“Ecrire, c'est arrêter des parcelles d'instants pour les donner. Ecrire c'est déjà un peu arrêter le temps.” De Claude Péloquin / Mets tes raquettes
Parce qu’il y a des endroits où les mots se posent ainsi, aussi légers que la plume, aussi tendres qu’un billet doux. A la résidence Jeanne JUGAN, le temps a suspendu son vol au-dessus de la feuille blanche pour lui donner les couleurs de saison.
Ecrire est une aventure individuelle et identitaire. Les écrivains en herbe de la résidence ont écrit pour se retrouver, trouver leur voix, tracer leurs voies.
Ecrire seul ou ensemble est une aventure généreuse : chacun, chacune s’est découvert et s’est dévoilé autre.
Ecrire est un lien d’existence. Les écrivains en herbe de la résidence ont laissé ici la trace d’un petit bout d’eux-mêmes, se sont laissé surprendre par la beauté d’un mot, par l’arrondi d’une lettre, par le souffle vivifiant de la transmission et du partage.
Ecrire pour transmettre : c’est la reviviscence des souvenirs qui donne encore et encore le plus beau des souffles qui soit : celui de la vie.
Pendant un an, j’ai collecté vos mots dans l’intime de votre logement, dans le pluriel de l’atelier d’écriture « Mots de Femme ». Plusieurs histoires de vie se croisent et se tressent ici et j’ai vu votre étonnement d’avoir été capable de créer et de prouver que même arrivé au grand âge, on peut renaître.
Merci à chacun, chacune d’entre vous d’avoir laissé courir la plume avec sincérité, générosité, humour, poésie et tendresse.
Pascaline Duchemin-Pinard, art-thérapeute à la MAFPA Jeanne JUGAN.
C’est dans le cadre des journées du patrimoine organisées par l’association Mieux Vivre la Ville aux Dames que les lettres qui vont suivre ont été écrites.
Trois lettres qui nous livrent un quotidien rural, qui nous délivrent le labeur d’antan avec nostalgie ou qui nous racontent la terre d’hier et d’aujourd’hui.
Photo de Monsieur Maurice Leclerc : Les moissons
A toi, mon petit garçon Boris qui aimait être avec ton grand père et à Jean Marie, mon gendre.
Je suis allée à l'école jusqu'à l'âge de onze ans et demi. J'étais chez ma tante où je me suis beaucoup occupée des animaux de la ferme et j'allais dans les champs.
C’était dur : les betteraves, les fourrages, piocher, gratter. Je faisais ce que je pouvais chez ma tante. Puis je me suis mariée, à Dolus-le-Sec, à six kilomètres de Loches. On a pris une ferme avec ton grand père. Il y avait douze mères vaches et dix génisses.
Le matin, on se levait à quatre heures trente l’été pour faire la traite des vaches à la main. A six heures trente, notre laitier passait ramasser le lait parce qu'à l'époque nous n'avions rien pour mettre le lait au frais. L'hiver, on se levait un peu plus tard à cinq heures trente et le laitier passait plus tard.
Il y avait toute une préparation à faire avant de traire les vaches : leur laver le pis, nettoyer la queue des vaches. Tout devait être propre pour traire. C’était une question d’hygiène.
A la fin de la traite, on leur donnait du fourrage et nous allions prendre notre petit déjeuner. Après le petit déjeuner, on mettait les vaches au parc et nous partions nous occuper de la basse-cour.
Une fois la basse-cour terminée, on arrangeait la literie des vaches et ensuite quand tout ça était fini, on rentrait à la maison et on faisait notre grande toilette. La douche n’existait pas à l’époque.
Puis venait alors le temps du ménage, de la cuisine. Tout devait se faire avant de repartir travailler dans les champs. On préparait le potage pour deux jours.
On élevait des porcs : deux dans l'année pour nous nourrir. On mangeait aussi nos volailles, nos lapins. Nous avions tout à portée de main.