LUC COLLARD
SPORT
&
AGRESSIVITÉ
© Éditions DésIris, 2004
ISBN 9782364030473
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LES RAPPORTS du sport et de l’agressivité reposent sur un malentendu : l’idée que le sport serait avant tout un exutoire énergétique. Outre le fait qu’il faut alors se résoudre à ce que le tir à l’arc ou le curling, bien qu’olympiques, ne soient plus des sports, on doit accepter également que le bêchage de jardin ou la remontée des courses au troisième étage sans ascenseur en deviennent. Que l’exercice physique intense réduise après coup les réactions d’opposition à l’entourage est une hypothèse tout à fait soutenable. Une de mes étudiantes l’a récemment mesurée. Après avoir été filmée sur vingt minutes dans un duel d’équipes proche du handball, une partie des joueurs allait répéter des séries de trois cents mètres à vitesse maximum autour d’une piste d’athlétisme. L’intensité des courses était vérifiée par la prise du pouls, nécessairement proche de deux cent vingt moins l’âge. Les pratiquants enchaînaient les longueurs, avec une récupération intercourse égale à trois fois le temps mis pour atteindre les trois quarts de piste, jusqu’à épuisement total. Celui-ci était atteint dès lors qu’on pouvait noter une chute significative des performances chronométriques. D’autres joueurs étaient au repos et, lorsqu’on remit tout ce petit monde en demeure de reprendre la partie de handball, que pensez-vous qu’il arrivât ? Les pseudo-athlètes étaient si fatigués qu’ils étaient incapables de la moindre combativité, ils se traînaient sur le champ de jeu, épuisés, et encaissaient point sur point. Mais leurs conduites n’étaient finalement pas très « sport » – d’ailleurs, enchaîner des longueurs à pleine vitesse est un entraînement au sport, ce n’est pas le sport lui-même ; le sport n’est pas réductible à un simple drainage énergétique : un système de réussite particulier, des interactions originales, des rapports spécifiques à l’espace et au temps, etc., en constituent la logique interne. L’amoindrissement des conduites agressives est rarement l’eldorado du sportif. Dans l’expérience, l’épuisement des joueurs s’est principalement soldé par une baisse de la protection qu’ils exerçaient sur leurs partenaires (par neutralisation de leurs adversaires). Les interactions directes en un-contre-un sur le porteur de balle étaient encore d’actualité ; mais, sous le coup de la fatigue, les harcèlements sur les non-porteurs avaient quasiment disparu. Or, c’est dans le jeu sans ballon que siège la dynamique des duels collectifs. Autrement dit, l’agressivité dont pouvaient faire preuve les participants en pré-test servait indirectement de tremplin à la coopération !
La réussite sportive tient, dans la plupart des cas, aux capacités des joueurs à entretenir un niveau d’agressivité optimum tout au long du match et de la saison (c’est une des principales fonctions du dopage dans les sports avec interaction). L’agressivité n’est pas un mal que le sport permettrait d’éliminer par purge, mais une condition d’efficacité qu’il faut éduquer, entretenir et transférer d’une situation à l’autre ; du moins lors de la pratique1 des sports de combat, du hockey sur glace ou du moto-cross. En revanche, en patinage mixte ou en natation synchronisée, on s’imagine mal que l’agressivité puisse apporter un quelconque profit. Le sport est avant tout un corps de règles, éventuellement susceptibles de limiter l’expression de la violence physique. Il se met en scène sur la base d’actions dont la pertinence est motrice, c’est-à-dire que celles-ci ne peuvent être substituées à d’autres sans les vider de leurs sens. On peut remplacer l’action de la main d’un joueur d’échecs qui déplace un pion par un mouvement du coude, du menton, ou par substitution à la parole (il demande à quelqu’un dans le public de le faire à sa place), sans en altérer le sens. La pertinence du jeu d’échecs est de type combinatoire, non de type moteur : on peut d’ailleurs fort bien y jouer par téléphone, comme à la bataille navale. Bien que parfois organisés sous forme de compétitions et régis par des fédérations, les jeux de société ne sont pas des sports, pas plus que le footing du dimanche matin ou le bêchage de jardin à qui il manque, cette fois-ci, l’affrontement codifié sous forme de compétition et institutionnalisé2.
Ce n’est pas parce que le sport ne peut être considéré comme une simple catharsis de tensions physiologiques qu’il faut devenir « anti-sport ». Pour contrôler leur agressivité, les participants doivent en faire l’expérience. Le sport permet sans nul doute de canaliser son agressivité latente et offre d’excellentes occasions de s’autocontrôler. Par métaphore, on peut dire que ce n’est pas parce qu’un couteau est dangereux qu’il faut en interdire l’usage aux enfants ; apprendre à s’en servir est une forme d’éducation à la sécurité. Toutefois, il ne faudrait pas que l’on passe d’une subordination physiologique naïve – « le sport purge le trop-plein d’énergie » – à une subordination psychologique qui le serait tout autant – « le sport endigue les tempéraments impulsifs et inadaptés ». Contrôler sa propre agressivité n’est pas forcément synonyme de la réduire (on peut apprendre à se servir d’un couteau pour couper une pomme ou pour tuer…). Canaliser le flux d’un fleuve épars est souvent l’occasion d’en augmenter le débit. Et il aurait fallu alors aux terroristes du 11 septembre 2001, pratiquer beaucoup de sport pour contrôler leurs affects au point de ne rien laisser transparaître au moment de l’embarquement, avant de précipiter les deux avions sur les tours, quelques minutes plus tard ! La régulation des affects peut être au service de la plus grande barbarie. De fait, les capacités d’autocontrôle induites par le sport doivent être également abordées sous l’angle de leurs fonctions intra-jeu et des valeurs ainsi mises en jeu. C’est précisément l’objet des pages à suivre.
Mais, afin d’éviter de remplacer une affirmation péremptoire par une autre, nous prendrons soin de ne pas recouvrir le sujet d’une nième analyse avant même d’avoir exploré la substantifique moelle de l’agressivité sportive. Qu’est-ce qui caractérise l’agressivité sportive ? Et comment la décrypter ? En quoi diffère-t-elle de celle définie par les psychologues ? Ce sera l’objet des chapitres 1 et 2.
Ensuite, comment évolue-t-elle ? Quelles sont les clés de la continuation de son existence dans un monde de plus en plus aseptisé ? Nous aborderons ces aspects aux chapitres 3 et 4. Y aura-t-il un « Rollerball » dans la société du futur ? Le film de Norman Jewison (1975) est-il prémonitoire ? Le scénario de W. Harrison est bluffant : en 2018, la guerre n’existe pas. Le crime n’existe pas. Seul compte le jeu : le « rollerball ». Dans un monde où d’impitoyables multinationales se partagent un pouvoir absolu, ce sport barbare et brutal, mélange féroce de football américain, de moto-cross et de hockey, semble être un ultime exutoire à l’ennui et à l’affadissement du quotidien. Qu’en est-il vraiment ? Pourquoi la corporation cherche-t-elle à mettre sur la touche Jonathan E., le leader charismatique de Boston, chouchou du public qui possède le record du nombre de joueurs tués par match ? Truffé de symboles, ce film pose de bonnes questions quant au rapport du sport et de la politique (pris au sens fort du terme), à défaut de proposer des solutions clairvoyantes.
À quoi sert l’agressivité sportive et qui sert-elle ? Quels profits spécifiques les sportifs se voient-ils administrer en agissant à bon escient de façon agressive, sur le champ de jeu ? Nous le verrons aux chapitres 5 et 6.
Enfin, au chapitre 7, si nous émettons des réserves, au plan éducatif, sur les sports qui valorisent la domination physique systématique, nous ferons bonne publicité aux jeux où la permutation des rôles fait passer tour à tour les joueurs du statut de subordonnant à celui de subordonné, accentuant ainsi la révélation du pouvoir d’oppression que chacun peut exercer sur les autres.
Chapitre 1
J’avais réussi à convaincre mes collègues d’acheter tout le nécessaire pour organiser des cycles de boxe. En éducation physique et sportive (EPS), comme ailleurs, tout ce qui n’est pas interdit est autorisé. En outre, les textes officiels de ladite discipline font tout autant la part belle aux sports de combat qu’aux sports strictement coopératifs comme le « quatre de couple » en aviron, le K2 en canoë-kayak ou les courses de relais en athlétisme, etc. Et les travaux de Bertrand During1 à ce sujet montrent que les établissements scolaires français privilégient nettement les sports de pur antagonisme plutôt que les sports altruistes. Alors, pourquoi pas nous ?
J’avais moi-même vécu deux cycles de boxe lors de mes études pour devenir professeur d’EPS et cela m’avait beaucoup plu. À ma grande satisfaction, je découvrais que les gants qui viennent percuter votre visage sont le plus souvent les vôtres ; on apprend aussi à décoder les intentions adverses, à limiter les actions désordonnées. Et on peut jouir de cette satisfaction unique d’être encouragé à manifester, ici et maintenant, un tant soit peu d’agressivité. De là à attribuer toutes les vertus éducatives des jeux sportifs aux sports de combat, il n’y a qu’un pas… que franchissent allègrement les experts en la matière qui en viennent parfois à envisager ces sports comme des tremplins de la pacification et de la solidarité ! Dans le domaine du sport et de l’EPS, les affirmations péremptoires pleuvent. Aussi, profitant de la poursuite d’études universitaires en sciences humaines et sociales, étais-je bien décidé à suivre de près les dynamiques affectives et relationnelles suscitées par les séances de boxe. À quoi le mal est-il bon ?
Les classes mixtes d’adolescents dont j’étais chargé se préparaient à un diplôme professionnel (mécanique, coiffure, etc.) et manifestaient à l’égard des pratiques corporelles des avis bien trempés. Le football emballait tout le monde, y compris les filles, à l’inverse de l’athlétisme et de la gymnastique qui ne séduisaient que les rares élèves ayant quelques dispositions particulières à révéler au groupe-classe. J’utilisai d’abord le différentiel sémantique d’Osgood2 pour mesurer leurs appréciations. Juxtaposées sur une page, des échelles à sept cases – neuf pour notre étude – de part et d’autre desquelles se situent des adjectifs antonymes, sont censées nous renseigner sur la connotation associée à un stimulus inducteur (un mot, une situation, une image, etc.). Il s’agit d’étudier ici le sens donné à certains mots. On demande aux répondants de réagir avec rapidité, en associant à certains stimuli des adjectifs opposés qui peuvent les décrire. Soit le mot sport et, à la première échelle du questionnaire, l’adjectif horrible écrit d’un côté et l’adjectif joli écrit du côté opposé. Selon leur propre expérience de pratiquant, leur attrait pour les grands événements sportifs, leur identification à quelques champions charismatiques, etc., les élèves placeront une croix dans une des sept cases. S’ils placent la croix près de joli, cela signifiera que, pour eux, le sport est mieux décrit par l’adjectif joli que par l’adjectif horrible. Si, au contraire, ils placent leur croix plus ou moins proche de horrible, cela traduira une certaine répugnance à l’égard du sport. S’ils placent leurs réponses plus près du centre, cela signifiera que le mot sport leur semble indifférent par rapport aux deux adjectifs opposés, etc.
Au stimulus trampoline, par exemple, nous avons pu observer avec stupéfaction les divergences entre l’appréciation groupale directe, spontanée, au moment où j’annonçais le début du cours – apparemment très défavorable – et les résultats du différenciateur sémantique réalisé quelques instants plus tard – très favorables (plus proches des résultats obtenus en football que de ceux observés en gymnastique ou en athlétisme).
À titre indicatif, donnons les résultats moyens des soixante-huit élèves étudiés. Les échelles étant constituées d’un continuum de sept cases allant du + vers le -, nous mettons à chacune d’elles un score de +3 à -3, avec une case neutre au milieu, la quatrième valant 0. Il vient à la pluralité des voix +1,13 pour le trampoline, +1,69 pour le football, contre -0,22 pour la gymnastique et -0,97 pour l’athlétisme. C’est dire que le trampoline ne se confond pas avec la gymnastique pour nos répondants. D’ailleurs, le faible taux de dispensés durant le cycle de trampoline et la bonne participation de l’ensemble en ont attesté. Dans ce type de classe, lorsque d’emblée ça ne plaît pas, soit les élèves ne viennent pas, soit ils viennent mais ne font pas. Aussi faut-il se méfier des réactions directes et à chaud des groupes et peut-on accorder une certaine confiance aux résultats du différentiel sémantique, plus proches des conduites effectivement observées.
Tout l’avantage de la procédure d’Osgood est précisément de faire en sorte que les répondants fassent des réponses dont ils n’ont pas l’entière maîtrise. On évite ainsi les positionnements consensuels des questionnements directs où les interrogés répondent non pas en fonction de ce qu’ils ressentent mais en fonction de l’image qu’ils veulent laisser transparaître à l’enquêteur. Et mon expérience en la matière m’invite à penser que c’est lorsque les répondants vous disent : « On ne comprend rien à ce questionnaire, ça ne veut rien dire, etc. », que vous risquez d’obtenir les résultats les plus intéressants et les plus proches des représentations effectives. Dans le cas du différenciateur d’Osgood, ce type de réaction s’est vite fait sentir.
Osgood s’est préalablement acquitté d’une recherche empirique considérable pour tester les adjectifs les plus parlants : beau/laid, grand/petit, rapide/lent, etc. Après avoir fait réagir des dizaines de répondants à plusieurs stimuli sur une cinquantaine d’échelles, il a, par brassage factoriel, fait émerger trois facteurs regroupant des dimensions connotatives distinctes. Le premier, le plus fort en termes de contribution à la construction des facteurs, est le facteur « valeur » ou « évaluation ». Il y est indexé des réponses à tonalité positive ou négative : bon/ mauvais, agréable/désagréable, réussi/raté, beau/laid, etc. Le second facteur d’antonymes regroupe ceux associés à des caractéristiques d’effort, de force, de masse, d’énergie. Il s’agit du facteur « puissance ». Reprenant le propos d’un de ses étudiants, Osgood l’évoquera, non sans nous intéresser, sous le nom de « facteur du joueur de foot » : brutal/délicat, fort/ faible, dur/mou, grand/petit, etc. Enfin, de moindre contribution, le troisième facteur, le facteur « activité », renvoie à la mobilité associée aux stimuli inducteurs : calme/excitable, chaud/froid, actif/passif, rapide/lent, etc.
Que les antonymes n’aient pas de rapport dénotatif immédiat avec les stimuli inducteurs est une précaution méthodologique essentielle. On s’intéresse ici au ressenti, à la connotation des mots ou des situations. En aucun cas, il ne faut que les répondants aient l’impression de chercher « la » bonne réponse. Aussi comprendra-t-on que, pour étudier les opinions vis-à-vis de la boxe par comparaison à celles du trampoline ou de l’athlétisme, il est préférable d’éviter les adjectifs agressif, non agressif, trop proches de la spécificité de la boxe.
Alors que les connotations attribuées au trampoline étaient élevées pour les trois facteurs, celles du stimulus boxe se révélaient différentes. Le facteur valeur enregistrait des scores défavorables à quelques exceptions près (en moyenne : -0,18). Par contre, la boxe était perçue plus puissante (+2,06) et plus active (+1,83) que le trampoline (+0,96 et +1,12 respectivement pour les facteurs puissance et activité) et même que le football (+1,44 et +1,76), qui plus est avec un écart-type réduit (0,51 et 0,84) ! Ne sont-ce pas là les facteurs du boxeur plus que ceux du joueur de foot ? À vrai dire, cela n’a rien de surprenant. Les coups portés en boxe sont manifestement plus durs que ceux du football et tenir une minute sur un ring paraît, ô combien, plus actif que sur la pelouse d’un stade. L’appréciation défavorable du facteur valeur est également logique. On nous apprend depuis la tendre enfance à éviter le passage à l’acte et le recours à la brutalité physique ; on ne peut donc s’esclaffer d’étonnement à ce que les élèves témoignent d’une mise à distance vis-à-vis de ce sport réputé dangereux. Seuls quelques garçons et quelques filles, dont on mesurera plus loin la suprématie dans le groupe, valoriseront la boxe sur le pôle évaluation. Comme s’ils percevaient a priori, mieux que les autres, l’importance de porter au pinacle la combativité.
À la fin du cycle, je m’attendais à ce que les opinions changent. Tous les enseignants d’EPS le savent bien. Chaque nouvelle expérience motrice est susceptible de bouleverser la personnalité des élèves en profondeur. Les séances s’étaient plutôt bien passées. Mais quelles tensions pour le professeur ! En tennis de table, le respect des consignes étant bafoué, au pire les élèves apprendront moins et le cours sera plus bruyant. Par contre, lorsque vous demandez par exemple aux adolescents d’arrêter de boxer au coup de sifflet, si l’un des deux fait fi de cet impératif, l’autre ira au tapis, puis peut-être à l’hôpital. Il s’en est fallu de peu pour que cela se produise et se reproduise et mes collègues et moi avons fini, les années suivantes, par limiter la pratique de la boxe aux classes faciles, si ce n’est, plus simplement, par la supprimer des programmations annuelles.
Pour autant, l’appréciation de la boxe, par nos classes de lycée professionnel, a évolué positivement au cours des cycles. Le facteur valeur, en retrait lors du pré-test (-0,18), s’est révélé après coup plus proche des scores du populaire football (+1,87) que de l’impopulaire athlétisme (-1,01) : en post-test, +0,92 pour la boxe avec tout de même un écart-type élevé de 1,11.
Les scores des facteurs puissance et activité, très favorables lors des prémisses, se sont stabilisés (+1,96 et +1,78). La majorité des filles et des garçons s’était rangée sur le point de vue des dominants en mettant sur un piédestal l’affrontement physique. Seuls quelques élèves à la marge – dont nous reparlerons – ne souscrivaient pas à cet engouement. Ils n’étaient pourtant pas en situation d’échec et parvenaient à un niveau technique semblable à la majorité…
Finalement, que leur avions-nous appris ? Les participants contrôlaient sans doute mieux leurs affects, faisaient probablement preuve de plus grandes capacités de décentration, étaient éventuellement capables de « préagir » à bon escient, etc., mais ils avaient aussi appris – non sur le plan de l’action motrice elle-même, mais sur celui des valeurs qui lui sont associées – à accepter la domination physique du plus fort, à reconnaître comme « positif » la hiérarchie fixée par la combativité. D’un point de vue éducatif, ce qui compte, dans la pratique d’un sport, ce n’est peut-être pas tant ce que l’on apprend (en termes de technique et de tactique) que ce que l’on apprend en pratiquant (subordination corporelle, supériorité ou soumission à l’autre, etc.). C’est ce qu’allait me révéler la lecture des enquêtes sociométriques menées au début et à la fin des cycles.
En boxe, je disposais cette année-là de trois classes d’adolescents. Quelle que soit la situation, les élèves se mettaient par binômes affinitaires, binômes qui se sont rapidement stabilisés dès la troisième séance. Les structures sociométriques se ressemblaient d’une classe à l’autre. Trois ou quatre leaders, filles et garçons, avaient les faveurs d’une majorité de même sexe, quelques individus contestés et contestataires (un à trois) échappaient aux sous-groupes de courtisans et deux ou trois élèves supplémentaires se trouvaient isolés.
Un questionnaire sociométrique, tenant compte de précautions méthodologiques suggérées par Pierre Parlebas3, allait nous permettre de dégager quelques propriétés insoupçonnées. Individuellement, isolés et assurés que leurs goûts ne seraient pas dévoilés, les adolescents nommaient par ordre de préférence : les camarades qu’ils appréciaient le plus ; ceux qu’ils dépréciaient le plus ; ceux qu’ils choisiraient comme « chefs » ; ceux qu’ils ne choisiraient surtout pas pour cette fonction ; ceux dont ils pensaient qu’ils les appréciaient ; ceux dont ils pensaient qu’ils les dépréciaient ; ceux dont ils pensaient qu’ils les avaient désignés comme chef ; et ceux dont ils pensaient qu’ils ne voulaient pas d’eux comme chef. Les quatre derniers renseignements relèvent de l’empathie, de la capacité qu’a chacun de deviner les intentions d’autrui sur soi-même, par décentration. On peut ainsi voir la clairvoyance ou l’aveuglement empathique des répondants, de même que leurs transparences ou leurs opacités vis-à-vis du groupe, en comparant les attentes de choix aux choix effectifs. On peut surtout renforcer la mesure de la cohésion socio-affective. C’est Jean Maisonneuve4 qui, le premier, a vérifié le fait que la composante affective est en grande partie fondée sur la présomption de réciprocité. « Je choisis un tel parce que je pense qu’il m’a choisi et je pense qu’il m’a choisi car je l’ai choisi. » Cela s’est très bien vérifié dans toutes les différentes enquêtes que nous avons pu réaliser ici et plus tard.
Par convention, on décide qu’un élève est « dominant » lorsqu’il recueille une majorité de suffrages en sa faveur – autrement dit, lorsque plus de la moitié des élèves de sa classe l’apprécie – et/ou lorsqu’il est désigné par au moins un tiers des répondants comme « chef » potentiel. En vérité, on découvrira vite que ces deux critères sont liés. Dans près de trois quarts des cas, on recense une corrélation significativement positive entre la cohésion affective brute – prenant en compte les choix et les attentes de choix – et le critère leadership. Et dans plus des deux tiers des cas, on confirme cette relation par une corrélation identique entre le critère leadership (« je veux un tel ou un tel comme chef ») et l’attente de désignation comme leader (« je pense qu’un tel ou un tel me voit chef »). On apprécie un tel parce qu’on le voit bien leader et on le voit bien leader car on l’apprécie. Par association avec la propriété de Maisonneuve susvisée, on peut émettre l’hypothèse selon laquelle la propension serait d’apprécier tous ceux qui sont susceptibles de vous désigner chef de groupe ! Comme les relations sont basées sur la présomption de réciprocité, il y a risque que cela débouche sur un « effet pervers » au sens fort du terme5, c’est-à-dire que l’agrégation de choix individuels sensés – « je choisis ceux qui me choisissent et me voient leader » – aboutit à une ordination collective absurde – il y a autant de leaders désignés que de votants. En matière de « chef », il ne peut y en avoir que quelques-uns. Sinon, le critère de leadership n’aurait plus de sens.
Les groupes échappent à cet effet pervers grâce au charisme de quelques-uns qui séduisent suffisamment leurs subordonnés pour que ces derniers puissent se passer du soupçon de symétrie de leur amitié. Dans chaque classe, nous avons repéré ces élèves adulés. Adulés principalement par des adolescents du même sexe pour les filles et des deux sexes pour les garçons. Probablement moins mûrs, les garçons de cet âge projettent leur admiration sur d’autres garçons, quand les filles éprouvent de l’attraction pour certains garçons et d’autres filles ; sans doute pour des raisons différentes qu’on imagine aisément. Vérifications faites, ces leaders ne réussissent pas mieux en classe que les autres, dans les matières théoriques consacrées ; il y a quelques bons, mais aussi quelques cancres à l’appel. En éducation physique : même combat. Les critères de supériorité scolaire n’affectent pas l’attirance ou le mépris. Le succès peut valoriser celui qui saura s’en servir tout autant que l’échec : les adolescents se révèlent aux autres au moment où ils se voient attribuer une très bonne ou une très mauvaise note, par exemple. Dans les deux cas, la faculté à trouver ça normal – en cas de bonne note – ou à grossir le trait de façon outrancière avec l’humour de ceux qui savent que ce n’est pas là-dessus que la vie vous jugera – en cas de mauvaise note – peut être habilement tirée à profit.
À l’opposé, il y a ceux qui se sont mis le groupe à dos, probablement parce qu’ils n’ont pas assimilé la théâtralité convenue ou qu’ils ont d’autres problèmes qui les empêchent de s’impliquer. Eux non plus ne sont ni meilleurs, ni moins bons que la moyenne.
La carte d’identité affective du groupe étant réalisée, comment les élèves vont-ils donc s’associer durant le cycle ? Comment vont-ils se comporter face à la brutalité physique de la boxe ? Et comment vont-ils l’apprécier ?
Toutes les situations motrices de boxe nécessitaient un regroupement par paires. Aucun mode d’association n’étant imposé (par catégorie de poids, par sexe, par niveau sportif, etc.), la tendance allait dès les prémisses au regroupement par affinité réciproque, comme on pouvait aisément l’imaginer : les amis avec les amis. Cela posait inéluctablement problème aux adolescents isolés ou rejetés qui devaient former un binôme par défaut, à leur corps défendant si l’on peut dire. Si l’on prend comme indice de cohésion socio-affective le nombre de choix, d’attentes de choix (en amitié et leadership), moins le nombre de rejets, d’attente de rejets (en amitié et leadership), divisé par le nombre de répondants moins un, on obtient un chiffre compris entre -4 et +4. Le score sociométrique des isolés est proche de zéro, quand celui des exclus tend vers -4. Obligés de combattre avec des délaissés ou des ennemis affectifs, ces « souffre-douleurs » du groupe réalisaient des actions motrices techniquement identiques à la majorité mais davantage empruntes de blocages et de brutalité : frappes désordonnées, appuyées, refus de certaines règles (tourne le dos, donne des coups hors zone, etc.). Nous avions affaire à des élèves dangereux pour eux-mêmes et pour les autres. Capables du meilleur – du fait de l’agressivité de leur boxe « assassine » – comme du pire – du fait du non-contrôle de leurs affects – nous les appelions les boxeurs « on-off ». Deux types d’organisation signifiante les distinguaient des autres. Pour les isolés, l’attitude dominante ressemblait à ce que Hediger6 nomme « réaction critique » dans le monde animal. Cette forme de réaction de légitime défense est la plus violente de toutes. C’est celle de l’assaut désespéré de la proie sur son prédateur. Les tadornes (sorte de canards au plumage bariolé) sont connus pour harceler à leurs risques et périls les bêtes de proie comme les renards. L’expression fighting like a cornered rat (« lutter comme un rat acculé ») image bien ces situations où les subordonnés affectifs donnent le tout pour le tout car ils ne peuvent ni échapper à leur assaillant, ni attendre la moindre grâce.
Leurs comportements ultra-combatifs semblaient motivés par la peur. Habituellement, les élèves affectivement délaissés restent à distance, à « distance de fuite » pour reprendre la terminologie des éthologues animaliers. En cycle boxe, on leur impose de pénétrer dans la distance critique de l’autre, celle qui fait brusquement transmuer la fuite en charge. Les dompteurs le savent bien qui jouent sur ce « seuil » (distance de fuite/distance critique) avec leurs fauves : un pas en arrière et les lions rebroussent chemin, un pas en avant et l’homme de cirque n’est plus à l’abri d’un accident fatal. On observe cela très bien entre les taureaux de combat et leurs toreros.
Voilà ce que nous apprenons aux adolescents en déficit affectif avec la boxe : à manifester le courage du désespoir, à se révéler agressif par peur. On ne s’étonnera pas que leurs réponses au facteur valeur du différentiel d’Osgood aient été négatives pour eux, avant et après le cycle (-0,76 avant et -1,31 après).
S’agissant des élèves répudiés par le groupe (indice socio-affectif inférieur à -3), leur comportement, bien qu’également très agressif, marquait une différence majeure avec les isolés avec qui ils étaient contraints de boxer. Ne se sentant pas subordonnés (pour obtenir un score proche de -4, il faut tout autant qu’ils soient rejetés et qu’ils rejettent eux-mêmes les autres), mais incompris ou en conflit, ils avaient du plaisir à la bagarre et comptaient bien que ça se sache. Cherchant le plus souvent à changer d’adversaires pour s’y mesurer – mais n’y parvenant pas du fait de leur statut sociométrique –, ils n’y allaient pas avec le dos de la cuillère. Leurs conduites s’apparentaient davantage à celles des jeunes prédateurs du monde animal qui, faute de pouvoir défier directement les mâles dominants, aiguisent leurs forces en marge du groupe avec d’autres prétendants… en attendant leur heure. Adeptes d’expressions corporelles d’outrances au sens de Goffman7 – simulation de knock-down, mimiques de boxeurs professionnels, gestes agressifs surajoutés aux actions motrices, renoncement délibéré aux espaces de protection proposés lors des situations, etc. –, ils semblaient considérer la boxe comme une circonstance inopinée pour remettre les pendules à l’heure à l’égard du groupe-classe, potentiellement spectateur. Leur bonne évaluation du stimulus « boxe » au questionnaire d’Osgood paraît en attester (+0,76 en pré-test et +0,99 en post-test). Le système scolaire laisse rarement une telle occasion de manifester de la force de caractère par des comportements à risque. Alors que la pacification des mœurs et les règles de l’autocontrainte dont parle Élias8 tendent habituellement à stabiliser l’ordre groupal en muselant la brutalité (« nous ne sommes pas des bêtes ! »), la pratique de la boxe fournit ici une opportunité de renverser la hiérarchie, par l’usage – même codifié et strictement limité – de la force corporelle. Ou comment s’emparer du pouvoir autrement qu’en souscrivant aux rituels d’interaction consacrés. Mais cela reste limité ici du fait qu’aucun adolescent rejeté n’a pu, dans nos groupes étudiés, « tirer » une seule fois avec les dominants reconnus…
Comme si ces derniers avaient compris d’emblée à quoi ils s’exposaient en affrontant des protagonistes aux statuts sociométriques opposés. Pourquoi prendraient-ils le risque de perdre la face en quelques minutes, quand leurs efforts quotidiens leur garantissent usuellement de faire bonne figure ? Nous avons pu toutefois, à l’égard de ces leaders, déceler une évolution dans leurs comportements combatifs, manifestement liée au choix de leurs adversaires. Lors de la première séance, les dominants se trouvaient vite agglutinés de courtisans, prompts à s’associer de concert. Ils en choisissaient un des plus dignes de leur présence, avant de le répudier sans crier gare à l’occasion d’un changement de situation. Les subordonnés acceptaient sans sourciller ce petit jeu cruel, trop satisfaits d’avoir pu un instant recueillir l’aval de leur leader affectif. J’ai même vu un grand gaillard, fort et bien bâti, se laisser manœuvrer par un adversaire haut placé dans la hiérarchie du groupe, mais minuscule de taille. Il lui aurait pourtant suffi de tendre le bras pour se mettre hors de portée du « roquet ». Mais il n’en faisait rien, malgré mes remarques insistantes. Au contraire, il s’évertuait à se voûter pour mieux lui prêter le flanc. Comme si défier au combat un élève dominant était un signe de rébellion inacceptable, passible d’exclusion. Entre deux escarmouches, il cherchait un appui du leader en forçant la conversation. Celui-ci ne faisait aucun effort, trop occupé de feindre l’importance de se concentrer sur sa technique pour mieux se jouer de la situation. Le spectacle était affligeant, mais il a au moins un égal dans le monde animal, chez les babouins étudiés par S. L. Washbrun et Irven de Vore9 (qui acceptent de mettre leur vie en danger en restant solidaires des décisions hasardeuses de quelques mâles « sénateurs » ayant depuis longtemps dépassé la fleur de l’âge). Nul doute qu’en face d’un isolé ou d’un rejeté de même gabarit, ce petit chef aurait pris une « pillée ». Rapidement, les leaders se lassèrent d’avoir systématiquement cause gagnée. Ils n’engrangeaient aucun surplus de courage ou de cran. Trop prudents, les protagonistes se coupent ipso facto de certaines valeurs parmi celles-là mêmes qui cernent la personne telle qu’elle devrait être. Aussi y avait-il une alternative entre perdre la face en affrontant les isolés et rejetés « risque-tout » et laisser entrevoir une faiblesse en restant sous l’égide d’amis trop serviles.
À partir de la troisième séance, il apparut de nouveaux changements d’adversaires qui allaient, cette fois-ci, se stabiliser jusqu’au terme du cycle, à la huitième séance. Sans doute implicitement poussés par la couardise du « petit personnel » (les dominés assimilés à un sous-groupe qu’ils ne quitteront pas du cycle), les leaders de même sexe se mirent de plus en plus souvent à combattre ensemble, surtout chez les garçons. Le fait est remarquable car les dyades unissant ces chefs de file étaient vides ou peu remplies dans le questionnaire sociométrique – cela signifie que les dominants manifestaient un certain dédain vis-à-vis de la concurrence. On était en présence d’une guerre des chefs en somme ! Le fait est que les résultats des affrontements étaient suivis de près par tous et que nous assistions à des combats à forte implication affective et d’une certaine férocité. Lorsque les leaders rivaux n’étaient pas du même niveau et que le combat tournait vite en la faveur de l’un d’eux, celui-ci « relevait le pied » rapidement, contrairement à ce que l’on pouvait voir chez les rejetés et les isolés. Le fair-play est l’art de jouer le jeu de ceux qui ne se laissent pas prendre au jeu, comme dit Bourdieu10. Par contre, à force égale, offensives et contre-offensives nécessitaient fréquemment une intervention extérieure : les protagonistes s’étaient pris au jeu. Davantage respectueux des règles mais sans l’humour et la dérision du sous-groupe d’exclus et d’oubliés, ils s’étripaient comme des bêtes de proie entre elles, qui grognent et rabaissent leurs oreilles. Le comble est que, quel que soit le résultat des assauts successifs, la connotation attribuée à la boxe restait la plus élevée au questionnaire d’Osgood (+1,41 au facteur valeur en post-test, alors que la moyenne des répondants est de +0,92)… C’est peut-être par combativité qu’ils avaient gagné les faveurs d’un public ; et c’est par leur pugnacité physique qu’ils jouaient leur place dans le groupe. Les cycles de boxe ont été trop courts pour que l’on puisse enregistrer de quelconques modifications sociométriques après coup, et il existe bien d’autres moments dans la journée d’un lycéen pour éventuellement reconquérir un honneur déchu.
La valorisation de l’agression contre ses propres congénères a une fonction dans le règne animal : la conservation de l’espèce par sélection des meilleurs. J’avais du mal à imaginer, en proposant un cycle de boxe anodin à mes élèves de lycée professionnel, que je les mettais en demeure de se jauger et de se juger sur des critères aussi primaires. Contrairement aux jeux ou aux rites de combat des animaux – fussent-ils appris –, les jeux sportifs ne sont-ils pas des constructions sociales à part entière, inscrites dans une dynamique de civilisation allant à contre-courant des manifestations agressives ? Mais pourquoi les jeux humains ne renoncent-ils pas alors purement et simplement à l’expression de la violence ?
Il est vrai que l’on pourra nous reprocher d’avoir choisi des extrêmes, pour commencer. La boxe est l’un des très rares sports où le corps de l’autre, pris pour cible, doit être délibérément affecté. Y aurait-il moins de manifestations d’agressivité lors de l’accomplissement de la plupart des autres sports ? Et puis, nous sommes partis d’expériences vécues avec de grands débutants, qui n’ont pas assimilé la logique interne de la pratique consacrée. Les experts gagnent-ils en actes de pacification ?
Pour le savoir, explorons à présent une situation inverse, celle du champion d’un sport dont la cible n’est pas le corps, mais un espace horizontal, et où la distance de fuite est garantie par l’obstacle vertical qui sépare les deux protagonistes : j’ai nommé le tennis. Ce sport est de même structure que la boxe – il s’agit d’un jeu strictement compétitif, d’un « duel », selon la terminologie des théoriciens des jeux11 –, mais la violence physique directement dirigée sur l’autre y a été complètement bannie. Pour autant que cette situation ait atteint son degré maximum d’aseptisation, peut-on affirmer que l’agressivité n’y siège plus ? Les jeux des loups avec leurs proches sont également délibérément édulcorés : on comprend que, sinon, cela basculerait vite dans le massacre. Mais avez-vous vu leurs crocs, leurs poils hérissés, leurs airs menaçants ? Le jeu des animaux détourne l’attaque directe mais garantit suffisamment d’agressivité pour que sa fonction première – la détermination du statut de chacun parmi les autres – soit maintenue. Ceci semble évidemment – apparemment – éloigné de la fonction première des jeux sportifs humains.
Un de mes étudiants, ne manquant pas d’humour, a interrogé plus de deux cents sportifs de niveau régional, voire national, étudiants en faculté des sciences du sport, afin de savoir, « tout simplement », pourquoi ils font du sport ? La question était posée de deux façons différentes dans un questionnaire complet. Sous une première forme, il s’agissait d’une interrogation directe et fermée. Les répondants n’avaient qu’à classer cinq propositions. Une immense majorité a répondu dans cet ordre : « pour me défouler », devant « pour me faire des amis », devant « pour être en bonne santé », devant « pour en faire mon métier », devant « pour battre les autres », comme si cela était évident. On voit que « pour battre les autres » est en dernière position ; nous sommes loin de la fonction ludique première des loups. L’étudiant leur a ensuite mis ces cinq critères deux par deux afin de procéder à une comparaison par paires, selon la procédure électorale de Condorcet12 : « Pour chaque paire, entourez le critère qui, des deux, vous incite le plus à faire du sport.