Ce qui fait la force de la femme,
c’est sa faiblesse apparente.
Ce qui fait la faiblesse de l’homme,
c’est sa force apparente.
Moi aussi… Moi… plus. C’est en écoutant des femmes et des hommes discutant entre eux que j’ai eu l’idée de ce titre. Lorsque plusieurs femmes sont réunies, celles-ci parlent généralement de leur vécu et surtout de leur vécu intime et relationnel, parfois professionnel. Les femmes échangent leurs états d’âme et elles le font souvent en même temps : « Hé ! Moi aussi, je vis ça comme ça. » ou « Oui, moi aussi, je pense ça. » « Le mien aussi, il est comme ça. » Les femmes se confirment et se confortent l’une l’autre dans leurs propos. Et elles semblent grandement apprécier cette façon de communiquer.
Lorsque plusieurs hommes discutent ensemble, ceux-ci parlent généralement de ce qu’ils ont fait et de leurs prouesses. Ils parlent rarement de leurs mauvais coups ou de leurs sentiments. Ils vont de surenchère en surenchère. « Ce n’est rien ça ; si tu m’avais vu l’autre jour… » « Le meilleur coup de ma vie, c’est quand… » Et de parler du plus gros saumon pêché, des performances de leur nouvelle voiture, de la victoire de leur équipe grâce à leur but, du coup d’argent qu’ils viennent de réaliser, des charmes de leur dernière conquête, de la façon dont ils dirigeraient le monde… Les hommes se comparent les uns les autres. Et ils semblent grandement apprécier cette façon de communiquer.
C’est lorsque la femme veut échanger avec l’homme qui adore argumenter que les difficultés de communication commencent et que se creuse un fossé d’incompréhension. Ce livre veut combler ce fossé et aider les hommes et les femmes à surmonter leurs difficultés pour vivre en plus grande harmonie.
Il existe environ 15 % de couples véritablement heureux. Qu’ont-ils de différent des autres couples ? Qu’ont-ils que les autres couples n’ont pas ? Que font-ils que les autres couples ne font pas ? Voici quelques caractéristiques que l’on retrouve chez les membres de ces couples. Évidemment, même si on constate des ressemblances chez les couples heureux observés par les psychologues, il n’existe pas encore de recette miracle infaillible. Peut-être un jour connaîtrons-nous les ingrédients de la recette du bonheur.
Ils préfèrent être heureux plutôt que d’avoir raison.
Ils ne sont pas sur la défensive.
Ils ne sont pas plus intelligents que les autres.
Ils contrôlent leurs expressions émotives.
Les sentiments positifs prédominent.
Ils ne croient pas à la toute puissance de la communication.
Ils reconnaissent leurs différences et les exploitent.
Ils acceptent de vivre certains conflits.
Ils ne recherchent pas le consensus à tout prix, mais ils sont appris à négocier.
Ils ne croient pas en l’existence de l’« âme sœur ».
Ils s’écoutent l’un l’autre patiemment.
Ils acceptent d’être influencés par l’autre.
Ils ne sont pas fusionnels.
Ils ne croient pas en la passion.
Ils existent l’un en dehors de l’autre.
Ils savent que parler des problèmes les amplifie.
Ils ne sont pas polarisés sur des attitudes défensives.
Ils ne cherchent pas à se faire comprendre de l’autre.
Ils cherchent à comprendre l’autre.
Ils ne veulent pas seulement survivre, ils veulent une véritable relation.
Ils ne doutent pas de l’amour et de la bonne foi de l’autre.
Ils savent que l’engagement est une conséquence, non une prémisse.
Pour eux, le mariage est un aboutissement, pas un but.
Ils savent que personne n’est à blâmer lors de conflits.
Ils savent que l’amour est ce qui survit à la passion.
L’un ne change pas radicalement pour faire plaisir à l’autre.
Leur relation amoureuse a progressé lentement, mais sûrement.
Il sait qu’il a choisi une femme comme les autres. Elle sait qu’elle a choisi un homme comme les autres.
Elle a choisi un homme qui la respecte. Il a choisi une femme qui lui fait confiance.
Ils partagent un grand nombre d’aspirations communes.
Ils viennent de milieux socio-économiques semblables.
Ils ne cherchent pas à savoir « Qui a commencé ? »
Ils ne comparent pas ce que l’un fait et l’autre pas.
Chacun s’affirme face à l’autre.
Les deux sont exigeants, pour eux-mêmes et pour l’autre.
Ils n’entretiennent pas d’illusion sur l’amour.
Ils aiment l’autre pour ce qu’il est, pas pour ce qu’il pourrait être.
Ils prennent chacun la responsabilité de leurs réactions émotives. Ils se remettent en question si nécessaire.
Ils acceptent que l’homme soit « l’homme », que la femme soit « la femme ».
Ils s’adaptent aux « défauts » de l’autre.
Ils sont fidèles.
Ils ne jouent pas à « donnant — donnant. »
Leur relation est basée sur une profonde amitié et non sur un complexe romantique (coup de foudre).
Ils ne développent pas de syndrome d’amour dans lequel l’un envahit et l’autre se protège.
Ils utilisent des techniques de rapprochement lors de conflits.
Ils ne cherchent pas à résoudre des problèmes insolubles.
Ils se mettent d’accord pour vivre avec des désaccords.
Ils ne sont pas exempts de conflits, mais ne se laissent pas envahir par ceux-ci.
Ils ont un ou des projets communs.
Ils ont une connaissance intime des « caprices » et des particularités de l’autre.
Ils s’expriment leur tendresse et leur estime réciproques.
Ils ont des contacts physiques asexués quotidiens.
Ils se rappellent leurs souvenirs heureux. Ils oublient les mauvais souvenirs.
Ils nourrissent leur amour de nombreux gestes attentifs.
Ils ont un compte d’épargne émotif.
Ils ne laissent pas les questions d’argent empoisonner leur couple.
Ils savent qu’il y a toujours deux responsables lors de disputes.
Ils apprennent à limiter les dégâts lors de désaccords.
Ils se traitent réciproquement comme ils traiteraient un invité.
Ils développent un sentiment de solidarité contre les « ennemis » naturels du couple : les beaux-parents, les enfants, les amis…
Ils expriment leurs besoins (sexuels et autres) de façon directe.
Ils s’entraident à réaliser leurs rêves personnels respectifs.
Ils ont appris à dire « merci ».
Ils ont des rituels familiaux.
Ils partagent une philosophie de vie commune.
Ils sont à l’écoute du langage corporel de l’autre.
Ils utilisent la technique de la sandwich lorsqu’ils ont un grief : un compliment, le grief, un compliment.
Ils démarrent leurs discussions en douceur.
Ils ne croient pas en la critique, même dite constructive.
Ils partagent équitablement les tâches ménagères.
Ils confirment les interventions de l’autre auprès des enfants.
Ils s’informent de leur journée avant de partir le matin.
Ils planifient une discussion dé-stressante en fin de journée.
Ils séparent vie professionnelle et vie privée.
Ils ont un rendez-vous hebdomadaire de 2 h 30 en tête-à-tête.
Ils savent que l’amour se construit.
Leur lit est un lieu de détente et un terrain de jeux, jamais un champ de bataille.
Ils partagent le pouvoir.
Ils ont une bonne estime d’eux-mêmes.
Les gens heureux en couples étaient des célibataires heureux.
Deux dangers guettent les lecteurs et lectrices de ce livre. J’appellerais le premier le danger de la polarisation et le deuxième, le danger de préjuger.
Le danger de la polarisation. Lorsque j’ai commencé à m’intéresser aux différences entre les hommes et les femmes, j’ai été ahuri d’en constater le nombre et les nuances parfois très subtiles de celles-ci. Je me suis même demandé si les femmes et les hommes pouvaient réellement vivre ensemble. Comment surmonter ce fossé d’incompréhension qui m’apparaissait infranchissable ? Devrions-nous retourner chacun sur nos planètes et ne nous échanger que des services essentiels ? Mais, en même temps, ces découvertes m’aidaient à mieux me comprendre et mieux comprendre, après coup, les femmes de ma vie. Ce qui me permit de leur pardonner toutes les fois où je m’étais soumis ou senti incompris, et de me pardonner par la même occasion. Nous étions tous de bonne foi : elles agissaient ainsi parce qu’elles étaient femmes. Et moi, j’agissais, et j’agis encore comme un homme de bonne volonté.
Mais, justement, le danger de la polarisation consiste dans le fait de s’asseoir sur ces différences et de les utiliser comme excuse pour ne rien faire, ne rien changer et, surtout, ne pas se changer soi-même. « Les hommes sont tous pareils. » « Les femmes compliquent tout. » « Cela ne me donne rien de lui parler, de toute façon, l’autre ne peut pas comprendre ce que je vis ou ce que je suis. » « Les psychologues disent que je suis normal(e) comme je suis, alors prends-moi comme je suis où… déménage. » Nous nous retrouvons alors chacun de notre côté de l’arène. C’est comme si les hommes et les femmes se retrouvaient sur un damier (ou en échiquier) et que l’un ne voulait jouer qu’aux dames et l’autre, qu’aux échecs.
Pour être heureux en couple, chacun doit apprendre les règles du fonctionnement de l’autre afin de pouvoir obtenir la satisfaction de ses besoins relationnels légitimes. Si, en tant qu’homme, j’apprends que la femme a besoin d’être détendue pour être réceptive à la sexualité, peut-être accepterai-je de participer davantage aux travaux ménagers, au lieu de continuer de croire que le sexe la détend comme moi ou de la traiter de frigide. Si la femme comprend que l’homme est hypersensible quant à son sentiment d’utilité, elle osera peut-être le complimenter plus souvent sur ses réalisations, si petites soient-elles, et récolter ainsi plus d’intimité, au lieu de croire qu’il ne fait finalement que son devoir et qu’il n’y a pas lieu de le récompenser pour autant. Dans les deux cas, c’est du conditionnement positif pur et simple, mais ça marche drôlement.
Mes trente ans de thérapie conjugale et mon expérience personnelle m’ont confirmé que le bonheur était hors de portée de ceux et celles qui cherchent à se faire comprendre par l’autre, qui veulent changer l’autre ou qui conditionnent leurs propres changements aux changements de l’autre. « Je te donnerai de l’affection que si tu fais ce que je veux. » « Tu auras du sexe si tu es gentil. » Aucun processus thérapeutique ne peut réellement être amorcé tant et aussi longtemps que la ou les personnes qui consultent ne mettent pas l’accent sur leur croissance personnelle plutôt que sur la croissance de l’autre. Aucun processus thérapeutique ne peut s’amorcer tant et aussi longtemps que la personne ne comprend pas qu’elle est la seule responsable de sa vie, de tout ce qui arrive dans sa vie, les bonnes comme les mauvaises choses. Aucune thérapie n’est efficace si la personne ne comprend pas que c’est elle qui doit changer, et non pas l’autre. Dans le cas d’un couple, chacun est le miroir de l’autre.
Pour reprendre l’exemple du damier (ou de l’échiquier), je dois devenir expert au jeu de dames ou d’échecs, i.e. me comprendre moi-même le plus possible, et, par la suite, mettre de côté mes connaissances du jeu dont je suis maintenant expert, pour observer attentivement le fonctionnement et les règlements de l’autre jeu. Je pourrai alors décider librement si je joue aux échecs ou aux dames avec l’autre. Si l’autre ne connaît que le jeu de dames, il n’en tient qu’à moi d’accepter ou non de jouer aux dames. Évidemment, si l’autre joueur connaît les deux jeux, nous pourrons négocier le jeu à jouer ou les jouer à tour de rôle. Les couples heureux arrivent même à créer un nouveau jeu en mixant les règles des deux jeux ou en inventant de nouvelles règles. Au lieu de mettre l’accent sur la victoire (avoir raison ou ne jouer que le jeu dont je suis l’expert), ces couples n’oublient jamais que le but du jeu, c’est d’avoir du plaisir (i.e. être heureux).
La société actuelle en valorisant, donc intensifiant, les caractéristiques féminines (communication, fusion, don de soi, relation, compassion…) au détriment des caractéristiques masculines (indépendance, puissance, sain égoïsme, action, rationalité…) favorise la polarisation et par le fait même la réaction défensive de l’homme. Cette polarisation mène à une impasse, car elle donne raison aux femmes contre les hommes ; elle cherche une victime après avoir identifié « le » coupable. Elle amène les femmes à donner de plus en plus tant au travail qu’à la maison, à exiger des hommes qu’ils changent, qu’ils fassent la même chose qu’elles, mais, paradoxalement, elles obtiennent de moins en moins des hommes, car ceux-ci, pour se protéger, réagissent en fuyant, en se repliant sur eux-mêmes et en créant des groupes d’entraide pour hommes non pas pour les aider dans leur croissance personnelle, mais pour mieux s’armer contre le « terrorisme de l’engagement », contre le « féminazisme ». Ce qui amène les féministes à accuser, avec raison, les hommes de ne pas vouloir s’engager. Et le cercle vicieux de s’emballer.
Apprendre à vivre à deux, en couple ou en société, c’est comme apprendre une nouvelle langue. Si je connais le français et l’espagnol, je peux communiquer dans ces deux langues et me faire comprendre par mon interlocuteur, même si celui-ci n’en comprend qu’une seule. Par contre, si mon interlocuteur parle lui aussi les deux langues, nous pourrons utiliser les subtilités de celles-ci pour nous apprendre mutuellement et mieux nous comprendre. Ainsi font les gens heureux et autonomes, ils n’imposent rien à l’autre : ils savent qu’ils ne parlent pas le même langage, mais cherchent à apprendre le langage de l’autre. Imposer sa langue ne fait que susciter suspicion et résistance.
Le danger de préjuger. À ceux et celles qui seraient portés à qualifier les différences décrites ici de stéréotypes, j’aimerais vous rappeler que les anthropologues nous confirment depuis longtemps que les sociétés dites « primitives » ou isolées, et récemment découvertes, présentent à peu de choses près les mêmes traits masculins et féminins décrits dans ce livre. Il y a certes des différences culturelles, mais il y a aussi une certaine universalité de ces traits. Est-ce la nature, ou la culture, qui conditionne nos comportements ? Difficile de répondre à cette question. Et si on disait que notre biologie constitue la charpente de la maison et la culture, sa décoration et son entretien.
Est-ce sexiste de reconnaître que 90 % des secrétaires sont des femmes ? Le véritable sexisme (ou paranoïa) ne serait-il pas plutôt la croyance que les hommes cherchent délibérément à maintenir les femmes dans des fonctions subalternes et sous-payées ? La vérité, biologique et psychologique, ne serait-elle pas que s’il y a plus de femmes secrétaires que d’hommes, c’est tout simplement parce que les femmes en possèdent les capacités et qu’elles peuvent, mieux que les hommes, remplir les tâches inhérentes à cette profession : « mener plusieurs tâches de front, des anecdotiques comme des essentielles ; être capable de changer de ton, d’expression, pour mieux se faire comprendre et entendre de ses interlocuteurs ; anticiper les besoins ; parler plusieurs langues… » Ne vaudrait-il pas mieux y reconnaître des talents spécifiquement féminins (comme la capacité de penser à tout en même temps et d’exécuter plusieurs tâches simultanément) et les rétribuer en conséquence plutôt que de dévaloriser cette fonction ? Pourquoi ne seraient-elles pas rémunéré au même titre que les contrôleurs aériens, les pilotes de lignes ou les architectes, professions essentiellement masculines, parce que nécessitant une capacité supérieure pour lire des plans, imaginer la troisième dimension et toujours savoir où est situé le nord ?
Quoique les étudiantes architectes soient aussi nombreuses que les étudiants, une seule femme sur dix pratique leur profession après être devenu mère. Ellen Willer pose la question suivante : « Elles se sont violemment faites évincer par des concurrents sans scrupules et pleins de préjugés sur les femmes ? Ou bien elles se sont finalement rendu compte qu’elles n’aimaient pas vraiment cette voie qu’elles s’étaient choisie ? » Pourquoi continuer à nier des spécificités reliées au sexe ou la supériorité de l’un ou l’autre sexe dans certains domaines ?
On ne peut gérer ce que l’on ne connaît pas ou ce dont on refuse l’existence. Cessons de percevoir l’autre sexe comme le sexe opposé et voyons-le de plus en plus comme le sexe complémentaire, sexe existant finalement pour nous faciliter la vie grâce à ses compétences et pour répondre à certains de nos besoins tout à fait naturels. La guerre des sexes ne se terminera que lorsque nous cesserons d’attendre que l’autre sexe se conforme à nos attentes et que lorsque nous mettrons véritablement en pratique le « Aime ton prochain comme toi-même », même s’il est différent. Heureusement, nous ne réussirons jamais à faire de l’autre notre sosie ; nous aurions trop à perdre.
Mais, par-dessus tout, cessons de croire qu’il faut nécessairement vivre en couple pour être heureux, car les hommes et les femmes ne sont pas faits pour vivre constamment ensemble. La vie de couple ne devrait pas dépasser 25 % de notre temps de vie, les trois autres 25 % étant consacré à notre profession, à notre rôle de parent et à notre vie privée faite de loisirs et de rapports humains asexués. La possibilité de vivre seul ou heureux nous donne justement la possibilité de choisir de vivre en couple… et heureux… parce que libre de choisir de vivre en couple. Vive le couple !