Ma plume s’affole. Elle déverse son flot de mots exprimant un instant fugace, éveillant en moi une aura irrésistible. Vite, je capte l’effluve avant que, dans le vent, il ne s’évapore. Comme une photo saisie à même la source, une impression fulgurante comme l’éclair qui jaillit en mots, dévoilant une facette des choses, des êtres, des lieux dont je m’imbibe, en connexion authentique avec l’âme qui habite tout et surtout lui, l’Écrit.
L’instant, ce « Carpe Diem » s’offre comme un langage pur à celui qui hume, ressent, écoute et se laisse induire par l’esprit et l’âme de ce qui est. Magie s’il en est, que de flotter dans cet état, en dehors du temps passé ou futur. Seul, l’instantané, croqué au subtil, s’exprime de façon intuitive dans un mouvement fluide dont l’essence puisée dans l’énergie de vie invisible me laisse toujours pantoise. Voilà que les couleurs, les rythmes, les sons, les parfums, les émotions s’entremêlent. L’indicible prend chair dans le mot. L’éphémère perception s’incarne. Timide ou fière, elle triomphe de l’évanescence apparente du temps qui fuit et nous offre cette photo-souvenir habitée et indélébile, dans laquelle je peux replonger à ma guise pour y goûter un instant d’éternité.
Avec douceur
Déposer les armes
Entrer
En lui
L’écrit
Le servir
Enfin
Lui prêter ma plume
Pour que sa voix
Plus jamais
Ne se consume
Et brûle
Ardent
Chaque
Instant
De la Vie
Mon pinceau
A dégorgé
Son plein d’eau
Écumés
Tous ces pigments fous
Élagués de tout
Dispersés
Le voilà prêt
À esquisser
Un pas de deux
De feu
Pour faire danser les mots
Caresse de maux
Glissant légère
Fluide d’éther
Sillon lent
Vivant
J’entre dans le rêve
Je te veux
Toi l’écrit
Nourriture de ma vie
Diamant brut
Attendant l’heure
D’être extrait
De cette terre
Mère
Pour tenter
L’éclat
Du soleil
La transparence
Qui
Sous cette écorce brute
Et figée
Ne demande
Qu’à exister
Comment s’engager
Réellement
Vivre de cette plume
De ces écrits
Et d’autres
Qui subliment
Ma réflexion
Suscitent
Mon envie
De participer
À cet imaginaire
Élixir de vie
Dompter l’écrit
Trop longtemps
Emprisonné
Brèche ouverte
Il m’enivre
De ses pensées
Qu’il n’a de cesse
D’exprimer
Défiant
Tout épuisement
Me quitter
Rester
Puisqu’en moi
Tu es incrusté
Alors qu’ambivalence
Tangue
Chaque seconde
De mon appartenance
À ce bateau
Que nous tenons
Gouvernail
Bien dur
Et nos mains fanées
Ont bien du mal
À résister
À cette houle
Nos énergies
S’amenuisent
Au fil
Des pages
Qu’ensemble
Nous faisons vivre
Alors que les nôtres
Plus denses
Et vitales
S’oublient
Au fond
De nos cœurs
Que nos têtes
Figent
Par devoir
Effritant un peu plus
Chaque jour
L’essence sacrée
D’une existence divine
Entre cette frêle barque
Portant malgré tout
Le fanion
Haut
Distinctif et fort
Que des années
De labeur
Ont anobli
Désir de dérive
Il n’y a
Qu’un pas fragile
Celui du lâcher prise
Sur cette galère
Que nos quatre bras
Moussaillons dociles
Activent
Ou
Celui de la ténacité
Résiliente
De ceux qui savent
Au bout de la houle
Vient la douceur
Et l’accalmie
Là où les yeux burinés
Enfin s’éclaircissent
Émerveillés
D’avoir tenu le cap
Envers
Et malgré tout
Au fil de nos doigts
S’échappent
Mot à mot
De furtifs
Élans de vie
Traduisant
Tout ce qui en moi
Macère
Jaillit
Éclot
Tanguant
Entre éclairs de vie
Et songes lents
Issus de réflexions
Ou de pulsions vives
Tous ils veulent
Être
À côté de moi
Personnifiés
Comme de sages soldats
Qui veillent
Fidèles
À l’affût
D’une ondée
Ou d’une escarmouche
Que mon âme
Appréhende
Tentant lentement
D’accueillir l’élan
Plutôt que de le dompter
Impuissant
Devant tant de désir
De se manifester
Amant incandescent
Qui jamais
Ne tarit
Le mot brûle mes nuits
Il rôde le jour
Tenace embryon
Réclamant
Sa pitance
Assoiffé
De mon antre
Qui de ma poussière
Vivante
Écume
Et succombe
Finalement
À ses ardeurs
Le temps d’un abandon
D’un trop-plein
Rencontre fugace
Étincelant
Mon firmament
Comme une lune vermeille
Rouge sang
De vie
Qui s’allume
Dans un au-delà infini
Source
Vite abandonnée
De peur d’y succomber
Comme une addiction
Qui pourrait
À la dérive
Me porter
Loin
D’ici
De ces masques
Qu’à mon âme
J’ai imposés
J’ai encore flâné
Durant cette journée
Qui t’était pourtant dédiée
Trompé
Encore une fois
Toi
L’écrit
Qu’il me tarde
De retrouver
Comme chaque fois
Où j’écume
Quelques bribes
De lunes
Pour apaiser
L’émoi
De t’oser
Toi
Vie
Autre
Que j’espère
Et que je n’ose
Abandonner
La prison dorée
Vivre droit devant
Sans autre repère
Que la légèreté de l’être
Me nourrissant
Des effluves
Du vent
Du bourdonnement
Des mots
Qui affluent
Accepter
De ne pas savoir
Où aller
Me laisser porter
Je ne serai pas seule en voyage
Mon ami, mon amour, mon amant
M’attend
À chaque page
Pour écrire les émois d’antan
Qui, depuis trop de lunes
S’ennuient de ma plume
Danser enfin
Aux lueurs du matin
Ou s’assoupir joyeux
Sous l’agile débit furieux
Du trop-plein de mots
Dégorgeant à pleines eaux
Les images et sensations
Glissant à fleur de peau
Une vie à se retrouver
Soleils de neige
Brillent dans l’univers
Comme diamants
Purs
Qui au fond de nous
Demeurent
À jamais cristallins
Croire encore
Au printemps
À l’horizon
Des lettres
De mon cœur
À ces curieux au Salon du livre de Montréal
Corps vibrant
Esprit flottant
Apparemment présent
Brouhaha assourdissant
Sous les feux de la rampe
Première loge
De fantômes vivants
Que des regards
Presque hagards
Balaient
Furtivement
Je suis là
Tu passes
Comment accrocher ton regard
Dans cette marée humaine
Déambulant
Entre les mots
Offerts
Aux passants
Ne semblent-ils pas
Pourtant
Coincés
Emprisonnés
Dans ces piles
De soi-disant inédits
Sur ces tables
S’amoncèlent
Sujets, thèmes,
Héros
Qui ne demandent
Qu’à partager
Un peu de leur
Nouvelle vie
Destinée
Qu’une âme inspirée
A couché sur ce papier