Guy Saint-Jean Éditeur
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Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC
Publié initialement en langue anglaise (Canada) en 2014 par James Lorimer & Company Ltd., Publishers, Toronto.
Titre original: Stupid
© 2014 by Kim Firmston
© Guy Saint-Jean Éditeur inc., 2017
Traduction: Isabelle Allard
Révision: Fanny Fennec
Correction d’épreuves: Lysanne Audy
Conception graphique de la couverture et infographie: Christiane Séguin
Photo de la page couverture: © Depositphotos/kanzefar
Dépôt légal — Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Bibliothèque et Archives Canada, 2017
ISBN: 978-2-89758-302-6
ISBN EPUB: 978-2-89758-303-3
ISBN PDF: 978-2-89758-304-0
Tous droits de traduction et d’adaptation réservés. Toute reproduction d’un extrait de ce livre, par quelque procédé que ce soit, est strictement interdite sans l’autorisation écrite de l’éditeur. Toute reproduction ou exploitation d’un extrait du fichier EPUB ou PDF de ce livre autre qu’un téléchargement légal constitue une infraction au droit d’auteur et est passible de poursuites pénales ou civiles pouvant entraîner des pénalités ou le paiement de dommages et intérêts.
Imprimé et relié au Canada
1re impression, mai 2017
Guy Saint-Jean Éditeur est membre de |
Roman
Traduit de l’anglais (Canada) par Isabelle Allard
À l’incroyable et merveilleuse
communauté de parkour
de Calgary.
1Les ombres
2Pile
3Agissons!
4L’équipe de Pile
5Crac!
6Flagrant délit
7Le bureau du directeur
8La course
9Culpabilité
10Le passé de Pile
11Pris sur le fait
12Recherche
13Un avenir meilleur
14Des choix difficiles
15Limiter les dégâts
16La fin
17Et le gagnant est?
18Soixante ou plus
19Le parkour
20L’entraînement
21Sérieusement, qu’est-ce que j’ai fait?
22Je ne suis pas stupide!
23Discussion parkour
Stupide.
Je suis peut-être stupide. Stupide de venir ici.
Devant moi, un projecteur éblouissant projette des ombres contrastées sur un mur de briques grises. Au-dessus de ma tête, le crépuscule bleu cobalt cède rapidement la place à l’obscurité de la nuit. Je sors mon appareil photo numérique de son étui, vérifie la mise au point, prends une photo, puis passe à la fonction vidéo. L’ancienne brasserie est plongée dans le silence. Un silence de mort. Un silence de cimetière. C’est parfait. Cela signifie que je n’ai pas été repéré. Je filme la clôture de mailles métalliques. Ses entrelacements projettent des ombres en dentelle sur le béton défoncé.
Le fil de fer barbelé, partiellement affaissé au sommet, vibre sous l’effet d’une douce brise printanière. Je prévois déjà une piqûre contre le tétanos dans un futur rapproché si je tente d’entrer par là. J’éteins l’appareil, remets en place le capuchon de l’objectif, puis m’avance en m’accroupissant d’un air coupable le long d’un chemin privé parallèle à l’arrière du bâtiment. La barrière qui ferme normalement ce chemin est ouverte et accueillante. La pancarte Terrain privé l’est moins. Impossible de plaider l’ignorance si je me fais prendre. Ce n’est pas comme si j’avais pu rater cet écriteau. Par contre, ce n’est pas moi qui ai laissé cette barrière ouverte. Je cherche une brèche dans la clôture sur ma droite, une façon de me glisser à l’intérieur. À cinq ou six mètres plus loin, j’aperçois un endroit où le fil de fer est suffisamment relevé au-dessus du sol pour qu’un petit coyote puisse se faufiler dessous.
Ou moi, si je retiens mon souffle.
Je m’étends par terre, le dos frottant contre le sol, en tenant fermement mon appareil photo. Sa sécurité est ce qui m’importe le plus. Je peux bien m’égratigner, me mutiler, saigner. Mais mon appareil? Jamais. Il vaut de l’or. Je ne le lâche pas une seconde, même quand la clôture frotte sur mon nez, avec son odeur de vieux métal et d’urine de chien.
Finalement, je me retrouve à l’intérieur, propulsant le reste de mon corps dans la zone interdite d’un dernier coup de talon. Des cristaux de glace s’insinuent dans le col de mon chandail, me faisant frissonner. J’espère que j’ai été assez silencieux. J’ai fait de mon mieux pour réprimer mes grognements et le bruit de ferraille de la clôture.
Je ne sais pas où se trouve le gardien de sécurité. Je l’ai vu passer de l’autre côté du bâtiment avant de m’introduire dans la propriété, mais j’ignore combien de temps il faudra avant qu’il ne vienne de ce côté. S’il vient par ici. Cet endroit est couvert d’arbrisseaux et de mauvaises herbes qui poussent dans les fissures du béton. Tous mes efforts pour être discret étaient peut-être superflus.
Je me relève et colle mon dos au mur de briques grises, comme si j’étais dans un film d’espionnage. Je lève les yeux à la recherche de caméras. La compagnie d’entreposage qui possède ce bâtiment en a installé partout. Pourvu que mon chandail noir et mon pantalon cargo marine m’aident à ne pas me faire repérer! Les cheveux blonds ne sont pas un avantage dans une telle situation. Je relève mon capuchon. Jusqu’ici, tout va bien.
J’entends un craquement et un bruit sourd au loin. J’essaie de me représenter d’où ils proviennent. D’en haut? Peut-être de l’autre extrémité du terrain? Je me demande si c’est le gardien qui vient dans ma direction. Je prête l’oreille, immobile, mais il n’y a pas d’autre son à l’exception des bruits de circulation sur la 9e Avenue et les roues d’un train qui approche de la gare de triage Alyth. Utilisant ce vacarme pour me couvrir, j’avance lentement, prudemment, le long du mur, tout en retirant le capuchon de l’objectif.
J’essaie d’imaginer cette bâtisse il y a une centaine d’années, lorsqu’elle appartenait à la compagnie Calgary Brewing and Malting. À l’époque, c’était un endroit animé. Le cœur de la communauté. Les gens venaient pique-niquer en famille et admirer les poissons qui nageaient dans l’eau du puits artésien. À présent, le parc est fermé et l’aquarium n’existe plus depuis longtemps. Même la statue de bison a été clôturée, son derrière estampillé par une pub du Stampede.
Cet endroit tombe en ruine: la brasserie, la salle de soutirage… Toutefois, la grande cheminée de briques rouges se dresse toujours comme la tour d’un château médiéval. La compagnie d’entreposage a rénové le bâtiment principal. C’est un endroit où les gens qui accumulent les objets peuvent les conserver. Il y a même eu une vente aux enchères d’unités d’entreposage le mois dernier, comme dans la série télévisée. Cet endroit abrite probablement des objets précieux, ce qui explique les mesures de sécurité.
Oui, je suis vraiment stupide.
Selon mon père, ce n’est pas surprenant. Il a l’air de croire que si je ne suis pas en train d’étudier ou de pratiquer un sport quelconque, je gaspille ma vie. Tourner des films, ce n’est pas du gaspillage, c’est de l’art. Mais tenter de le lui faire comprendre, c’est comme essayer de filmer un concert rock avec un objectif macro. Ça ne sert à rien.
La tête baissée, je me faufile jusqu’à la cheminée. Elle est immense et perce le ciel nocturne très haut au-dessus de moi. Il y a une tour non loin de là, constituée d’échelles grises et de métal rouillé aux soudures rompues. Je m’en approche et pose prudemment le pied sur un échelon près du sol. Il craque sous mon poids. Je vais mourir si je grimpe là-dessus. Me ravisant, je me dirige vers un passage étroit oublié depuis des lunes. Il y a beaucoup de détritus accumulés ici, dont certains doivent remonter aux premiers jours de la brasserie. Ils créent des ombres denses qui confèrent une apparence maléfique au béton craquelé. Comme si un démon tentait de se frayer un chemin à partir des profondeurs souterraines. Une boule de papier chiffonné roule près de moi, me faisant sursauter et me donnant la chair de poule. Je saisis mon appareil photo, vérifie les réglages et fais un zoom. Un vieux pneu apparaît avec une allure menaçante dans la pénombre, tel un œil. Je fais la mise au point là-dessus. Un œil monstrueux en caoutchouc qui regarde au fond de mon âme. Je photographie les bâtiments un peu plus loin. Plongés dans un labyrinthe obscur où tout devient noir. D’un noir d’encre. C’est pour cette raison que je devais venir ici. Cet endroit est parfait. Sombre. Délabré. Désorganisé. Pourri.
Comme moi.
J’ai essayé de ne pas croire à cette étiquette pendant des années. Stupide. Mais quand tout le monde t’appelle ainsi, cela devient difficile de continuer à le nier. Comment puis-je rejeter ce mot quand j’obtiens à peine cinquante pour cent à chaque examen que je passe? Quand les marques de stylo rouge me rappellent de faire un effort, de travailler davantage, d’écouter en classe — alors que c’est ce que je fais constamment? De toute évidence, ils doivent avoir raison. Je suis stupide de vouloir le nier. Il m’a juste fallu longtemps avant de finalement accepter cette réalité.
Sauf que je ne veux pas.
Un éclair lumineux se reflète sur l’écran de l’appareil. Je pivote et me laisse tomber derrière une palette de bois appuyée au mur. J’éteins mon instrument au milieu d’un cliché, produisant un déclic. Je fais la grimace. Mon regard balaie les alentours, mais je ne vois rien. Pas de lampe de poche, pas de gardien, rien. C’était peut-être autre chose. Je reste tout de même tapi, le dos appuyé au mur de briques poussiéreux. Finalement, je rallume l’appareil et continue mon exploration, à la recherche de la photo parfaite.
Il y a un endroit dégagé un peu plus loin. Une espèce de cour. Des briques brisées jonchent le sol. Des bouts de bois, provenant sans doute de vieux tonneaux. Une odeur de pourriture flotte dans l’air. Une autre lueur. Cette fois, elle vient d’une vieille bouteille de boisson gazeuse. Je me demande si elle date de l’époque de la prohibition. Quand l’alcool était interdit et que la brasserie s’était réinventée en vendant des canettes de soda et de l’eau minérale.
Je voudrais pouvoir me réinventer aussi facilement.
Je redresse la bouteille parmi les briques, laissant la lumière blanche et crue du projecteur de sécurité se refléter sur sa surface. Dans l’objectif de mon appareil, elle ressemble à une pierre précieuse. Un diamant posé sur un monticule de détritus. Je filme durant vingt secondes. Une éternité dans le monde du cinéma.
Les choses paraissent différentes selon qu’on les observe dans l’objectif d’une caméra vidéo ou dans celui d’un appareil photo. Il y a une profondeur qu’on ne peut obtenir dans la vraie vie. Les petits objets deviennent immenses. Des détails sans importance peuvent occuper tout le cadre. Et des trucs énervants se retrouvent brouillés ou retirés complètement de l’image. Mon professeur me dit de me concentrer. Avec mon appareil, je peux choisir sur quoi me fixer. Je peux modifier le monde de la façon qui me plaît.
Ma mère essaie de m’aider, de m’encourager, alors qu’elle-même avoue ne pas savoir comment faire mes devoirs. Elle estime que c’est une période difficile dont je vais finir par sortir. J’ai seize ans. Je ne m’en suis pas encore sorti. Ça n’arrivera jamais. Et puis il y a papa. Pour lui, je suis un raté, un gars borné et stupide. La note de trente-deux dans mon test en études sociales aujourd’hui prouve qu’il a raison.
Si les gens me demandaient ce que je sais, au lieu de m’obliger à l’écrire, je pourrais le leur expliquer. Mais non. C’est toujours une série de rédactions et d’examens, et d’exhortations à faire plus d’efforts. De toute façon, ça n’a pas d’importance. Je n’irai pas à l’université comme ils le souhaitent tous. Dès que j’aurai dix-huit ans, je partirai à Hollywood et ferai ce pour quoi je suis né: tourner des films.
Je m’aventure plus loin dans la cour, l’objectif braqué vers le haut. J’essaie de capter le croissant de lune entre des nuages noirs. Sa lumière éclaire la lisière de briques sombre entre le ciel et le toit, quand soudain, une ombre vacille. Non, elle ne vacille pas, elle file comme une flèche. C’est curieux, car les ombres ne sont pas censées bouger. Enfin, pas par elles-mêmes. L’ombre court le long du toit, bondit et s’envole dans les airs, passant d’une section du toit à une autre. Puis elle disparaît. Je n’en reviens pas d’être en train de filmer cette scène. J’observe l’endroit où elle s’est volatilisée. Puis un cri me fait sursauter.
C’est le gardien de sécurité.
Je tourne brusquement la tête. Je ne le vois pas, mais il semble tout près. Trop près.
— Hé! crie de nouveau la voix. ARRÊTE!
Je fais rapidement marche arrière vers une ouverture d’environ un mètre entre les bâtiments. Je m’y glisse, le cœur battant et les mains tremblantes. J’éteins mon appareil et remets le capuchon. Je ne sais pas si le gardien s’adresse à moi ou à l’ombre qui était sur le toit. Peu importe la réponse, il est préférable de demeurer caché.
Je m’accroupis. Les vieilles briques grises s’effritent et laissent tomber du mortier comme si une salière se déversait sur mes épaules. J’écoute attentivement. Mes oreilles sont comme des téléobjectifs. Je recule légèrement mon capuchon sur ma tête. Mais je n’entends rien. Aucun son, aucun cri. L’image de l’ombre en train de courir et de sauter me trotte dans la tête. J’allume de nouveau l’appareil photo pour revoir la séquence. C’était incontestablement quelqu’un qui cavalait sur le toit. Mais pourquoi?
Des pas lourds se font entendre sur le sol de béton, venant dans ma direction. Le faisceau d’une lampe de poche oscille d’un côté et de l’autre, passant près de ma cachette. Je retiens mon souffle. Au-dessus de ma tête, des nuages gris masquent la lune. Je me demande si je devrais m’enfuir. Puis j’entends un bruit de cailloux heurtant le mur. Un bruissement de tissu. Des fragments de brique et de mortier tombent sur moi. Je ne vois plus le ciel. J’ouvre la bouche pour pousser un cri, mais une main se plaque brusquement sur mes lèvres.
La poussière et la rouille me donnent un haut-le-cœur quand des doigts s’écrasent contre mes dents. Je lutte pour me libérer, agrippant fermement mon appareil photo et jouant du coude. Personne ne va me voler mes affaires.
Mon attaquant désigne la cour d’un geste insistant. Le faisceau de la lampe de poche se braque sur notre cachette. Je comprends le message et hoche la tête. Il enlève sa main de ma bouche. L’écran de mon appareil illumine le devant de ma veste à capuchon. Je le serre contre ma poitrine, espérant que le tissu suffira à dissimuler la lueur. Je ne peux pas l’éteindre sans faire de bruit. Et en ce moment, on n’a vraiment pas besoin de bruit.
Aucun de nous n’ose respirer.
Le gardien se rapproche. Son visage courroucé et sa casquette de baseball bleu foncé deviennent visibles quand il se penche. Il agite sa lampe de poche de haut en bas et dirige le faisceau à l’intérieur du passage où nous sommes tapis. Le rayon lumineux frôle mon soulier de course. Je résiste à l’envie de déplacer mon pied. Si je ne bouge pas, je vais me fondre dans l’ensemble des détritus entassés ici. La lumière demeure sur ma chaussure. J’essaie de réprimer le tremblement qui s’est emparé de mon corps. Je veux me mettre à courir. M’enfuir d’ici et me réfugier en lieu sûr. Rester immobile ne m’a jamais paru aussi difficile.
Le gardien pousse un grognement. Sa botte frotte contre le béton quand il s’avance de quelques pas. Le faisceau de la lampe se trouve maintenant à quelques millimètres de ma jambe. Un simple mouvement de son poignet suffirait à révéler ma présence. Mon cœur bat la chamade. J’ai les lèvres engourdies. Le fourmillement suit l’arête de mon nez. Je n’ai jamais été aussi effrayé de ma vie. Le gardien grogne de nouveau, puis braque sa lampe sur le mur en tournant les talons. Ses bruits de pas s’éloignent et j’inspire profondément.
— Merde alors! chuchote la silhouette sombre à mes côtés. On l’a échappé belle! Merci de ne pas m’avoir fait prendre.
— Ouais, toi aussi.
L’ombre éclate de rire.
— Pas de problème!
Il se lève et saute, attrapant une brique en saillie et escaladant le mur comme une espèce d’homme-araignée.
— Attends!
Il se laisse retomber aussi silencieusement que la première fois.
— Quoi?
Je sors mon appareil photo de ma veste et repasse la séquence que j’ai filmée avant de me cacher. Elle montre l’ombre qui saute d’un bâtiment à l’autre.
— Est-ce que c’est toi?
— Oui. Dis donc! Super séquence!
— Merci.
À la lueur de l’écran, je peux plus ou moins discerner le visage de ce garçon-ombre. Il semble avoir environ seize ans, comme moi, mais sa peau n’est pas aussi blafarde que la mienne et il a l’air plus en forme. Ses cheveux noirs sont hérissés dans toutes les directions dans une espèce de coupe en brosse trop longue. Une de ses pommettes saillantes et bronzées porte une trace de rouille orangée.
— Alors, tu examines les lieux? me demande-t-il. Pour un vol?
Je regarde les ombres en forme de triangle, la lumière de la lune qui se reflète sur des bouts de métal dentelés, la tour menaçante un peu plus loin.
— Non, je suis venu pour filmer. Et toi?
— Parkour.
— Que veux-tu dire?
J’ai déjà entendu ce mot, mais je ne suis pas certain de ce qu’il veut dire.
Il fait courir deux doigts le long de sa main à la verticale, puis imite une culbute.
— P-a-r-k-o-u-r, épelle-t-il.
Je crois comprendre.
— Tu veux dire ce sport urbain où les gens gravissent des murs et sautent entre les toits? Comme dans le film avec James Bond, Casino Royale?
— Ouais, et tu as filmé un de mes meilleurs sauts de précision.
— Pourquoi ici?
— Regarde cet endroit! dit-il avec un grand geste du bras. Il est fait pour le parkour. C’est idéal!
— Sauf pour le gardien.
— Oui, et les parties en ruine, ajoute-t-il avec un petit rire.
— Cet endroit a plus de cent ans!
— Vraiment? Un vrai terrain miné! Je m’appelle Pile, dit-il en me tendant la main.
— Pile?
— Oui, parce que je contrôle toujours mes atterrissages; je tombe pile, là où il le faut. Et toi?
— Olivier.
Sa main est puissante et rugueuse, couverte de callosités et de poussière. Soudain, notre cachette est illuminée par la lumière d’une lampe de poche.
— Je vous tiens! s’écrie le gardien.
Pile agrippe la brique saillante sur le mur et se hisse sur le toit bas de l’immeuble derrière lequel nous sommes cachés.
— Viens! me lance-t-il.