces sont proches de l’extinction. Ces carpes peuvent atteindre une centaine de kilos. Chaque jour, elles mangent jusqu’à 120 % de leur poids en plancton et en algues, appauvrissant davantage les sources de nourriture disponibles pour les autres espèces211.
Depuis 2010, les autorités municipales, étatiques et nationales ont fait des efforts désespérés pour empêcher la carpe de migrer en amont jusque dans les Grands Lacs. Le problème est que la carpe décimerait les populations de poissons indigènes vivant dans ces masses d’eau et catalyserait la baisse globale des écosystèmes. Des tentatives ont été faites pour arrêter la migration en érigeant des obstacles électriques sous-marins aux points où les systèmes fluviaux et lacs se rencontrent212. Compte tenu du bilan de fuite de ces poissons au fil des ans, il y a peu de raison de croire qu’ils ne finiront pas par envahir les Grands Lacs, ce qui démontre, encore une fois, que la nature, et non l’homme, sait ce qui est le mieux pour l’équilibre naturel de la vie.
Vos impôts accélèrent la progression des dommages
Les contribuables des États-Unis et d’autres pays contribuent à la surpêche et au déclin d’espèces entières de poissons, parce que leurs gouvernements fournissent d’importantes subventions à l’industrie de la pêche commerciale. En 2009, les chercheurs du Groupe de travail sur l’environnement (GTE) ont calculé que les contribuables américains distribuent près d’un milliard de dollars chaque année en subventions à la pêche provenant du gouvernement fédéral et des gouvernements des États fédérés. Selon le GTE, cette pratique « accélère l’effondrement en cours des stocks de poissons dans le monde entier et contribue à la dévastation de grandes espèces de poissons dans les océans »213.
Selon le groupe d’experts, près de la moitié des subventions aux pêcheurs sert à couvrir les coûts de carburant de la flotte de pêche. Contrairement aux camionneurs et aux automobilistes, les flottes de pêche commerciale demeurent exonérées des taxes fédérales et étatiques sur les carburants, ce qui encourage les entreprises de pêche à avoir autant de navires en mer que possible. Une analyse de la Banque mondiale a constaté que, en moyenne, chaque tonne de poisson capturé nécessite environ une demi-tonne de carburant214.
Selon les registres du Service des pêches marines nationales, depuis 1997, près du tiers des 269 stocks de poissons qui font l’objet d’une surveillance dans les eaux américaines sont surexploités. La situation dans le monde est comparable : il y a trop de bateaux de pêche traquant une ressource qui va en diminuant. Les gouvernements subventionnent surtout les pêcheurs de saumon et les pêcheurs de thon215. Ce genre de politique gouvernementale devrait faire partie des premières cibles de ceux qui cherchent à amener un changement dans la conscience écologique mondiale.
Les scientifiques proposent une liste de mesures faisant appel au bon sens
Les scientifiques ayant participé au Programme international 2011 sur l’état de l’océan ont mis sur pied un projet de recommandations pour les gouvernements du monde. Ils ont appelé à des « mesures d’urgence » pour aider à restaurer la structure et la fonction des écosystèmes marins :
1. Réduire la pêche à des niveaux compatibles avec la viabilité à long terme de la pêche et du milieu marin.
2. Fermer les pêcheries qui ne sont pas gérées selon des principes durables ou qui dépendent entièrement des subventions gouvernementales.
3. Mettre en place un système mondial exhaustif d’aires marines protégées pour préserver la biodiversité, renforcer la résilience et assurer une pêche écologiquement durable qui laisse une empreinte écologique minimale.
4. Prévenir, réduire et contrôler strictement les déversements dans le milieu marin de substances nocives ou toxiques pour les organismes marins.
5. Prévenir, réduire et contrôler strictement les apports de nutriments dans le milieu marin grâce à une meilleure gestion des terres et des bassins versants ainsi que du traitement des eaux usées.
6. Éviter, réduire ou, au minimum, universellement et strictement réglementer le pétrole, le gaz, les agrégats et l’extraction minière dans les océans.
7. Correctement et universellement appliquer le principe de précaution en inversant la charge de la preuve, afin que les activités ne procèdent que s’il est clair qu’elles ne nuiront pas à l’océan, qu’elles soient pratiquées seules ou en combinaison avec d’autres activités.