© 2018, Pascale Gelly
Éditeur : BoD - Books on Demand GmbH
12/14 rond-point des Champs Élysées
75008 Paris, France
Impression : BoD - Books on Demand GmbH, Norderstedt, Allemagne
ISBN : 978-2-322-15063-2
Dépôt légal : Août 2018
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle fait par quelque procédé que ce soit sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Remerciements chaleureux à tous ceux qui m’ont
accompagnée dans la réalisation de mon histoire.
Désormais, je me « dé-scoliose » pour enfin marcher droite…
Ce matin, quand je suis partie pour aller chez la psy du boulot, j’avais la poitrine douloureuse. C’est toujours comme « ça » quand j’attends mes règles. J’ai l’impression d’avoir à la place des seins, deux pierres...
Pierres... Pierre, tiens ! Ça fait combien de temps que je n’ai pas eu des nouvelles de lui ?
Deux pierres si lourdes à la place des seins que même quand je me déplace, ma démarche change. C’est sûrement le « ça » du Pierre.
Dos légèrement courbé. Je me suis arrêtée à la cafétéria de la gare déguster un bon jus d’orange (sans paille) 100% naturel, sans bulle ni colorant ni même l’orange sous la main !
Je ne nie pas le fait même d’être aujourd’hui aigrie et..., assise à la table. Le rapport ? Mais quel rapport ? Café té ri ah ah ah !
J’ai tout de suite su ce matin, dès le pied posé au sol, que c’était un jour à chier. À mourir de rire !
(Allongée sur mon futon, j’ai une toute autre vision. Perpendiculaire aux choses verticales de la vie. Ma vie cependant à l’horizon...).
C’est pas drôle ces regards tristes des gens qui partent travailler ! Ils occultent une partie de moi-même. Mon regard, triste aussi.
Yeux bleus rêveurs, rêvant... Celui peut-être que la psy voudrait pénétrer.
Un profond dégoût calé dans ma gorge. « Faut faire passer ça ! et au plus vite si possible ! » que je me dis. Alors d’un trait, vide le reste de jus d’orange ; pas une seule goutte ai laissé au fond du verre. À cet instant, là où « ça » coule, le liquide descend tout le long de ma trachée, c’est le ver qui me bouffe l’esprit jusque dans ma chair transparente qui jaillit soudain du verre.
Explosion aveugle des autres. Les morceaux sont nombreux, je les rassemble tout en pensant à ce que pensent les gens, me voyant faire des gestes précis dans une réalité vide... Confusion mentale probable.
Quelques neurones imprégnés de l’alcool de la veille doivent être en train de se disputer la meilleure place chaude dans mon cerveau en ébullition pour se reposer.
STOP.
Je suis étrangère à la chaise et la chaise m’est tellement et paradoxalement familière. Unique « appui » possible. Soutien psychologique ?
Quand je suis enfin partie, trois hommes (des ouvriers, apparemment, vu leur bleu de travail) m’ont souri. Alors « Bonjour ! » que je leur ai dit. Puis j’ai tracé jusque dans le wagon du métro. Je trépignais déjà. Pseudo-claustro-marteau-dingo !
Emboîtant le pas pour prendre l’escalator, me suis sentie conne. De quoi ? Ah ! la bonne question ! la vraiment bonne « pinable » question ! mais non, même pas conne assez conne cette question « impinable » !
Envie soudaine d’un croissant bien cuit, bien fait quoi ! Doré juste comme il faut ! De ma bouche déjà, la salive débordait. Ah, salope !
(Espère juste qu’on ne te remarque pas ! Sait-on jamais ce que les mauvais garçons peuvent penser ! Mais bien sûr !). Ouais, vite cours à la boulangerie t’acheter ce foutu satané croissant !
C’est « ça » la vie, merde ! la vraie : déguster tout et à fond ! Une minute, une seconde, une émotion, une odeur, un aliment, une chose...
Heu, une Chose... Voyons bien voir, une Chose comme « ça », par exemple ?
STOP.
— Je vous dois ?
— Trois francs et quatre-vingts centimes, mademoiselle.
— Voilà.
— C’est ça !
— Merci et bonne journée !
Me voilà à présent assise. Ou réassise, comme vous voudrez. Mais cette fois-ci sur une autre chaise, pardi ! Chaise moins confortable d’ailleurs ! Je teste la solidité de son dossier. Mon dos semble se « dé-scolioser ». Mes fesses elles, s’accommodent tant bien que mal autrement.
Mais tout de même, belle adaptation ! En face de moi, Kandinsky me décroche deux sourires crispés. Peut-être a-t-il remarqué quelques miettes de croissant à la commissure de mes lèvres. Il faut y voir dans son tableau ce que l’on veut, je crois. Façon de parler, façon d’être... C’est « ça » !
Le néon affreusement blanc écorche mes pupilles, dilatées. Ça se dilate les idées que j’ai ! Œil révulsif. C’est peut-être bel et bien cela la croisée des chemins. Mes yeux, tristes de bleutée sur le tableau de Kandinsky... Sans cils, sans paupière, l’œil n’exprime plus rien. Je pense subitement à une jeune danseuse étoile sans son tutu.
Il n’est plus très loin de 10 heures et la psy ne devrait pas tarder à se présenter à moi comme une bonne femme endimanchée. Une fleur dans un pré, les pétales bourrés d’insectes affamés... Bourrés ? Moi hier soir, nase, bourrée, gueule de bois ! Vlan ! Buvant le nectar..., orangé..., pour dessoûler..., de cette triste journée..., de ma putain de vie !
J’ai peur.
Je me redresse sur la chaise. Mes mains sont moites. Le ver de terre sort maintenant de mes yeux...